Fiasco SAAQclic: les ministres attendus de pied ferme


Patrick Bellerose
Surnommé le «shérif de La Peltrie» du temps où il dénonçait l’incompétence à tout vent, Éric Caire sera dans le collimateur du PQ, cette semaine, après avoir rejeté toute responsabilité dans le fiasco SAAQclic. Les libéraux, eux, talonneront les ministres Bonnardel et Guilbault sur le suivi fait auprès des dirigeants.
Les partis d’opposition n’entendent pas laisser le gouvernement Legault blâmer des cadres supérieurs pour les dépassements de coûts de 500 millions $ et les nombreux problèmes dans le virage numérique de la SAAQ.
«Compte tenu de son historique dans l’opposition, le fait qu’il était très dur envers le gouvernement précédent, on se serait attendus à ce qu’Éric Caire soit sans pitié envers les organismes qu’il chapeaute», souligne le député péquiste Joël Arseneau.
Selon la Vérificatrice générale, le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, ses collègues aux Transports, de même que le PDG et le président du conseil d’administration auraient été bernés par les responsables du dossier, dont le vice-président Karl Malenfant.
Mais Joël Arseneau fait valoir que le ministère d’Éric Caire a justement été créé pour soutenir la «transformation numérique dans l’appareil gouvernemental». Le ministre aurait dû agir de façon «proactive» afin de faire le suivi projet, estime-t-il.
«On n’arrive pas à comprendre que le ministère de la Cybersécurité, qui est responsable d’accompagner les organismes gouvernementaux depuis le 1er janvier 2022, plaide l’ignorance aujourd’hui», dit le député péquiste.
Procès-verbaux caviardés
Pour le libéral Monsef Derraji, la responsabilité du dérapage revient plutôt aux deux ministres qui se sont succédé aux Transports durant la mise en place du projet : François Bonnardel et Geneviève Guilbault.
Après tout, la SAAQ était sous leur responsabilité. «Ils ont démontré une négligence extrême», dit-il.
Les libéraux demandent donc au gouvernement Legault de rendre publics les procès-verbaux du conseil d’administration. La version obtenue grâce à une demande d’accès à l’information est lourdement caviardée.
Monsef Derraji souligne également un passage du rapport de la VG où la SAAQ propose deux options pour le suivi du projet, dont une qui impliquait de rendre publics les dépassements de coûts dans le cadre d’un appel d’offres.
Vu le «risque médiatique et politique élevé», une seconde option comportant plusieurs risques a été retenue, afin de demeurer en dessous du seuil d’appel d’offres public, écrit la VG.
«Donc, c’est impossible qu’ils n’aient pas parlé avec le ministre pour prendre cette décision», estime le député libéral.
Dossier santé numérique
Après, les dérapages à la SAAQ, Joël Arseneau redoute maintenant la mise en place du Dossier santé numérique, l’immense chantier de numérisation du système de santé évalué à 1,5 milliard$.
«On est extrêmement inquiets, parce que le modus operandiest essentiellement le même : on confie le soin des opérations à une agence indépendante (NDLR Santé Québec), qui répond à un conseil d’administration», observe M. Arseneau.
Fait étonnant, le ministère de la Cybersécurité et du Numérique expliquait au Journal, l’an dernier, que ses équipes sont très peu impliquées dans le déploiement du DSN, essentiellement confié à la firme américaine EPIC.
«Actuellement, aucun employé du MCN n’est affecté ou appelé à l’être directement pour la mise en place du Dossier santé numérique», écrivait le ministère.