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L'article provient de TVA Nouvelles
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En Pennsylvanie, la bataille pour le droit à l’avortement au cœur des élections

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Agence France-Presse

2022-10-18T21:24:03Z
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Infirmière en banlieue de Pittsburgh, en Pennsylvanie, Jen Sloan, 52 ans, a voté républicain toute sa vie. Mais elle choisira les démocrates aux élections américaines de mi-mandat du 8 novembre, pour protéger le droit à l’avortement, un thème qui s’est invité dans la campagne. 

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Pour cette mère divorcée de trois enfants, «tout a changé» fin juin, quand la Cour suprême des États-Unis a dynamité la jurisprudence «Roe v. Wade» de 1972, qui garantissait ce droit fédéral, et renvoyé la question à chaque État.

«C’était comme une gifle en plein visage. Je pensais que c’était quelque chose d’intouchable (...) que ça n’arriverait jamais dans ma vie», raconte-t-elle. Plus question pour elle de voter pour le parti de Donald Trump, qu’elle avait choisi en 2016 et 2020. «Ce n’est simplement pas ce que je suis», assure-t-elle.

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Dans l’État de Pennsylvanie (nord-est), où s’annonce une bataille serrée pour un siège de sénateur clé pour la majorité à la chambre haute à Washington, les démocrates ont identifié l’enjeu et leur campagne prend parfois des allures de référendum pour sauver le droit à l’avortement, dans un contexte de forte inflation qui ne leur est pas favorable

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Comme lors de cette réunion à Doylestown, paisible banlieue au nord de Philadelphie, où l’antenne politique de l’organisation de planification familiale Planned Parenthood leur prête main forte.

«Vital»

«Nos patientes ne viennent pas dans nos centres de santé pour des raisons politiques» ni «pour des raisons religieuses : elles viennent parce qu’elles ont besoin de soins», lance sa vice-présidente Lindsey Mauldin, t-shirt rose de son organisation sous une veste blanche.

«Des patientes arrivent de l’Ohio ou de Virginie-Occidentale», les États voisins qui ont restreint ou interdit l’avortement, ajoute-t-elle auprès de l’AFP. Désormais, «la Pennsylvanie est un État vital pour ce soin dans le nord-est» des Etats-Unis, même si elle compte moins de 20 cliniques qui le prodiguent pour 13 millions d’habitants.

Au milieu des pancartes «Mon corps, mon choix», Angela Jacobs, mère au foyer de 51 ans, raconte que c’est la première fois qu’elle s’engage.

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«J’ai avorté à un peu plus de 20 ans. Pendant des années, j’ai ressenti beaucoup de honte et je n’en ai jamais parlé. Maintenant, j’ai une fille de 20 ans et je veux que ce soit accessible si elle devait en avoir besoin», explique-t-elle. Perdre ce choix, «les femmes ne peuvent pas se le permettre».

«Majorité silencieuse»

Professeure d’histoire à l’université de Pittsburgh, Lara Putnam relève qu’à partir de la décision de la Cour suprême, les démocrates ont gagné plus d’électeurs s’enregistrant sur les listes électorales — et indiquant leur affiliation politique — que les républicains.

«Une rupture nette» qui renverse temporairement une tendance structurelle dans l’État, où les démocrates ont vu leur ancienne base de l’ère industrielle se réduire depuis des décennies, explique-t-elle.

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Suffisant pour faire pencher la balance lors du vote ? Près de Doylestown, devant sa maison en bord de route, Randy Charlins, un électeur républicain de 61 ans, n’y croit guère.

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Pour ce gérant de bar, «Dr Oz», le surnom de Mehmet Oz, médecin vedette de la télé investi par les républicains, «sera élu» contre le démocrate John Fetterman, un autre candidat atypique, ancien maire d’une petite ville qui a souffert de la désindustrialisation, connu pour sa carrure de colosse et ses sweats à capuche.

«C’est très serré. Mais je pense qu’il y a une majorité silencieuse. Il y a beaucoup de conservateurs qui se taisent parce qu’ils ont peur», assure-t-il, sur le porche de sa maison, où s’entassent déjà les guirlandes pour Noël.

En tout cas, pour espérer faire le plein des voix à gauche et au centre dans tout le pays, le président Joe Biden a promis mardi d’inscrire le droit à l’avortement dans la loi fédérale dès janvier en cas de victoire démocrate au Congrès.

Sourdine

Mais pour Randy Charlins, le problème reste l’inflation, ce que confirme un sondage national de Siena College lundi dans le New York Times : 18 % des électeurs en font leur thème prioritaire, contre 5 % pour l’avortement.

«Je vois mes clients, qui venaient peut-être trois fois par semaine (...) maintenant ils ne viennent qu’une fois. L’inflation affecte mon revenu, mais aussi celui de mon patron, ça veut dire qu’il ne peut pas m’augmenter», décrit-il.

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Comme dans le reste du pays, les républicains ont mis en sourdine leurs positions sur l’avortement, conscients que cela pourrait leur coûter des voix.

Leurs clips de campagne mettent surtout l’accent sur la lutte contre la criminalité et l’inflation, en brandissant la menace d’une légalisation de toutes les drogues et d’une explosion de l’insécurité avec John Fetterman.

Les démocrates rappellent eux volontiers que Mehmet Oz et le candidat républicain au poste de gouverneur en Pennsylvanie, Doug Mastriano, ont pris position pour des restrictions ou l’interdiction quasi totale de l’IVG.

La Pennsylvanie avait donné un léger avantage à Donald Trump en 2016, avant de placer Joe Biden de justesse en tête en 2020.

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