Essai: des rues de São Paulo à la présidence

Jacques Lanctôt
• À lire aussi: Isabelle Picard parle des conséquences des rafles des années 60 dans les communautés autochtones dans son nouveau romanFernando Morais, le biographe de Lula da Silva, est un maître de la non-fiction, nous dit Ignacio Ramonet, en préface. « Fernando est un homme de gauche et qui ne met pas son drapeau dans sa poche. Il le prouve, une fois encore, avec cette magistrale biographie de l’un des plus grands leaders progressistes d’Amérique latine et du monde : Luiz Inácio Lula da Silva. » Ces paroles du journaliste catalan, directeur de l’édition espagnole du Monde diplomatique, ont de quoi nous mettre l’eau à la bouche.
Né de parents paysans analphabètes et élevé dans les quartiers miséreux de São Paulo, Lula, l’actuel président du Brésil, a connu des origines fort modestes : vendeur de rue, livreur, enfant travailleur.
Grâce à ses talents d’orateur et d’organisateur, ce métallo fondera la plus puissante organisation syndicale du Brésil, puis le premier parti de gauche, le Parti des travailleurs (PT).
Lula a été élu président du Brésil pendant deux mandats, de 2003 à 2011. Puis pour un troisième mandat en 2023. Pendant ces huit premières années, grâce à ses politiques sociales – éducation, santé, logement, programmes « faim zéro », « bourse-famille », « ma maison-ma vie », etc. –, il a fait sortir de la pauvreté quelque 40 millions de Brésiliens. Au terme de ses huit ans à la présidence du pays, Lula jouissait d’un taux d’approbation record : 87 %.
Règlement de compte
Les plus nantis ne le lui ont jamais pardonné. Le 5 avril 2018, un juge de la cour fédérale ordonne l’arrestation de l’ex-président, dans le cadre de l’affaire Lava Jato, au terme d’une vaste et longue enquête de pots-de-vin impliquant de nombreuses personnalités et qui s’apparente à un règlement de comptes visant à empêcher Lula de se présenter aux élections présidentielles en 2018. À 72 ans, il doit purger une peine de neuf ans de prison pour un crime qu’il n’a pas commis.
Il passera 83 semaines enfermé dans une prison, isolé du reste du monde, dans l’État du Paraná, tandis qu’à l’extérieur, des sympathisants, syndicalistes et militants du PT, camperont pendant 581 jours, « qu’il pleuve ou qu’il vente », formant une véritable vigile jusqu’à la libération de l’ex-président. Pendant sa captivité, le célèbre prisonnier a pu recevoir la visite de cinq chefs d’État étrangers et de deux lauréats du prix Nobel de la paix, ainsi que des personnalités diverses, comme Jean-Luc Mélenchon, Danny Glover et Noam Chomsky.
Pendant les 581 jours de sa détention, Lula a reçu pas moins de 35 000 lettres d’admirateurs anonymes de tous les coins du Brésil, tandis qu’il en a écrit plus de 300 à son attaché politique – Marco, un jeune sociologue que j’ai connu à Paris, pendant mon exil – à qui il donnait des instructions pour aller de l’avant dans son programme politique.
Force de la nature
Rarement a-t-on vu un chef d’État aussi combatif dans le malheur. En prison, on lui annonce la mort de son frère et il s’indigne des conditions qu’on lui fait pour le revoir une dernière fois avant l’enterrement. On lui annonce la mort de son petit-fils et cette fois-ci, il réussit à imposer ses conditions pour assister aux funérailles. Un juge l’autorise à rencontrer des journalistes, depuis sa prison, et il réussit à imposer ses choix.
« Je suis vieux, dit-il à son geôlier. J’ai beaucoup vécu et je n’échangerai pas ma dignité contre ma liberté. Ces gars ne savent pas qui ils ont arrêté, ils ne savent pas ce qu’ils font, mais l’histoire va les condamner. On se souviendra d’eux, oui, mais comme des déchets de l’histoire. »
Lula est une force de la nature. Jamais on ne le verra abattu, démoralisé face aux vents contraires. Sa force d’indignation est immense et les canailles n’ont qu’à bien se tenir. Il faut lire cette biographie, ne serait-ce que pour découvrir qu’il existe encore des politiciens dignes et incorruptibles.
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