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L'article provient de TVA Sports
Sports

Exode vers la NCAA: le Québec a manqué de vision

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Photo portrait de Jean-Charles Lajoie

Jean-Charles Lajoie

2025-06-03T22:11:20Z
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Lorsque la NCAA a décidé de procéder à une refonte en profondeur de sa réglementation en matière de bourses d’études et autres salaires permis de verser à leurs étudiants-athlètes, c’est à une véritable révolution qu’elle a conviée le sport scolaire nord-américain.

En vertu du nom, de l’image et de la ressemblance (le NIL pour name, image and likeness), nos voisins du sud allaient permettre aux jeunes athlètes de toucher des salaires en échange de leur présence ou plus simplement de l’utilisation de leur image.

Ce changement de cap majeur a eu pour effet de permettre à des footballeurs vedettes d’empocher des millions de dollars pour disputer une saison universitaire. Ce dont on ne s’est pas douté ici chez nous, c’est que cette refonte totale allait avoir des conséquences au niveau de nos trois ligues juniors canadiennes.

Traditionnellement, nos joueurs juniors perdaient leur admissibilité aux universités américaines dès qu’ils passaient 48 heures ou plus et disputaient un match même présaison avec une équipe junior d’ici. Ils étaient alors considérés comme des professionnels, puisque rémunérés, même très faiblement.

Dorénavant, tout joueur qui a disputé une ou plusieurs saisons juniors au Canada peut traverser les douanes et aller encaisser une bourse substantielle en endossant le chandail d’une université américaine.

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Je me suis tout de suite inquiété. Plusieurs ténors du hockey nord-américain ont tôt fait de me rassurer sur tout le bon que cela allait procurer aux équipes juniors canadiennes.

Moins d’un an plus tard, après que les équipes juniors d’ici eurent d’abord annoncé une vague de signatures d’espoirs provenant des ligues juniors A canadiennes où ils étaient cachés avant de transiter vers les collèges américains, voilà que l’effet boomerang commence.

Justin Poirier quittera le Drakkar de Baie-Comeau à destination de l’Université du Maine. Il évoluera donc au temple de Paul Kariya, le plus célèbre porte-couleur des Black Bears.

L’affaire, c’est que Poirier aurait certainement tout cassé à 19 ans l’an prochain dans la «Q». Mais à quel prix? Certainement pas un prix qui aurait pu niveler celui que lui ont consenti les autorités du Maine.

Le grave problème est là. C’est déjà excessivement difficile d’arrimer un budget équitable dans le hockey junior canadien, s’il faut en plus que les équipes donnent dans la surenchère afin de garder leurs meilleurs talents, on peut déjà signer la chronique d’une mort annoncée.

Sur papier, cette révolution tenait la route et promettait que du bon pour tout le monde. Dans les faits, les clubs canadiens, sauf quelques-uns, ne rivaliseront jamais avec les offres des grands collèges du pays de Donald.

Le meilleur espoir québécois pour le prochain encan Caleb Desnoyers jouera où sa saison de 18 ans? Et Justin Carbonneau, lui?

La perspective que le circuit Cecchini s’appauvrisse de Poirier à 19 ans, de Desnoyers et Carbonneau à 18 ans, et ce, d’un seul trait, est plus que réelle.

Les équipes qui vont faire de Desnoyers et Carbonneau des choix de premier tour vont possiblement leur dire que, pour le bien de leur développement, ils devraient descendre un peu au sud... de la frontière.

Et les joueurs vont obtempérer. Si le commissaire de la LHJMQ Mario Cecchini ferme les yeux sur une surenchère au profit des quelques équipes d’ici qui pourrait «accotter» les offres américaines, il va créer une disparité qui va mettre à mort sa ligue. Plus du deux tiers des équipes ne pourront suivre la cadence.

L’envahisseur est désormais parmi nous, la menace est bien réelle et le travail incessant de Serge Savard afin de créer une véritable division universitaire québécoise prend tout son sens avec ce qui se passe actuellement.

Encore une fois, le Québec est mal préparé, a manqué de vision, a refusé de voir l’iceberg juste devant leur Titanic. Notre hockey est malade.

Voilà que les Américains, encore eux, entraînent notre sport national amateur vers les soins palliatifs.

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