Guerre en Ukraine: fier et satisfait de sa mission de 10 jours à la frontière polonaise
Un médecin québécois est heureux de l’aide qu’il a apportée aux victimes

Héloïse Archambault
Tout juste revenu de la Pologne où il a soigné des réfugiés de guerre jour et nuit, un médecin de famille a le sentiment du devoir accompli, et est fier d’avoir inspiré plusieurs Québécois qui voulaient venir en aide au peuple ukrainien.
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«J’ai réussi à faire exactement ce que je voulais faire, j’ai apporté mon aide comme je pouvais. [...] Je suis complètement satisfait», confie Julien Auger, trois jours après son retour au Québec.
Le 3 mars, ce père de deux jeunes enfants de 3 et 5 ans en avait étonné plusieurs en annonçant qu’il allait en Ukraine. Envahi par un sentiment d’impuissance, il souhaitait aller aider les civils blessés.

Dès l’annonce de son départ, il a reçu une vague de messages de Québécois qui souhaitaient aider.
«Je suis fier de moi d’avoir eu le guts!, raconte l’homme de 35 ans qui n’est pas un grand voyageur. Au début, il n’y avait pas de réponse humanitaire. Personne ne se manifestait comme moi pour dire qu’ils y allaient. Je me sentais interpellé, je me disais : “ça va peut-être inspirer d’autre monde, et le gouvernement”.»
Revenu le 21 mars, l’omnipraticien de Saint-Jérôme, sur la Rive-Nord de Montréal, est finalement resté du côté polonais de la frontière, à Hrebenne.
«Je pensais que c’était sécuritaire d’aller dans un hôpital civil [en Ukraine]. Mais, il y a eu des attaques ciblées sur des hôpitaux, sur la centrale nucléaire. [...] Ils [les Russes] ciblaient l’aide médicale et humanitaire, donc j’ai décidé de ne pas traverser», dit celui qui a déjà repris le travail au Québec.
«Peut-être que si j’avais été célibataire sans enfant, je serai allé de l’autre bord», ajoute-t-il.

Pas bu ni mangé depuis 24 heures
Durant 10 jours, le médecin a fait rouler une clinique médicale d’urgence jour et nuit, avec d’autres volontaires venus de l’étranger. Déshydratation, anxiété, allergies : il a soigné des réfugiés ukrainiens qui venaient de traverser la frontière après un long voyage.
«Plusieurs n’avaient pas bu ni mangé durant 24 heures», dit-il.
Spécialisé dans les soins palliatifs, le Dr Auger n’a pas été traumatisé par la violence de la guerre sur place, mais il a été secoué par l’impact de l’invasion russe sur les citoyens, surtout les enfants.
«Ils sont pris dans des refuges depuis un mois, ils se cachent... Ils n’ont rien demandé à personne, ils sont au mauvais endroit au mauvais moment. Ils vont être traumatisés pour leur vie», déplore-t-il.
Entre bonnes mains
À son départ, le Dr Auger avait dit qu’il ne voulait pas attendre un organisme d’aide pour partir en Ukraine, parce qu’il craignait que le délai soit trop long. Le 18 mars, une équipe prenait le relais de sa clinique.
«Quand je suis parti, je me suis assuré de laisser le camp entre bonnes mains. Ma part était faite, je n’avais pas besoin de rester plus longtemps», dit celui qui n’a pas l’intention de retourner là-bas.
Or, il croit que les organisations humanitaires devraient réagir plus promptement lors de situations de crise.
«Il pourrait y avoir une révision de leur façon de faire pour avoir une équipe d’urgence qui se rend et qui voit les besoins, avec du monde prêt», dit-il.
Le Dr Julien Auger raconte

Nouveau-né mal en point
Un bébé de 4 mois qui était né « grand prématuré » est arrivé à la clinique avec sa mère, après avoir dû quitter l’urgence de l’hôpital de Lviv où il était hospitalisé.
« Il n’avait pas de gras, tout petit, il n’avait pas l’air fort. Il était emmitouflé avec sa mère qui avait deux autres enfants. Ils ont pris l’ambulance, et se sont rendus dans un hôpital. »
Si c’était à refaire ?
« J’aurais voulu arriver plus vite. Un homme est mort la veille [de son arrivée] d’une crise d’épilepsie. Personne n’a été capable de l’intuber, mais il aurait probablement survécu. »
Pas inquiet de la COVID-19
Le médecin de famille avait contracté la COVID-19 en février, donc il n’avait pas d’inquiétude de tomber malade. Puisque le masque était mal perçu en Pologne, il évitait de le mettre.
« C’était comme un vent de fraîcheur. »