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L'article provient de Le Journal de Montréal
Politique

Enquête sur les collèges Dawson et Vanier: la loi sur la laïcité pas respectée

La loi sur la laïcité n’est pas toujours respectée au Collège Dawson et au Collège Vanier, ce qui attise l’animosité dans le contexte du conflit israélo-palestinien

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Photo portrait de Geneviève Lajoie

Geneviève Lajoie

2025-06-27T04:00:00Z
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Salles de prière, congés de cours pour les fêtes religieuses et clubs religieux d’étudiants causant des tensions entre clans: la loi sur la laïcité n’est pas toujours respectée au Collège Dawson et au Collège Vanier, ce qui attise l’animosité dans le contexte du conflit israélo-palestinien.

C’est un des constats dressés par les enquêteurs du ministère de l’Éducation supérieure (MES), qui recommandent un tour de vis en faveur de la neutralité religieuse des institutions publiques sans toutefois blâmer outre mesure les deux établissements d’enseignement pour leur gestion.

Notre Bureau parlementaire a mis la main sur le rapport commandé par la ministre Pascale Déry visant les deux cégeps anglophones dans la foulée de tensions opposant les communautés juive et musulmane sur les campus. Une enquête vivement critiquée par les profs et les directions, qui ont dénoncé une attaque à la liberté académique.

«Le Collège Dawson dispose de deux salles de prière: une pour les étudiants musulmans et une pour les étudiants juifs. Le Collège Vanier dispose d’une salle de prière aménagée pour les étudiants musulmans qui comprend un lavabo pour les ablutions et un rideau séparateur pour que les femmes et les hommes ne prient pas ensemble», soulignent les limiers du MES dans le document d’un peu plus de 70 pages.

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Et cette situation n’est pas exclusive à ces deux institutions. D’autres établissements, comme les cégeps de Sainte-Foy et Garneau, à Québec, aménagent aussi des locaux de prière durant la période du ramadan.

Même si les institutions collégiales ne sont pas visées par la directive interdisant les locaux de prière, les enquêteurs estiment que leur présence peut être vue comme un privilège pouvant faciliter la radicalisation et le prosélytisme.

«Dans le contexte sociopolitique actuel, celle-ci accentue les tensions et rend difficile le vivre-ensemble, peut-on lire. Dans un collège public et dans une société laïque, il faut s’interroger sur la pertinence d’une salle de prière.»

• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission de Mario Dumont, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :

Accommodements religieux

Dawson et Vanier disposent tous deux de procédures permettant d’accommoder les étudiants voulant s’absenter d’un cours en raison d’une fête religieuse, qui ne sont alors pas pénalisés. Plus encore, les profs sont tenus d’éviter les examens lors des fêtes religieuses juives ou musulmanes.

Les enquêteurs recommandent aussi de modifier la loi pour mieux encadrer les clubs étudiants militants et religieux dans les deux cégeps, qui ont provoqué de vives tensions dernièrement entre groupes pro-palestiniens et pro-israéliens.

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La vente de keffiehs, ce foulard à carreaux noir et blanc emblématique de la cause palestinienne, a lieu tous les mercredis au Collège Dawson, illustrent les enquêteurs. À Vanier, une association étudiante palestinienne invite les jeunes à arborer le vêtement et vend des autocollants «Long live the intifada».

Cours de français fourre-tout

Les cours de français offerts dans ces deux établissements anglophones prennent autant de formes qu’il y a d’enseignants pour les donner, ont constaté les enquêteurs.

À Dawson, un des cours offerts dans la langue de Molière s’intitule «Appartenances palestiniennes». Mais en vertu des objectifs pédagogiques actuels peu explicites, c’est tout à fait possible. «Il appartient au MES de revoir l’énoncé de compétence de ce cours et, éventuellement, d’en rehausser les exigences pour un cours de langue au collégial», signalent les auteurs du rapport.

Rappelons que la ministre Déry a été accusée d’ingérence après être intervenue personnellement auprès de la direction au sujet de ce cours. Une analyse a d’ailleurs conclu qu’aucune loi n’avait été enfreinte.

Clans entre profs

La liberté académique n’est pas interprétée de la même façon par tous, ce qui provoque de la tension et la formation de «clans entre les professeurs» au sujet des conférenciers invités sur les campus.

Les enquêteurs soulignent que les collèges ont mis en place les mesures de sécurité appropriées lors des symposiums, mais que les thèmes abordés sont «polarisants» et qu’il y a lieu d’adopter une loi pour encadrer la liberté académique dans le réseau de l’enseignement collégial, comme ce fut le cas à l’université.

Appelée à commenter, la ministre de l’Enseignement supérieur estime que le rapport est préoccupant.

«Il met en lumière une série de défaillances qui ont profondément miné le climat dans les deux collèges, nourri les tensions et fragilisé le vivre-ensemble. Comme gouvernement, nous ne pouvons tolérer que nos campus deviennent le théâtre de divisions», a-t-elle fait valoir dans une déclaration écrite.

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