Face aux droits de douane de Trump, des PME américaines tentent de s'adapter
AFP
Après l'annonce par Donald Trump, au mois d'avril, des droits de douane visant les produits entrant aux États-Unis, l'entrepreneur Ben Knepler a saisi son téléphone pour appeler l'usine cambodgienne fabricant son mobilier de camping avec une demande: « Arrêtez la production. »
À l'époque, le royaume d'Asie du Sud-Est risquait de voir ses produits frappés d'une surtaxe de 49%.
« Ce soir-là, nous avons échangé avec notre fournisseur », se remémore M. Knepler. « Nous n'avions juste pas les moyens d'importer nos propres produits aux États-Unis avec de tels droits de douane », ajoute celui qui pensait éviter ce sort en évitant de faire produire en Chine les chaises de camping de son entreprise True Places, basée en Pennsylvanie.
Durant le premier mandat de Donald Trump (2017-2021), Pékin et Washington s'étaient lancés dans une guerre commerciale, poussant Ben Knepler à délocaliser sa production au Cambodge, ce qui a pris près d'un an.
« Il n'y avait pas (de surtaxe) pour le Cambodge » avant le début du second mandat de M. Trump, retrace-t-il.
Au final, les surtaxes visant les produits cambodgiens s'établissent depuis la semaine dernière à 19%, un coût qui reste significatif pour l'entrepreneur.
Son expérience reflète celle d'une myriade de petites et moyennes entreprises (PME) américaines dessinant leurs produits avant de les fabriquer à l'étranger, qu'il s'agisse de jouets ou de vêtements.
Face aux droits de douane, chacune tente de trouver la bonne réponse, soit en répercutant le coût supplémentaire sur ses clients, soit en cessant d'importer certains produits, croisant les doigts pour qu'un accord commercial leur permette d'être de nouveau profitables.
« Roue de l'infortune »
Selon la communication de la Maison-Blanche, les coûts des droits de douane seront assurés par les autres pays, et ces derniers rapporteront, dès cette année, des dizaines de milliards de dollars à l'État fédéral, une prévision que les entreprises contestent.
« Nous devons payer les surtaxes lorsque le produit entre aux États-Unis », rappelle ainsi M. Knepler, et « avant de le vendre, nous sommes ceux qui payons ».
Déjà lesté d'une dette de centaines de milliers de dollars ayant servi au financement du déménagement de sa production de Chine vers le Cambodge, il s'inquiète désormais pour l'avenir de son entreprise.
Pour lui, le changement rapide de politique s'apparente à une « roue de l'infortune », dont chaque tour ne ferait qu'ajouter des droits de douane.
« Sur les quatre derniers mois, ceux sur les produits cambodgiens sont passés de 0% à 49%, puis 10%, 36% et enfin 19% », rappelle-t-il, « personne ne sait ce qu'il en sera demain ».
L'impact de ces taxes sur les importations continue d'inquiéter les économistes, qui les voient nourrir l'inflation et ralentir la croissance aux États-Unis, avec des effets sur l'emploi.
Selon un calcul de l'OMC et du FMI, actualisé la semaine dernière, les droits de douane appliqués par les États-Unis s'élèvent désormais en moyenne à 20,1%, soit leur plus haut niveau depuis le début des années 1910, hormis quelques semaines de 2025.
Le président américain estime que les chiffres de l'inflation, qui montrent un impact limité pour l'instant sur les prix aux États-Unis, devraient faire taire les critiques. Mais les experts s'attendent à des répercussions étalées dans le temps.
Hausse des prix
Les droits de douane sont difficilement évitables. Barton O'Brien, qui vend des accessoires pour chiens, a emprunté de l'argent et accéléré la production afin de faire un maximum de stocks avant leur entrée en vigueur.
Durant la campagne pour la présidentielle, Donald Trump avait menacé d'appliquer 60% de surtaxe sur les produits chinois, comme ceux fabriqués par l'entreprise de Barton O'Brien.
Cet ancien combattant, vivant dans le Maryland, a dû faire venir un conteneur avec le maximum de produits possible avant que les nouveaux droits de douane ne rentrent en vigueur. « J'en avais même dans la salle de bain », dit-il.
« Impossible », selon lui, de produire aux États-Unis, où le coût serait presque six fois plus élevé que son prix de vente.
Ses produits sont également fabriqués en Inde et au Vietnam, mais les deux pays sont désormais visés par une surtaxe respective de 25% et 20%.
« Si vous regardez mes concurrents, nous fabriquons tous dans les mêmes pays. Nous devrons tous augmenter les prix », conclut Barton O'Brien.