Francisation des immigrants en entreprise: pas la voie à suivre, selon le commissaire à la langue française
Mieux vaut aller chercher des travailleurs qui maîtrisent déjà la langue de Molière


Geneviève Lajoie
La francisation des immigrants en entreprise à coup de subventions publiques coûte cher et n’est pas efficace, selon le commissaire à la langue française, Benoît Dubreuil. Mieux vaut aller chercher des travailleurs qui maîtrisent déjà la langue de Molière.
Dans un rapport déposé mercredi à l’Assemblée nationale, le commissaire Dubreuil est très critique des programmes de Francisation Québec en milieu de travail. Force est d’admettre que l’enveloppe de 12,6 millions $ d’argent public alloué à des cours de français offerts aux nouveaux arrivants sur les heures de boulot ne donne pas les résultats escomptés.
«On ne peut pas faire de miracles avec une formation à temps partiel», a-t-il admis. Avec les programmes actuellement offerts en entreprise de trois heures de formation par semaine, il faut environ quatre ans à un immigrant pour atteindre un niveau de français de base et onze ans pour aspirer à l’autonomie langagière.
«Le modèle qu’on a développé au cours des quatre, cinq, six dernières années, où les employeurs vont chercher aux Philippines, vont chercher en Amérique latine, des travailleurs qui sont au niveau zéro de français et les amènent dans des milieux de travail en donnant de la formation, de la francisation à des doses très, très faibles, ça, ce n’est pas une solution qui est gagnante», constate-t-il.
Selon Benoît Dubreuil, la pérennité du français passe par une plus grande part d’immigration francophone, même pour les travailleurs temporaires. «Soit on fait du recrutement dans les pays francophones, soit on trouve des manières d’intensifier la formation avant que la personne n’arrive en poste», a-t-il plaidé, en conférence de presse.
Demandeurs d’asile
Le commissaire à la langue française n’a pas caché non plus son inquiétude devant le changement de profil des demandeurs d’asile qui foulent le sol québécois. Si leur nombre a légèrement diminué en 2024, la provenance de ces nouveaux arrivants n’est pas favorable au français.
«[Il y a une baisse] des gens originaires du Mexique et une hausse importante des gens qui sont originaires d’Asie du Sud ou d’Afrique anglophone. Donc des gens qui, a priori, ont plutôt tendance à s’intégrer en anglais», déplore-t-il.
Benoît Dubreuil souligne que les demandeurs d’asile sont encore peu nombreux à s’inscrire aux cours de francisation.
«Concrètement, ça veut dire qu’il y a plusieurs dizaines de milliers de personnes qui ne parlent pas français, plusieurs qui ne parlent ni français ni anglais, à qui on donne des permis de travail, qui sont ici au Québec et qui entrent dans toutes sortes de milieux de travail.»