France Beaudoin révèle les origines intimes d'«En direct de l'univers»
La 17e saison démarre à Radio-Canada le 13 septembre à 19 h.
Patrick Delisle-Crevier
Cet été, France Beaudoin a décroché autant que possible, auprès des siens, dans la maison de campagne familiale. Mais la revoici cet automne avec un horaire bien chargé, entre autres par la 17e saison d'En direct de l’univers, le retour de Pour emporter et la diffusion de J’ai souvenir encore, un magnifique documentaire qui marie musique et mémoire. Elle nous parle de son besoin d'être bonne deuxième, de son mariage discret avec Vincent Graton et de leurs deux enfants, Théo et Juliette.
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D’abord, France, comment vas-tu?
Ça va vraiment bien, j’ai eu un été calme au chalet, nous ne sommes pas partis en voyage et on s’est collés sur notre monde ici, au Québec. Ç'a été un été que j’ai eu le temps de vivre et de voir passer, pour une fois. Partir en voyage, c’est super le fun, mais ne pas partir, ça fait en sorte que tu as du temps pour te reposer et te poser. C'était donc de belles vacances.
Ce repos a été possible même si ton chum, Vincent Graton, tourne dans la quotidienne Antigang?
Oui. Bon, il apprenait ses textes dans son coin au chalet, mais il a tout de même pu décrocher lui aussi. Maintenant, il est en tournage et il adore ça. C’est certain qu’avoir un chum qui tourne dans une quotidienne, ça change le rythme, mais en même temps, je suis tellement contente pour lui!
Et toi, tu entames la 17e saison d'En direct de l’univers...
Oui, et nous allons partir ça en grand avec la distribution de la nouvelle quotidienne, Antigang. Au cours de la saison, nous aurons aussi Marie-Philip Poulin, Colette Provencher, Guillaume Pineault, Jean-Michel Blais, Sara Dufour, Karine Gonthier-Hyndman, Mario Pelchat, Luc Senay et nous allons célébrer notre 400e épisode.
Pensais-tu que cette émission serait aussi marquante et qu’elle aurait une telle pérennité?
Non, jamais! Même qu'au début, c’était tellement de travail de faire cette émission-là qu’on pensait qu’on n'y arriverait jamais. Maintenant, d’année en année, on se pose encore la question, mais quand on regarde la liste des gens qu'on peut inviter, elle est tellement longue qu’on se dit que c’est encore possible. Nous avons une erre d’aller, depuis toutes ces années, mais la décision revient toujours à Radio-Canada, c’est eux qui prennent la décision finale. Même les cotes d’écoute se maintiennent, alors je suis ravie. Mais nous, les membres de l’équipe, nous avons encore le même plaisir à faire cette émission et à nous retrouver chaque mois de septembre depuis 17 ans. Je me souviens qu’au début, on nous disait que les émissions musicales ne marchaient plus. Je venais de perdre mon emploi avec l’émission M pour musique, qui n’avait pas assez fonctionné, et on m’a donné une deuxième chance avec En direct de l’univers. Ça a marché.
Pensais-tu avoir une telle stabilité dans ta vie?
Non, c’est certain, mais ça aura changé quelque chose dans ma vie, tout ça. Sérieusement, le plaisir de faire cette émission est encore là, mais si un jour la passion n’y était plus, nous arrêterions. Pas question non plus de nous imposer: si le public n’était plus au rendez-vous, nous tirerions notre révérence. Mais le monde est encore présent, le plaisir est encore là et nous n’avons aucune raison d’arrêter ce beau projet! Avoir cette stabilité est une chance; je suis très consciente de ce privilège et je compte bien aller au bout de l’exercice. Mais je ne voudrais jamais être dans mes pantoufles et faire l’année de trop.
Parle-moi de la 400e, qui sera bien spéciale.
Oui, des membres du public seront invités à avoir leur En direct de l’univers. Depuis le temps que les gens nous le demandent! Les gens doivent inscrire une personne qu'ils aiment en cachette. Il faut vraiment que ce soit une surprise. La personne ne doit absolument pas savoir que quelqu’un l’a inscrite à En direct de l’univers. Les heureux élus seront kidnappés quelques jours auparavant. On avait essayé de faire ce concept pour la 300e de l’émission, mais ç'a été annulé à cause de la pandémie.
Est-ce vrai que la genèse de l’émission En direct de l’univers est liée à ta maman?
Oui, ce qu’on voit chaque samedi soir à la télévision, c’est exactement ce qui se passait chez nous, à l’époque. Il y avait toujours des partys de musique et de famille organisés par mon oncle. Souvent, on faisait des fêtes surprises et on débarquait chez une personne pour la célébrer. Ma famille avait même formé un groupe qui allait dans les résidences pour aînés pour offrir des fêtes surprises aux personnes âgées. Quand ma mère a eu 59 ans, j’ai contacté Jeanne-d’Arc Charlebois, qui est venue chanter pour elle. Elle a frappé à la porte lors d’un party de famille et ç’a été une soirée mémorable. C’était exactement le même principe qu'En direct de l’univers.
Est-ce difficile de ne jamais avoir tes samedis soirs?
C’est certain qu’il y a eu une période d’ajustement et que nous avons eu à nous organiser en famille. Mais je ne suis pas la seule: les médecins, les policiers, les ambulanciers et combien d’autres travaillent les fins de semaine? Et puis, ce ne sont que 23 samedis par année! Mes enfants et leurs amis ont grandi sur ce plateau et on s’est fait une vie à travers tout ça. Là, mes deux enfants sont plus vieux. Notre fils, Théo, a 18 ans et notre fille, Juliette, en a 21, alors le samedi soir, ils ont leur vie. Mais nous avons vécu de beaux moments ensemble sur ce plateau et en coulisses. Les enfants de toute l'équipe ont aussi grandi là.
France, parle-moi de ton nouveau documentaire, J’ai souvenir encore.
On connaît tous des gens, dans nos familles, qui perdent la mémoire, parce qu'ils sont atteints de la maladie d’Alzheimer ou de troubles neurocognitifs, et ce documentaire établit un lien entre la musique et la mémoire. Nous nous sommes rendus dans des RPA (résidences pour personnes âgées) et nous avons pu être témoins du pouvoir puissant de la musique sur la mémoire. Souvent, les gens ne se souviennent pas des prénoms de leurs proches, mais quand on met une chanson qu’ils connaissent, ils se souviennent des paroles par cœur. Pour comprendre ce phénomène, on est allés voir des médecins, des gériatres, des chercheurs, des scientifiques. C’est un documentaire très touchant qui nous fait réaliser que la musique peut parfois servir de voie de contournement pour reconnecter avec une personne, peut-être le temps d’une chanson. Ça fait des années que je propose un tel documentaire. Je me souviens entre autres du passage de Renée Claude à En direct de l'univers, elle souffrait de la maladie d’Alzheimer, mais elle a pu chanter la touchante chanson Avec le temps, en se souvenant très bien des paroles.
France, tu as plus de 30 ans de carrière. Est-ce que cela ressemble à ce que tu avais imaginé?
Non, pas du tout. J’étais journaliste, au départ. Je ne pensais pas devenir animatrice. Mais je n’ai jamais eu de plan de carrière; je me suis toujours fiée à mon instinct et je n’ai jamais été dans le calcul. Je n’ai jamais fait les choses pour l’image non plus. J’ai tenté de faire du mieux que je pouvais, et c’est ce qui a guidé ma carrière et ma vie.
J’ai l’impression que tu es devant les projecteurs, mais qu'en même temps, tu ne carbures pas à ça.
Effectivement, je ne suis pas quelqu'un qui court les tapis rouges et les grandes premières de film. Je vais plutôt voir le film le lendemain, toute seule avec ma casquette. C’est ça que j’aime. Je ne juge pas et je n’ai rien contre le star système, mais je suis de nature plutôt discrète. Je suis mariée avec un acteur qui, comme moi, ne court pas les grands événements mondains. Étant timide de nature, je pensais travailler derrière les caméras, alors je me respecte là-dedans et je connais mes limites. Nous sommes très terre-à-terre et casaniers, Vincent et moi. Même que nous sommes allés vivre dans le petit village où j’ai grandi! Je suis bien dans mes racines.
Vous êtes ensemble depuis 25 ans, Vincent et toi. Comment célébrez-vous ça?
Nous sommes plus du genre à célébrer les autres que nous-mêmes. Je me souviens même que je ne voulais pas me marier parce que je ne voulais pas que tout le monde me regarde quand j’allais descendre dans l’allée. Je ne voulais pas être le centre d’attention de cette journée. Finalement, nous nous sommes mariés car nous devions le faire pour adopter notre fille. Mais ç'a été un mariage secret: nos proches sont arrivés et ne savaient pas que c’était notre mariage. On a convié les gens à venir passer la fin de semaine avec nous, on leur a proposé un jeu, qui était une espèce de chasse au trésor. Chacun avait un parchemin expliquant pourquoi c’était important pour nous qu’ils soient là et ça finissait avec les mots: «By the way, on se marie dans 10 minutes.» Ç’a été très simple et significatif pour nous.
Tu dis que tu préfères être une bonne deuxième plutôt qu’une première. Explique-moi ça?
Je le pense vraiment, je suis très confortable dans un rôle de deuxième. Je trouve qu’on sous-estime les avantages d’être deuxième: tu ne reçois pas tout le vent de face. Ce n’est pas que je ne veux pas être première, c'est juste que les seconds rôles, ceux qui tendent la perche, j’aime ça. Je suis bien dans ce rôle-là. Même petite, je voulais être la deuxième dans le rang, j’ai toujours aimé cette position-là. Je n’ai pas la volonté ni le besoin d’être la meilleure — je ne me croirais pas. Le succès est avant tout une équation de plusieurs personnes; je ne veux pas être mise en avant absolument.
C’est pour ça que tu te confies peu et que tu ne fais que très rarement la couverture des magazines?
Encore là, c’est une question de personnalité. Souvent, j’accepte les entrevues avec plaisir, mais je ne veux surtout pas être en couverture. C’est peut-être un cas de psychothérapie! (rires) Quand mon fils Théo a fait l’émission Révolution, par exemple, c’était important pour moi qu'il chemine dans cette aventure par lui-même, sans que les gens sachent que c’était notre fils. Il n’a même pas indiqué son nom de famille sur sa fiche d’inscription. Il voulait faire son chemin tout seul, et non suivre son père et sa mère. On est tellement fiers de notre fils!
Comment va-t-il, d'ailleurs?
Il va très bien. Il continue la danse, enseigne, et il est aussi comédien, maintenant. Il touche à tellement de choses dans l’interprétation. Ma fille, Juliette, est à l’Université, en littérature — elle lit des centaines de pages par semaine depuis qu’elle est toute petite.
En terminant, qui aimerais-tu avoir à En direct de l’univers ou à Pour emporter cette année?
J’aimerais vraiment recevoir Xavier Dolan à l’une ou l’autre de ces émissions. On a souvent fait des demandes, mais ça n’adonnait pas. Il y a aussi Jean-René Dufort et Alexandre Barrette, mais bon, on a abandonné l’idée et c’est devenu un running gag!