En réplique à Mathieu Bock-Côté: s’attaquer aux idées, pas aux individus

Amir Khadir, Médecin et ancien député de l’Assemblée nationale du Québec, Alexandre Dumas, Historien et chargé de cours à l’Université du Québec à Trois-Rivières, Et réplique de Mathieu Bock-Côté
L’ancien député de l’Assemblée nationale et co-porte-parole de Québec solidaire Amir Khadir, ainsi que l’historien et chargé de cours à l’UQTR Alexandre Dumas, ont écrit au Journal afin de réagir à une chronique de Mathieu Bock-Côté s’intitulant «Mononc’ Régis nous fait la morale», publiée plus tôt cette semaine dans Le Journal et portant sur les enjeux de laïcité et d’immigration. Celle-ci reprochait à l’ex-maire de Québec Régis Labeaume les propos tenus dans sa propre chronique, celle-ci publiée dans La Presse et ayant pour titre «Non, nous ne haïrons pas les immigrants et les musulmans». Voici ce qu'ils avaient à dire.
Nous avons lu avec un certain amusement le texte de Mathieu Bock-Côté (MBC) qui réagissait violemment à une chronique de Régis Labeaume publiée dans La Presse. Bock-Côté fait toujours de l’urticaire quand on ose critiquer le discours identitaire de certains politiciens. Surtout que nombre d’entre eux semblent s’inspirer de plus en plus de... Mathieu Bock-Côté.
Son texte caricature et extrapole le grand Régis pour rendre sa position indéfendable et méprisante. MBC accuse Labeaume d’«attaques personnelles dégueulasses». Ultime ironie: il réplique en attaquant Labeaume sur son âge, l’accuse de jouer au curé puis suppose, bien entendu, qu’il fait partie d’un complot fédéraliste qu’on ne peut mettre en doute, puisque Régis écrit dans La Presse.
Labeaume le reconnaît: l’immigration «a ajouté une forte pression sur le système». Mais il a l’honnêteté de dire que les gouvernements sont les premiers responsables de la crise du logement et des services publics. Régis constate comme nous l’entrisme religieux. Mais il estime que l’islamisme n’est pas la menace rampante dépeinte par les bonhommes Sept-Heures du nationalisme identitaire. Il se désole qu’on utilise l’immigration et l’islamisme comme épouvantails ou boucs émissaires pour gagner des votes ou faire oublier les échecs de la CAQ. En fait, le texte de Labeaume est incisif, mais nuancé.
MBC le résume en une phrase: «Il [Labeaume] accuse ceux qui veulent raffermir la laïcité et ceux qui critiquent les politiques d’immigration délirantes des dernières années de verser dans le racisme et la haine des immigrants.» Fait à noter: les mots «racisme» et «haine» ne sont pas employés une seule fois dans le texte de Labeaume, pas plus que «xénophobie», «islamophobie», ou un quelconque synonyme. Le terme «intolérance» est employé une seule fois pour désigner le climat étatsunien. Labeaume vise spécifiquement François Legault et Paul St-Pierre Plamondon, mais MBC préfère laisser entendre qu’il attaque toutes les personnes critiquant les politiques d’immigration. Stratégie classique de l’homme de paille. Sachant que la plupart de ses lecteurs n’iront pas lire le texte original dans La Presse, journal honni, MBC a tout le loisir de le parodier.
Pour saper encore davantage la crédibilité de Labeaume, le chroniqueur laisse entendre que le simple fait d’écrire dans La Presse est une forme de militantisme fédéraliste et multiculturaliste. Que doit-on alors conclure des liens entre Bock-Côté et son patron français, le milliardaire Vincent Bolloré, condamné pour corruption en 2021, qui est un expert des poursuites-bâillons contre les médias osant le critiquer et qui a volontiers mis son empire médiatique au service de l’extrême droite lors des élections présidentielles en 2022? Il n’est peut-être pas à l’avantage de MBC d’affirmer qu’un chroniqueur n’est que le porte-voix de son employeur.
Voilà une bonne quinzaine d’années que MBC réclame sur la place publique qu’il soit permis de tenir un débat constructif sur l’identité et l’immigration. Qu’il commence par donner l’exemple en s’attaquant aux idées plutôt qu’aux individus. Diaboliser l’adversaire n’est pas une stratégie qu’on emploie lorsqu’on croit en ses idées.
- Amir Khadir
Médecin et ancien député de l’Assemblée nationale du Québec
-Alexandre Dumas
Historien et chargé de cours à l’Université du Québec à Trois-Rivières
Réponse de Mathieu Bock-Côté
La politesse m’oblige à ne pas répondre à Amir Khadir, c’est un collègue de la Joute, aux convictions extravagantes, presque drôles, mais bon, ce n’est pas d’hier qu’il habite un univers imaginaire. Les meilleurs arguments ne parviendraient pas à le convaincre d’en sortir. Quant à Alexandre Dumas, on me dit qu’il s’épanche sur Facebook, où il sermonne tout le monde. C’est une manière comme une autre de se faire valoir aujourd’hui. Pour le reste, les faits sont têtus, l’immigration massive déstructure profondément la société québécoise, elle exerce une pression sur la fiscalité et les services publics. La critique de l’islam radical, par ailleurs, relève du simple bon sens. Il faut vraiment être un provincial enfermé dans sa chaumière pour imaginer que ce phénomène qui frappe tout le monde occidental ne nous concerne pas. Nos provinciaux répètent «ouverture» devant une idéologie qui veut nous soumettre et nous noyer. Ils me font rire.