France Castel bouleversée par son plus récent rôle à l'écran
«Habiter la maison» est désormais en salle
Alicia Bélanger-Bolduc
La réputation de France Castel n’est plus à faire. Avec près de 60 ans de carrière, elle a exploré toutes les facettes du monde artistique, passant avec aisance de la musique à l’animation, ou encore du théâtre au cinéma, et elle continue de nous éblouir par son talent et sa polyvalence. Dans le nouveau long métrage Habiter la maison, elle révèle une autre dimension de son jeu d’actrice: une vulnérabilité touchante et une profonde empathie incarnées dans le personnage de Colette, une femme confrontée à la douloureuse réalité de la démence. L’interprétation de France Castel ne manquera pas de captiver le public et de confirmer, une fois de plus, l’immensité de son savoir-faire.
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Vous interprétez un personnage franchement bouleversant dans le film Habiter la maison!
La belle Colette est une chanteuse qui s’est toujours crue éternelle, aussi bien dans sa carrière que dans sa vie passée. Au fil de l’histoire, on réalise qu’elle a privilégié sa notoriété au détriment de sa famille, délaissant son fils, Simon. Mais alors qu’elle commence à perdre ses repères, elle prend conscience que la seule véritable constance dans son quotidien est la famille que Simon a bâtie. J’ai beaucoup aimé incarner ce rôle émouvant.
Quelle a été votre première réaction en découvrant le scénario du film?
C’est un texte qui m’a beaucoup bouleversée. Indépendamment de l’histoire, je trouvais que les thèmes reflétaient aussi un pan de notre société. On parle de la jeunesse et de tout ce qui se désagrège avec l’âge, entre autres avec la maladie d’Alzheimer, qui frappe mon personnage mais aussi tellement de personnes dans notre société. Je trouve que c’est un film absolument nécessaire qui peut nous apporter une certaine réflexion. Selon moi, il aborde des sujets essentiels. C’est la force que Renée Beaulieu a insufflée à ce film.
Est-ce frappant de se voir dans un tel état de vulnérabilité au grand écran?
Ah mon dieu que oui! (rires) C’est facile de se projeter dans cette réalité, puisqu’on ne sait jamais ce qui peut nous arriver. Je suis allée chercher en moi cette possibilité pour jouer une telle fragilité. Même si je ne perds pas la tête encore, c’est une éventualité probable. J’ai quand même 80 ans, ma vie s’étiole tranquillement, la chanteuse en moi est moins vivante. Je suis heureuse de travailler autant, mais je me sens ralentir aussi. J’ai également beaucoup reconnu mes petits-enfants dans ce film. C’est un portrait assez juste et poétisé de la société.
Certains aspects de la vie de Colette peuvent ressembler à la vôtre. Vous êtes-vous reconnue à certains égards dans ce personnage?
Souvent, quand on pense à une chanteuse, on pense à moi! (rires) Je l’ai interprétée avec tout mon cœur en y décelant des parties de moi, mais ce n’est pas mon histoire. C’est un beau cadeau qu’ils aient pensé à moi pour ce personnage. Je l’ai joué avec une grande humilité et beaucoup de gratitude.
Comment vous êtes-vous préparée pour ce rôle qui demande autant de subtilité et d’introspection?
Je l’ai beaucoup travaillé de l’intérieur, puisque l’émotion passait par les regards. Je n’avais pas à façonner fortement la partie chanteuse; ça, je l’ai trouvée facilement! (rires) La direction de la réalisatrice m’a énormément guidée dans l’interprétation de cette femme dépassée qui perd progressivement ses repères. J’ai dû approfondir et modeler cette complexité pour lui donner toute ses nuances et son authenticité.
Après 60 ans de métier, qu’est-ce qui garde la flamme en vie?
Je crois que j’ai encore une grande énergie qui me permet de rester très allumée et à l’écoute. Je me rends disponible et ouverte à toutes les idées, et probablement que cela se ressent. Je suis toujours curieuse et ça me garde vivante. Il y a constamment des éléments qui éveillent mon intérêt dans divers projets. Je veux aussi représenter les gens de mon âge, afin qu’on ait une autre image que ce qu’on voit en général dans nos écrans.
Comment est France Castel sur un plateau de tournage?
Il faudrait demander à mes collègues! (rires) Je suis une partenaire qui adore travailler en équipe et qui aime collaborer avec des gens de différents milieux et d’âges variés. J’apprécie ce mélange qu’apporte un plateau de tournage. Je dirais que je suis une bonne collègue de travail.
Tout comme votre personnage, vous êtes une chanteuse. Vous avez renoué avec votre passion depuis votre album sorti en 2022. Qu’est-ce qui a ravivé en vous le désir de replonger dans la musique après tant d’années?
On était en pleine pandémie et tout le monde me demandait pourquoi je ne sortirais pas un projet musical. Je me suis questionnée sur ce que j’avais envie de véhiculer à mon âge. C’est devenu cet opus, qui n’est pas du tout révélateur de la chanteuse que je suis, mais bien de l’interprète. La chanteuse en moi n’est pas morte, je fais encore des projets en lien avec la musique, comme Les belles-sœurs symphonique, et j’aime découvrir ce qui se fait de nouveau dans le milieu. Par contre, personnellement, je ne vois plus ce que je peux apporter d’autre dans ce domaine; j’ai fait ce que j’avais envie d’accomplir.
Avec une carrière aussi remplie et diversifiée, comment vous décririez-vous dans l’industrie?
Ça dépend sans doute de ce que je fais, mais j’essaie de ne pas trop me définir par mon travail. Alors, quand je chante, je suis une chanteuse; et quand j’anime, je suis une animatrice. Je ne suis vraiment qu’une artiste multidisciplinaire. Foncièrement, dans mon identification personnelle, j’aime mieux me décrire comme une femme de 80 ans et une mère de famille. C’est ce qui est beaucoup plus important pour moi et qui me représente.
Est-ce qu’il vous reste toujours un rêve à accomplir dans ce milieu?
Je ne pense à rien de très précis. Mon souhait le plus profond est que mes enfants s’épanouissent et se réalisent. C’est le plus important. Quant à ma carrière d’actrice, je n’ai jamais incarné de sainte et j’aimerais explorer ce côté de mon jeu! (rires) Je sortirais vraiment de ma zone de confort, ça me ferait un casting très différent et surprenant pour le public!
Quels sont vos prochains projets?
Il y a Les belles-sœurs symphonique, avec une équipe en or, où je joue Rhéauna, une femme dure et dominatrice. Cela occupera une partie de mon été. Sinon, je fais partie de la distribution du film de Noël Juste Xavier, pour lequel nous avons débuté les tournages il y a quelques semaines. Il y a même des actrices sur des patins à roulettes dans le film, ce qui m’impressionne beaucoup. Les gens devront l’écouter pour voir si j’ai enfilé un tel équipement! (rires)