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L'article provient de TVA Nouvelles
Politique

Fiasco SAAQclic: des policiers mettent en joue par erreur la famille d’un garçon atteint du cancer

Des histoires d’horreur révélées par les enquêteurs de la commission

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Photo portrait de Nicolas Lachance

Nicolas Lachance

2025-09-05T18:28:11Z
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Des policiers ont intercepté un véhicule et mis en joue ses occupants après que la SAAQ a indiqué par erreur que le véhicule avait été volé. Il s’agissait en réalité d’une famille sortant de l’hôpital avec son garçon, qui venait de recevoir un traitement contre le cancer. Les partenaires de la SAAQ ont vécu des conséquences «dramatiques» en raison de son virage numérique.

Plusieurs individus et organisations ont été affectés par le déploiement chaotique de la plateforme CASA/SAAQclic.

Conséquences humaines et judiciaires, impacts financiers sur les municipalités, problèmes techniques et juridiques: la commission Gallant a mandaté son enquêteur Michel Comeau afin qu’il résume les nombreux incidents survenus depuis février 2022 en raison des problèmes du système.

Le portrait n’est pas reluisant et même «dramatique», selon l’enquêteur.

Histoires troublantes

La nouvelle plateforme a principalement nui au travail des policiers sur le terrain, a-t-il résumé, en relatant certaines histoires troublantes.

«On a un cas rapporté par l’Association des directeurs de police du Québec. À la suite d’une interrogation de la SAAQ concernant une plaque d’immatriculation, le véhicule est apparu comme étant volé», a-t-il expliqué.

«Il y a eu une interception routière par plusieurs véhicules de police. Ils ont encerclé le véhicule, ont pris toutes les précautions, ont mis en joue le conducteur, ont demandé aux occupants de sortir et les ont couchés au sol. Il s’agissait d’un garçon qui sortait de l’hôpital après un traitement contre le cancer, accompagné de sa mère. Des excuses ont été présentées, et l’affaire n’a pas eu de suite, mais c’est un événement extrêmement dramatique.»

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Les opérations policières ont été perturbées de diverses façons. Par exemple, les mises à jour du système survenaient pendant des opérations concertées avec les corps policiers.

Les lecteurs de plaques d’immatriculation, utilisés pour détecter les permis suspendus ou les plaques impayées, ne fonctionnaient plus. En raison de la lenteur du système, les véhicules ciblés étaient «souvent déjà hors de portée», a précisé l’enquêteur Comeau.

Ces lecteurs ont même été suspendus jusqu’en 2025, ce qui a limité la capacité d’intervention des policiers.

Des problèmes techniques ont également empêché la saisie de véhicules lors de grands excès de vitesse.

«Des décrets ont été émis demandant aux corps policiers de faire preuve d’indulgence en raison de problèmes de fiabilité du système d’information», a-t-il ajouté.

Photo fournie par COMMISSION D’ENQUÊTE SUR LA GESTION DE LA MODERNISATION DES SYSTÈMES INFORMATIQUES DE LA SOCIÉTÉ D’ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC
Photo fournie par COMMISSION D’ENQUÊTE SUR LA GESTION DE LA MODERNISATION DES SYSTÈMES INFORMATIQUES DE LA SOCIÉTÉ D’ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC
Des millions de dollars de pertes

L’une des pires conséquences a été financière pour l’ensemble des partenaires. Les municipalités ont été durement touchées. Juste à Montréal, il y a eu des pertes de plusieurs millions de dollars annuellement, en raison de plaintes, d’abandons de poursuites judiciaires.

Partout au Québec, les erreurs ont provoqué un engorgement du système judiciaire, menant même à l’abandon de certaines poursuites. Les organisations étaient incapables d’obtenir les divulgations de preuve provenant de la SAAQ.

De plus, en raison d’attestations erronées sur les immatriculations, des citoyens recevaient des avis même s’ils avaient des preuves de paiement.

De nombreux problèmes ont aussi été observés dans le cadre des inspections de véhicules, notamment pour les poids lourds et celles liées à l’immatriculation. Le grand manque de communication de la SAAQ auprès de ses partenaires a été dénoncé.

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Quelques citations marquantes de l’enquêteur Michel Comeau

«La personne qui est arrivée aux douanes avec son VR pour traverser aux États-Unis, elle s’est fait dire par les douaniers américains que son véhicule n’était pas immatriculé. Il y avait deux choix: retourner dans le centre de service et régler ses problèmes, même [si elle] avait tous ses documents, ou payer 200$ US pour être capable d’accéder au territoire américain.»
«Un monsieur de Shawinigan de 70 ans, qui nous a appelés sur la ligne de dénonciation [...]. Son véhicule avait un solde de 70$ d’impayé. La SAAQ ne pouvait pas lui expliquer pourquoi il y avait un solde impayé. Il s’en allait faire une demande pour une hypothèque de maison. Il focussait sur une chose, c’est que son dossier soit complet et qu’il n’ait pas de tache nulle part. Il a payé ce 70$. Il n’a jamais été capable d’avoir la réponse et jamais été capable d’être remboursé.»
«Une amie... Son fils, qui a un véhicule, s’est fait arrêter par les policiers. Ils ont saisi son véhicule. Ils ont donné un constat d’infraction de 456$ parce qu’il devait se soumettre à une inspection de véhicule. Son véhicule, c’est un véhicule qui sort juste l’été. Il n’y avait pas eu de documentations comme quoi il fallait effectivement qu’il le fasse. Présentement, ce cas-là est en cour. J’ai vérifié avec le procureur de la Couronne, et il dit: “On n’est pas capables d’avoir la divulgation de la preuve de la SAAQ. Ça fait plusieurs mois.”»
«Le Centre de renseignements policiers du Québec, à l’époque, c’était comme la Bible. C’était rapide. On faisait une demande sur une place, sur un permis de conduire d’un individu, c’était 0,2 seconde avant d’avoir accès aux informations. C’était immédiat. Maintenant, ça peut prendre jusqu’à 60 secondes avant d’avoir la réponse.»
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