Marie Caona Lamitié: Emportée par la COVID-19 avant sa mère centenaire


Nora T. Lamontagne
Une préposée aux bénéficiaires dévouée qui veillait aussi sur sa mère de 106 ans est décédée de la COVID-19 chez elle en mai dernier.
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Marie Caona Lamitié, employée de la ressource intermédiaire privée Place Lacordaire, à Montréal, était d’abord et avant tout une femme de famille.
« Ma mère voulait voir ses petits-enfants grandir, acheter une maison plus familiale pour qu’on soit tous ensemble... », raconte sa fille cadette, Naomi Lamitié.
Quatre générations des siens – y compris sa petite-fille de 10 mois, son mari des 50 dernières années et sa mère centenaire – cohabitaient sous le même toit, dans le quartier montréalais de Rivière-des-Prairies, quand le virus a fait irruption.
Naomi Lamitié tient à rappeler que sa mère a selon toute vraisemblance attrapé la maladie lors d’une éclosion au boulot, et non, comme avaient rapporté certains médias, de son autre fille qui travaille dans le réseau de la santé, mais qui n’a jamais été déclarée positive au virus.
Trop risqué
« Quand ma mère a su qu’elle avait la COVID, elle a dit : “J’arrête de travailler dès que je suis guérie, ça ne vaut pas la peine” », se rappelle Mme Lamitié.
Ce n’était pas une décision qu’elle prenait à la légère, puisqu’elle adorait son travail et que les résidents le lui rendaient bien.
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« Il y en a qui ne voulaient pas prendre leur bain tant que c’était pas ma mère qui le leur donnait », illustre-t-elle.
Mais la peur de contaminer ses proches était tout simplement trop grande.
Même avant de recevoir son diagnostic, Marie Caona Lamitié, 65 ans, enfilait masque et gants pour prendre soin de sa mère, Joséphine Pierre Louis, 106 ans, plusieurs fois par nuit.
Elle cherche sa fille
Aujourd’hui, la matriarche de la famille, que le virus a épargnée, demande encore parfois où est sa fille.
Son gendre subitement devenu veuf, Raymond Louis Lamitié, lui répond doucement : « Marie n’est pas là, elle est partie travailler. »
L’absence de sa femme se fait durement sentir, d’autant qu’il n’a pu la voir une dernière fois après sa mort.
Son état s’est dégradé tellement rapidement qu’il était déjà trop tard à l’arrivée des paramédics.
« Je pensais que c’était moi qui allais partir avant elle », confie à regret l’homme de 70 ans, père de quatre enfants.
Originaire d’Haïti, il est arrivé au pays en 1973, suivi de près par sa conjointe en 1977.
« C’était une femme de cœur, prête à aider tout le monde. Elle ne s’est jamais fatiguée », laisse-t-il tomber, impuissant.