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L'article provient de Le Journal de Montréal
Justice et faits divers

Fraude immobilière de 5 M$: le SPVM décapite un important réseau

Les rencontres virtuelles pendant la pandémie ont facilité les crimes

Sous la supervision du commandant Steve Belzil, responsable de la section des crimes économiques, les sergentes-détectives Mélissa Desautels (milieu) et Karine Lessard (droite) ont travaillé pendant deux ans sur cette fastidieuse enquête afin d'arrêter les coupables.
Sous la supervision du commandant Steve Belzil, responsable de la section des crimes économiques, les sergentes-détectives Mélissa Desautels (milieu) et Karine Lessard (droite) ont travaillé pendant deux ans sur cette fastidieuse enquête afin d'arrêter les coupables. Photo Agence QMI, JOEL LEMAY
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Photo portrait de Frédérique Giguère

Frédérique Giguère

2023-11-01T09:00:00Z
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La police de Montréal vient de démanteler le plus vaste réseau de fraudeurs immobiliers de son histoire en arrêtant 17 personnes soupçonnées d’avoir profité de la pandémie pour réhypothéquer illégalement des maisons sous de fausses identités.

«C’est un cas typique d’enquête où on a suivi l’argent, explique la sergente-détective Karine Lessard, qui travaille sur le dossier depuis deux ans. Il y a eu énormément d’étapes avant d’en venir à nos conclusions. Ça prend beaucoup de patience et de rigueur, c’est facile de se perdre si on veut aller trop vite.»

Tout a commencé à l’été 2021, lorsqu’une personne a fait des démarches afin de refinancer sa résidence. Alors qu’elle tentait d’obtenir un prêt hypothécaire, on l’a informé qu’il en existait déjà un de 750 000$ contracté à son nom auprès d’un prêteur privé.

«C’était le choc total», ajoute la sergente-détective.

  • Écoutez le segment judiciaire avec Félix Séguin qui revient sur le sujet via QUB radio :

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Rencontres virtuelles

De fil en aiguille, les enquêteurs de la section des crimes économiques ont réussi à retrouver d’autres propriétaires de résidences ou de terrains vacants ayant été victimes du même stratagème. Le montant total des fraudes s’élève à plus de 5 millions $, indique la police.

Les crimes ont été commis pendant la pandémie – une opportunité en or pour les fraudeurs. Comme la majorité des rencontres se faisaient alors en virtuel, usurper l’identité de quelqu’un d’autre pour faire signer une procuration ou pour ouvrir un compte bancaire était quasiment un jeu d’enfant.

Quelques fausses pièces d'identité utilisées par les fraudeurs.
Quelques fausses pièces d'identité utilisées par les fraudeurs. Photo Agence QMI, JOEL LEMAY

Le réseau de fraudeurs se servait de prête-noms, généralement des personnes vulnérables ou qui avaient besoin de faire une «passe d’argent», qu’ils dénichaient dans les bars de Montréal. 

«C’était facile pour ces personnes-là, ce n’est pas comme aller voler une banque ou tirer sur quelqu’un, c’est une rencontre virtuelle où tu personnifies quelqu’un le temps d’une rencontre derrière ton ordinateur», explique la sergente-détective Mélissa Desautels.

Puis le réseau déployait ses vastes tentacules afin de brouiller les pistes le plus possible. De nombreuses personnes étaient impliquées dans le subterfuge.

Une importante quantité de documents et de fichiers ont été amassés pendant l'enquête qui s'est échelonnée sur deux ans.
Une importante quantité de documents et de fichiers ont été amassés pendant l'enquête qui s'est échelonnée sur deux ans. Photo Agence QMI, JOEL LEMAY

La tête dirigeante de ce réseau est un homme de 34 ans qui fait l’objet d’un mandat d’arrestation. Les policiers espèrent lui passer les menottes bientôt. En attendant, ils feront comparaître aujourd’hui sept femmes et dix hommes âgés de 22 à 60 ans au palais de justice de Montréal. Des accusations de fraude, de recyclage des produits de la criminalité, de recel et de complot seront déposées.

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Les sergentes-détectives Catherine Christie (superviseure du dossier), Mélissa Desautels et Karine Lessard travaillent à la section des crimes économiques avec leur commandant Steve Belzil.
Les sergentes-détectives Catherine Christie (superviseure du dossier), Mélissa Desautels et Karine Lessard travaillent à la section des crimes économiques avec leur commandant Steve Belzil. Photo Agence QMI, JOEL LEMAY

Luxueuses propriétés

Les maisons ciblées par les fraudeurs sont de luxueuses résidences de Westmount et de Beaconsfield libres d’hypothèques. Les terrains sont pour leur part situés à L’Île-des-Sœurs.

Comme les fraudeurs ont utilisé des compagnies coquilles, il fut très difficile pour les enquêteurs de récupérer l’argent volé. Jusqu’à présent, seul un montant de 150 000$ a pu être recouvré.  

«On a déjà vu ce stratagème avant, mais de cette ampleur-là, on n’a jamais vu ça», conclut la sergente-détective superviseure de l’enquête Catherine Christie. 

Exemple d’un cas type: 

1- À l’aide d’une fausse identité, les prête-noms signent un bail de façon virtuelle pour louer une résidence afin d’avoir un accès aux lieux. 

2- Lors d'une rencontre virtuelle avec un notaire, les prête-noms se présentent comme étant les vrais propriétaires. Ils signent une procuration à un membre du réseau criminel afin de lui octroyer les pleins pouvoirs sur la maison. 

3- Les fraudeurs ouvrent un compte bancaire en ligne au nom des vrais propriétaires en utilisant une fausse identité. 

4- Le fraudeur ayant la procuration obtient du financement auprès d’un prêteur privé. Ceux-ci demandent d’abord à visiter les lieux, ce que les fraudeurs peuvent faire puisqu’ils ont signé un bail. 

5- Il rencontre ensuite un nouveau notaire afin d’officialiser l’acte hypothécaire.

6- Les fonds sont déposés dans le compte bancaire, puis liquidés ailleurs afin qu’ils ne soient pas retraçables.

Comment prévenir ce type de fraude:

- Les maisons ciblées sont libres d’hypothèques et offertes en location. Les propriétaires de ce type de résidence doivent être particulièrement vigilants;

- Privilégier les rencontres en personne lorsqu’il s’agit d’une étape importante comme la signature d’un bail ou le passage chez le notaire;

- Toujours comparer une pièce d’identité fournie par quelqu’un avec une véritable;

- Demandez plus d’une pièce d’identité;

- Soyez alertes lorsqu’une procuration est utilisée 

- Informez-vous sur l’assurance-titre, qui pourrait assumer les frais associés à un recours civil

Source : SPVM

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