États-Unis/Canada: Stiglitz accuse les milliardaires de la tech de «dicter» leurs politiques

AFP
La rupture des négociations commerciales décidée unilatéralement par les États-Unis avec le Canada est une «agression caractérisée» contre sa souveraineté, dénonce lundi une organisation coprésidée par le prix Nobel d'économie américain, Joseph Stiglitz, qui accuse les milliardaires de la tech de «dicter» leurs politiques.
«Il ne s'agit pas seulement de commerce, il s'agit de savoir si des gouvernements démocratiquement élus peuvent réglementer et taxer de puissantes entreprises, ou si des milliardaires de la tech peuvent dicter des politiques par l'intermédiaire de relais politiques», a dénoncé Joseph Stiglitz dans un communiqué.
Une allusion au président des États-Unis, Donald Trump, qui a mis fin vendredi aux négociations commerciales avec le Canada dans un message lapidaire sur son réseau Truth Social, qualifiant une taxe d'Ottawa sur les géants du numérique de «coup direct et évident» contre les États-Unis.
Cette taxe sur les services numériques (TSN) mise en place l'an dernier vise les géants de la tech qui réalisent un chiffre d'affaires mondial annuel supérieur à 1,1 milliard de dollars canadiens, et engrangent des revenus annuels au Canada supérieurs à 20 millions de dollars canadiens. Sa collecte doit débuter à partir de lundi.
Cette ponction de 3 % sur les revenus tirés de la publicité en ligne, des plateformes de vente, des réseaux sociaux ou de la vente de données personnelles va particulièrement affecter les géants américains de la tech, tels que Google, Apple, Meta (Facebook), Amazon ou Microsoft, accusés de profiter du caractère immatériel de leur activité pour échapper à l'impôt.
Alors que Donald Trump a promis vendredi d'infliger des droits de douane à son voisin dans les «sept jours», la commission indépendante pour la réforme de la fiscalité internationale des sociétés (ICRICT), coprésidée par Joseph Stiglitz, a dénoncé une «agression caractérisée» contre la souveraineté d'Ottawa.
Interrogé par Fox News, Donald Trump a assuré que «les gens ne réalisent pas à quel point il est désagréable de négocier avec le Canada», réitérant sa volonté de voir le pays devenir le 51e État américain.
Pour l'ICRICT, la décision du président américain est une «tentative d'intimidation» et illustre «une escalade préoccupante dans la lutte mondiale entre la gouvernance démocratique et le pouvoir incontrôlé des entreprises».
Il s'agit selon elle d'une «attaque contre le principe même selon lequel les entreprises doivent contribuer équitablement» notamment à «financer les infrastructures et les services publics dont elles bénéficient».
S'affranchir des protocoles diplomatiques «sert un objectif clair: éviter que les riches géants de la technologie paient leur juste part d'impôts au Canada», a encore dénoncé l'organisation de Joseph Stiglitz, fervent défenseur de la réforme de la fiscalité internationale.