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La solution à la crise du logement se trouve-t-elle à Vienne? Comment Montréal pourrait s’en inspirer

Photomontage Benoit Dussault
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Photo portrait de Sarah-Florence  Benjamin

Sarah-Florence Benjamin

2025-08-27T15:35:04Z
2025-08-27T17:39:18Z
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S’il est élu maire, le chef de Projet Montréal et successeur de Valérie Plante, Luc Rabouin, veut obliger les promoteurs à inclure 20% de logements hors marché dans les projets de 200 portes et plus. À Vienne, en Autriche, pas moins de 60% des locataires vivent dans ce type de logis. C’est aussi une des villes d’Europe où c’est le moins cher de se loger. La question qui se pose, donc: les habitations hors marché sont-elles la (vraie) solution à la crise du logement?

Commençons par le début: c’est quoi, au juste, des logements hors marché ?

Lorsque Luc Rabouin parle de logements hors marché, il fait référence aux logements détenus par des organismes à but non lucratif (OBNL), des coopératives, des sociétés paramunicipales et des fiducies d’utilité sociale. Ça comprend aussi les HLM. Pour le dire simplement: ce sont des logis qui ne sont pas détenus par des propriétaires privés. L’objectif, c’est qu’ils demeurent abordables sur le long terme.

À l’heure actuelle, c’est à peu près 7% du parc immobilier à Montréal qui est considéré comme hors marché.

Dans la capitale autrichienne, les logements «subventionnés» — ou hors marché, si vous préférez — comptent pour plus de 45% du parc immobilier. Et ça fonctionne assez bien: on considère que c’est la grande ville d’Europe où c’est le plus intéressant d’être locataire.

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La recette autrichienne

Si Vienne est aussi abordable, c’est notamment grâce à une «politique d’habitation vieille de 100 ans», explique Julia Posca, sociologue et chercheuse à l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS).

«La clé, c’est le financement et la réglementation qui forcent les OBNL d’habitation à réinvestir leurs profits. Quand on enlève la composante du profit, leur seule mission, c’est d’offrir du logement», résume-t-elle.

Julia Posca
Julia Posca Photo Jean-François Hamelin

Selon Laurent Levesque, président-directeur général d'UTILE, une entreprise d'économie sociale qui développe du logement étudiant abordable, une autre clé du succès autrichien se trouve dans le petit nombre d’OBNL – 182 pour être très précis – qui gère plus d’un million de logements hors marché à l’échelle du pays.

En comparaison, au Québec, 2500 organismes en gèrent 135 000.

Cette concentration à Vienne permet à des organismes compétents de gérer de gros parcs immobiliers et d’offrir de meilleurs services aux locataires, affirme M. Levesque. Ces organismes peuvent aussi utiliser leurs logements existants comme leviers financiers pour en construire de nouveaux, sans dépendre de contributions gouvernementales, poursuit-il.

Dans la ville autrichienne, les OBNL peuvent aussi construire sur les milliers de kilomètres de terrains que possède la Ville. «Ça coûte beaucoup moins cher de faire ça que d’acheter les terrains après le développement. On pourrait s’en inspirer», souligne Laurent Levesque.

Dernier détail: puisque l’offre de logements hors marché est importante à Vienne, les loyers des appartements privés augmentent bien plus lentement qu’à Montréal, précise Julia Posca de l’IRIS.

Pas étonnant, donc, que 80% des ménages y sont locataires.

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• À lire aussi: Rester locataire toute sa vie et s’enrichir, c’est possible: voici comment

Objectif 20%

Laurent Levesque croit qu’une cible de 20% de logements hors marché d’ici 2050 est «adaptée pour une ville comme Montréal». Mais pour y arriver, «ça demande de mettre le pied sur l’accélérateur», dit-il.

Selon lui, les gouvernements devraient faire comme à Vienne et financer les OBNL en logement directement, plutôt que des projets à la pièce. Ce modèle est «plus flexible» et il «permet une meilleure capacité d’emprunt», affirme-t-il.

Laurent Levesque
Laurent Levesque Photo courtoise UTILE

Il considère également que le logement hors marché doit s’étendre à la classe moyenne, sans toutefois abandonner les moins nantis. Il est d’avis que c’est la seule manière de vraiment s’attaquer à la crise du logement (et à la flambée du prix des loyers).

Pour Julia Posca, il faut d'ailleurs voir le logement hors marché comme investissement, pas comme une dépense. «C’est pas juste pour le logement, mais pour la lutte à l’itinérance, les familles et l’urbanisme bien planifié», insiste-t-elle. 

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