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L'article provient de Le Journal de Montréal
Politique

Fiasco SAAQclic: «comptabilité créative» et «cibles ambitieuses»

Les vérificateurs internes de la SAAQ ont prévu dès 2015 que le projet de transformation numérique de la société d’État risquait des dépassements de coûts et d’échéancier

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Photo portrait de Nicolas Lachance

Nicolas Lachance

2025-05-26T16:38:06Z
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«Comptabilité créative», «cibles ambitieuses» et «pas nécessairement réalistes»: dès 2015, les vérificateurs internes de la SAAQ prévoyaient que le projet de transformation numérique risquait des dépassements de coûts et d’échéancier.

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La direction de la vérification interne de la SAAQ avait prédit l’avenir. Elle a soulevé, dès décembre 2014, les risques de retards et de dépassements de plus de 50% du projet CASA/SAAQclic. Les vérificateurs ont aussi mis en garde la direction que les économies anticipées après la mise en place du système ne seraient pas au rendez-vous.

En 2020, cinq ans avant un constat semblable du Vérificateur général du Québec (VGQ), les vérificateurs internes de la SAAQ avaient évalué à 1G$ le coût total du projet.

«L’histoire va confirmer plusieurs points soulevés dans les notes transmises à la haute direction», a déclaré Daniel Pelletier, ex-directeur de la vérification, lors de son témoignage devant la commission Gallant. Il a précisé qu’au moins la moitié du conseil d’administration (CA) était informée des risques et des problèmes financiers.

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Des problèmes

Dès 2019, les 125M$ prévus pour la première phase avaient été dépensés avant son achèvement. La SAAQ a alors commencé à puiser dans le budget du second volet. 

Le CA en a été informé, et les vérificateurs s’interrogeaient sur le financement des dépassements.

Par exemple, un supplément de 3M$ a été réclamé pour muter des ressources de l’Inde au Québec.

Depuis le lancement de SAAQclic en février 2023, les experts-comptables sont d’ailleurs incapables de confirmer l’exactitude des états financiers et des données générales de la SAAQ.

Toujours en 2019, les vérificateurs ont alerté la direction et le CA sur le manque de réalisme et de faisabilité du projet, recommandant une mise à jour des coûts et du cadre financier.

Selon M. Pelletier, la PDG de la SAAQ Nathalie Tremblay et le directeur du projet Karl Malenfant tentaient de contrôler l’information transmise aux administrateurs. Le vérificateur cherchait constamment une «voie de passage» pour qu’une partie de ses notes atteignent le comité de surveillance sur les technologies. 

Il affirme avoir présenté l’ensemble des problèmes aux membres du CA lors de séances à huis clos.

«On se dirigeait vers de grands montants d’extra», a-t-il déclaré.

À l’époque, le ministre des Transports était François Bonnardel. Interrogé sur QUB radio, il a refusé de commenter le fiasco, affirmant qu’il «ne manque pas d’envie» de dire ce qu’il sait, mais qu’il réserve ses commentaires au commissaire Denis Gallant.

Selon le VGQ, le projet de 638M$ financé en 2017 pourrait finalement coûter 1,1 milliard $. Le projet n’est toujours pas réalisé, et les économies attendues sont nulles.

Informations cachées et enjeux de sécurité

Aussi, les vérificateurs ont eu du mal à confirmer si les cibles du projet seraient atteintes, faute d’accès à l’information détenue par l’équipe de Karl Malenfant. Malgré leur mandat, ils peinaient à obtenir les données nécessaires en temps opportun.

La méthode «agile» imposée par M. Malenfant a également été critiquée: peu de livrables, documentation minimale et risques pour la confidentialité. Les employés notant leurs réflexions sur des tableaux visibles nuisaient à la confidentialité des informations.

De plus, la SAAQ ne détenait pas les habilitations de sécurité requises pour certaines ressources externes ayant accès à des données confidentielles.

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