Elles réforment ces petits bums de chats
Le Journal a rendu visite aux pensionnaires du Réseau secours animal à la veille des abandons annuels du 1er juillet


Louis-Philippe Messier
À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Une trentaine de bénévoles d’un refuge pour félins de Montréal s’évertuent depuis quatre ans à faire mentir la chanson de Marjo. Oui, un chat sauvage, ça peut s’apprivoiser.

Un chat jaune vlimeux du nom de Samy essaie presque 10 fois de me griffer pendant que je le flatte. J’ôte la main juste à temps. Encore un brin délinquant, ce matou était invivable il y a quelques mois. Le voilà déjà à moitié réformé. Bientôt, il sera prêt pour l’adoption.
« Nous lui trouverons une famille spéciale capable de pourvoir à ses besoins particuliers », m’explique Lise Côté, la responsable de l’équipe médicale de « l’orphelichat » Réseau secours animal, assise à mes côtés, parmi une quinzaine de rescapés attirés par les friandises.
Ça ronronne et ça miaule. Malgré 103 pensionnaires et un nombre impressionnant de bacs à litière, je ne détecte aucune odeur fâcheuse, signe que les lieux sont impeccablement tenus.
• À lire aussi: J’ai gravi les marches de l’Oratoire pour que le CH remporte la victoire
Un hurlement retentit et interrompt l’entrevue. Un matou furieux en pourchasse un autre, percute divers objets et renverse un bol d’eau. Les bénévoles interviennent.
Mme Côté a la cheville maganée et prend toujours des antibiotiques à la suite d’une attaque subie il y a quelques semaines. Elle a voulu séparer des belligérants comme ceux que je viens de voir. Un des matous lui a planté ses crocs dans la peau.
« Ici, les chats sociables se font vite adopter, alors nos pensionnaires à long terme sont les cas difficiles qui exigent plusieurs mois de socialisation », m’explique-t-elle.
Un volet socialisation

Le Réseau secours animal a placé 351 chats en 2020. Une quarantaine étaient des réformés, comme Samy. Une trentaine de bénévoles se consacrent à ce volet socialisation. Il existe depuis mars 2017, à la suggestion de Laurence Grondin, une spécialiste du comportement animal, consultante avec sa compagnie Féline Good, qui est impliquée ici depuis une décennie.
« On a tort de croire que les chats sont des animaux impossibles à éduquer. À certains égards, ils sont plus faciles à influencer que les chiens », me dit Mme Grondin.
• À lire aussi: Pas de pause durant la pandémie pour les vétérinaires
En les écoutant parler, je peux sentir la fierté de ces femmes (il y a aussi des hommes, mais peu) qui sauvent des dizaines de petits fauves que leur sauvagerie aurait voués à l’euthanasie dans n’importe quelle fourrière ordinaire.
Il n’y a pas de solution miracle. À force d’interaction sereine, de friandises et de jeux à raison de plusieurs séances presque tous les jours, les spécimens les plus rétifs finissent par s’amadouer, parfois assez pour accepter des caresses, puis par en quémander.
« En socialisant avec les chats, je me fais aussi du bien, parce que ça m’oblige à demeurer calme et patiente, à relâcher mon stress », dit Louise, une bénévole.
Signaler les chats rapidement
Comme les places sont limitées, le refuge doit socialiser un maximum de chats difficiles pour ne pas rester pris avec, et ainsi libérer de la place pour d’autres réfugiés.
« C’est très important de nous envoyer les chats abandonnés des déménagements le plus tôt possible et pas seulement à la veille de l’hiver. Plus un chat passe du temps dehors, plus il attrape des maladies et des parasites, et ça veut dire des milliers de dollars en soins vétérinaires supplémentaires pour nous », plaide Mme Côté.