Feucht a fait paniquer autant que Dieudonné


Guy Fournier
Je n’avais jamais entendu parler de Sean Feucht jusqu’à ce que Valérie Plante et ses semblables paniquent.
Associant les propos anti-2SLGBTQ+, antidiversité et antiféministes de Sean Feucht à des propos haineux interdits par le Code criminel, quelques bien-pensants ont convaincu Parcs Canada et une douzaine d’édiles de l’est du pays, de la mairesse de Montréal, Valérie Plante, à la mairesse de Toronto, Olivia Chow, d’annuler ou de refuser à cet épouvantail trumpiste l’autorisation de donner des concerts publics.
Ce geste de censure a enflammé les réseaux sociaux et sorti les commentateurs de leur torpeur estivale, déclenchant aussitôt la controverse. Du coup, elle a fait connaître à des millions de Canadiens et de Québécois un artiste inconnu jusque-là. L’interdit a attiré quelques centaines de personnes aux concerts que le chanteur a fini par donner dans de petites églises ou des salles paroissiales plutôt que dans les parcs.
Dans un élan de zèle, l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal a même donné un constat d’infraction au responsable du temple évangélique qui a présenté le concert sans autorisation. Il devra acquitter une amende de 2500$!
Étrange coïncidence...
Une tempête dans un verre d’eau qui n’est pas sans rappeler l’annulation des spectacles que l’humoriste (?) Dieudonné devait donner à Montréal, à Québec et à Trois-Rivières en mai 2016. Quelques jours avant son arrivée, Mélanie Joly, alors ministre du Patrimoine, avait déclaré qu’il appartiendrait à l’Agence des services frontaliers de décider si l’humoriste pouvait entrer au pays. Il fut refoulé aux douanes et forcé de reprendre l’avion pour la France.
Étrange coïncidence, vendredi dernier 25 juillet, pendant que Feucht donnait son concert dans l’église du Plateau, les gendarmes interrompaient le spectacle que Dieudonné présentait sans autorisation (lui aussi) dans une petite salle du Pas-de-Calais, en France!
Je ne veux pas faire de comparaison entre Dieudonné qui tient des propos antisémites haineux depuis des lustres, et Feucht qui exprime des opinions provocantes à contre-courant des valeurs ayant cours chez nous. Ses opinions n’ont rien de criminel.
Des principes démocratiques
Les principes mêmes de la démocratie impliquent qu’on doive vivre avec des opinions qu’on ne partage pas comme on vit avec celles que l’on partage. Lorsqu’on censure les opinions avec lesquelles on n’est pas d’accord, on ne fait qu’amplifier le message de ceux qui les prônent.
Comme presque tous les Québécois et les Canadiens, je n’avais jamais entendu parler de Sean Feucht. Maintenant qu’il a fait la nouvelle, que nos commentateurs habituels sont sortis de leur torpeur estivale pour en discuter et que même la mairesse Valérie Plante a déclaré «qu’il va à l’encontre des valeurs d’inclusion et de respect prônées à Montréal», on sait tous maintenant qui est ce Sean Feucht. Il n’en espérait sûrement pas autant!
Les controverses encore plus que son talent ont fait la renommée du Français Dieudonné. Elles feront aussi celle de Feucht (sans grand talent) pour peu que nos autorités continuent de paniquer à la moindre provocation plutôt que prendre leur gaz égal comme on dit.