État de Palestine: qui reconnaît, ou pas?
AFP
Les pays du continent européen sont désormais une majorité à reconnaître l’État de Palestine avec les déclarations officielles cette semaine à New York de la France, de la Belgique ou de Malte, rejoints samedi par Saint-Marin, après presque deux ans de guerre dans la bande de Gaza.
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Questions-réponses autour des reconnaissances diplomatiques de cet État proclamé par la direction palestinienne en exil en 1988, alors qu’Israël occupe actuellement la Cisjordanie et que la bande de Gaza est largement détruite.
Quels pays reconnaissent ou veulent reconnaître l’État de Palestine?
Près de 80% des pays de l’ONU.
Selon les vérifications de l’AFP, désormais au moins 152 pays sur les 193 membres de l’ONU reconnaissent déjà l’État de Palestine, l’AFP n’ayant pas obtenu de confirmation récente pour trois pays africains.

La précédente liste s’est allongée depuis une semaine avec les reconnaissances dimanche du Royaume-Uni, du Canada, de l’Australie et Portugal, puis de six autres pays européens lundi – France, Belgique, Luxembourg, Malte, Andorre et Monaco –, rejoints samedi par Saint-Marin.
La Russie, les pays arabes, quasiment tous ceux d’Afrique et d’Amérique latine, la grande majorité des pays asiatiques, dont l’Inde et la Chine, sont déjà sur cette liste.
L’Algérie fut le premier pays, le 15 novembre 1988, à reconnaître l’État de Palestine, juste après sa proclamation à Alger par le dirigeant historique de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), Yasser Arafat.
Des dizaines de pays suivront peu après, puis, lors d’une deuxième vague, 20 ans plus tard.
La guerre à Gaza menée par Israël en riposte à l’attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas sur son sol le 7 octobre 2023 a entraîné une nouvelle série de reconnaissances.
Qui ne reconnaît pas?
Au moins 38 pays actuellement: les États-Unis et Israël en premier lieu. Le gouvernement de Benjamin Nétanyahou rejette totalement l’idée d’un État palestinien et, en 2024, le Parlement israélien a voté une résolution contre sa création.
Également des pays alliés de l’un et/ou de l’autre: comme le Japon, la Corée du Sud ou Singapour en Asie, le Cameroun en Afrique, le Panama en Amérique latine, et la plupart des pays d’Océanie.
Le continent européen était jusqu’à présent le plus divisé, pratiquement à moitié-moitié. Jusqu’aux années 2010, les seuls pays reconnaissant l’État de Palestine étaient, outre la Turquie, ceux de l’ancien bloc soviétique. Mais la Hongrie et la République tchèque considèrent aujourd’hui ne pas avoir fait de reconnaissance bilatérale.
Jusqu’au début de la guerre à Gaza, l’Europe de l’Ouest et du Nord était unanime sur la non-reconnaissance, exception faite de la Suède depuis 2014. Mais en 2024, la Norvège, l’Espagne, l’Irlande et la Slovénie ont suivi la voie de Stockholm, puis les pays des derniers jours, la France et le Royaume-Uni en tête. À l’inverse, l’Italie ou l’Allemagne ne l’envisagent pas à ce stade.
Qu’est-ce que la reconnaissance d’un pays?
Une question compliquée en droit international, «un peu à mi-chemin entre le politique et le juridique», selon Romain Le Bœuf, professeur de droit international à l’Université d’Aix-Marseille.
«Les États sont libres du moment et de la forme de la reconnaissance», avec des manières «très variables», explicites ou implicites, explique-t-il à l’AFP.
«On n’a pas de bureau d’enregistrement des reconnaissances. L’Autorité palestinienne met sur sa propre liste tous les actes qu’elle estime être des actes de reconnaissance, mais de manière purement subjective. De la même manière, d’autres États vont dire qu’ils ont reconnu ou pas, mais sans vraiment avoir à se justifier», poursuit-il.
En revanche, «le droit international est assez clair: la reconnaissance ne crée pas l’État, pas plus que l’absence de reconnaissance n’empêche l’État d’exister», poursuit M. Le Bœuf, les éléments d’existence d’un État étant un territoire, une population et un gouvernement indépendants.
Si la portée d’une reconnaissance d’État est «largement symbolique et politique», dans le cas de la Palestine, cela fait quand même trois quarts des pays «qui vous disent que la Palestine réunit les conditions nécessaires» pour être un État, souligne-t-il.
«En termes de symbolisme, cela change en quelque sorte la donne», considérait, mi-août dans le New York Times, l’avocat et professeur de droit franco-britannique Philippe Sands.
«Parce qu’une fois que vous reconnaissez le statut d’État à la Palestine [...], vous placez essentiellement la Palestine et Israël sur un pied d’égalité en termes de leur traitement en vertu du droit international.»