Voici Eva, l’entreprise québécoise discrète qui livre plus vite qu’Amazon et qui peut remplacer les Uber Eats et DoorDash de ce monde
La compagnie existe depuis déjà six ans, et sa technologie a été développée au Québec à 100%


Louis-Philippe Messier
À Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Bonne nouvelle: pour se débarrasser des applications téléphoniques américaines qui grugent les marges de nos commerçants, une solution de remplacement locale existe déjà depuis presque six ans et, vu le chantage tarifaire de Donald Trump, elle semble vouée à une croissance fulgurante.
L’application Eva a été lancée par deux jeunes vingtenaires québécois en 2019 initialement sous forme de coopérative pour concurrencer Uber dans le transport de personnes.
Après une «gifle» de l’ex-ministre Pierre Fitzgibbon (dont le bureau a refusé à Eva un investissement de 400 000$ il y a deux ans), l’application a renoncé à tout coup de pouce étatique.
Elle se concentre désormais sur la livraison intra-urbaine de nourriture, comme l’Américaine Uber Eats, et de biens... avec succès.
Presque partout au Québec
L’application est déjà active dans presque toutes les villes de plus de 60 000 habitants au Québec, où elle a accompli quelque 25 000 livraisons en janvier, mais vous ne la voyez pas, à moins d’être un commerçant qui vend en ligne.
«C’est notre philosophie de nous fondre complètement aux sites de vente en ligne de nos clients [les commerçants]: quand tu te fais livrer des fleurs en moins de deux heures ou des produits de la SQDC en moins de 90 minutes, ce sont les chauffeurs Eva qui rendent le service, mais l’acheteur ne le sait pas», m’explique Dardan Isufi, le cofondateur de l’application, qui mise sur la discrétion.

Eva compte déjà quelque 10 000 chauffeurs (ou cyclistes livreurs) inscrits et formés.
«La compagnie est profitable depuis deux ans. Notre technologie est rodée, et elle est à 100% québécoise, alors c’est vraiment aberrant de continuer à lancer notre argent vers des intermédiaires basés aux États-Unis!» s’exclame M. Isufi, que je rencontre à Montréal.
«Notre chiffre d’affaires a plus que doublé au cours de la dernière année!» se réjouit Raphaël Gaudreault, l’autre fondateur, qui travaille à partir de son Saguenay natal.
Livraison
Mercredi, vers 13h, j’embarque avec M. Isufi pour effectuer une livraison.
Une grosse boîte pesante de bouffe mexicaine au parfum alléchant nous attend au Roi Du Taco, au marché Jean-Talon.
Quelqu’un d’une entreprise de Dorval vient de commander une quantité gargantuesque de tacos, de burritos et de quesadillas pour environ 225$.

«Je suis allé sur le site du Roi Du Taco et j’ai été surpris de voir qu’ils pouvaient livrer jusqu’ici», me raconte Ralph, celui qui a passé la commande pour une douzaine de ses collègues de travail.

«Comme nous livrons sans mettre la marque Eva de l’avant, l’acheteur pense qu’il vient de faire affaire directement avec Le Roi Du Taco», me fait remarquer M. Isufi (qui a gagné 41,32$ avec cette longue livraison).

Même si je n’ai pas de voiture, je pourrais m’inscrire à Eva comme livreur à vélo. Ainsi, si je veux m’entraîner, je serai payé pour pédaler.
En choisissant une aire de service plus restreinte, je pourrais peut-être même devenir le premier livreur à la course à pied!