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L'article provient de TVA Sports
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«On ne les repêche pas en bas de 6 pi 2 po»: des équipes fuient encore les petits défenseurs comme la peste

Sébastien Gervais, Armada de Blainville-Boisbriand
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Photo portrait de Nicolas Cloutier

Nicolas Cloutier

2025-02-07T05:00:00Z
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Quand Corey Pronman a classé Lane Hutson 39e dans son palmarès des joueurs de moins de 23 ans de la Ligue nationale de hockey (LNH), sa crédibilité a été mise à mal sur les réseaux sociaux. Son analyse est pourtant le reflet de mentalités et d’opinions qui persistent dans les bureaux du circuit.

Si vous pensez que le succès bœuf de Hutson à son année recrue mènera à un changement de paradigme, vous vous mettez le doigt dans l’œil. Les performances du tonnerre de son frère Cole au Championnat mondial junior n’émeuvent pas plus que ça certaines équipes d’ailleurs.

Si l’on se fie à certaines conversations que l’entraîneur-chef de l’Armada de Blainville-Boisbriand, Mathieu Turcotte, entretient avec les recruteurs de la LNH au sujet de son poulain Xavier Villeneuve, petit défenseur de 5 pi 10 po et trois quarts ultraoffensif qui cumule des statistiques incroyables à un an de son admissibilité au repêchage, les joueurs dans le moule de Hutson n’ont pas fini de se battre pour être considérés.

«Il y a des équipes qui ne le regarderont même pas à cause de sa grandeur, confie Turcotte. Et d’autres qui seront ouvertes à le repêcher.»

Turcotte n’est aucunement amer lorsqu’il expose cette réalité à TVASports.ca. Il témoigne d’un fait indéniable: certaines équipes ont une philosophie à laquelle elles refuseront de déroger, et ce n’est rien de personnel envers les Hutson et Villeneuve de ce monde.

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«Il y a même des équipes qui m’ont dit: “On l’adore, mais on ne repêche pas des défenseurs en bas de 6 pi 2 po, 6 pi 3 po.” Ça n’a rien à voir avec Xavier. Il pourrait faire 100 points en 50 matchs, certaines équipes vont le bouder pareil. Il ne peut rien contrôler.

«Le rapport des recruteurs au sujet du joueur n’a alors aucune incidence.»

Penser aux séries

Vous pouvez vous scandaliser. Vous avez le droit. C’est injuste de vivre dans un monde où un joueur ne peut virtuellement rien faire pour améliorer son sort auprès de certaines équipes.

Vous pouvez croire que ces organisations sont peuplées de dinosaures. N’empêche, il y a une réflexion derrière ces philosophies d’organisation, rigides à tort ou à raison. Vous pouvez y adhérer ou non.

«Certaines équipes jugent qu’un gars comme Quinn Hughes, aussi bon soit-il, va inévitablement casser en séries. Il va casser un peu physiquement à cause de la charge de travail, à cause du poids des matchs aux deux jours», explique l’entraîneur-chef de l’Armada.

Bref, même si Villeneuve présente des statistiques dignes de jeux vidéo l’an prochain, et c’est ce qu’il risque de faire s’il suit cette trajectoire, il pourrait ne pas être repêché au premier tour, comme ce fut le cas pour Lane et Cole Hutson.

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Sébastien Gervais, Armada de Blainville-Boisbriand
Sébastien Gervais, Armada de Blainville-Boisbriand
Voici un sceptique

Jérôme Bérubé fait partie de ces sceptiques qui devront être confondus pour classer Villeneuve dans son top 32. Bérubé supervise la firme indépendante HockeyProspect.com, qui produit chaque année une véritable bible du repêchage que consultent plusieurs équipes de la Ligue nationale de hockey.

«Je peux t’envoyer un fichier Excel, la tendance joue vraiment contre les défenseurs en bas de 6 pi au repêchage. C’est vraiment embêtant la projection avec ces petits défenseurs, justifie Bérubé. Oui, ça fonctionne pour Lane Hutson, mais ça ne veut pas dire qu’ils vont tous devenir des Hutson. Pour chaque Lane Hutson, il y a plein de petits défenseurs pour qui ça n’a pas fonctionné.»

Bérubé constate chez Villeneuve un manque de maturité physique important et certaines lacunes dans la prise de décisions. Deux faiblesses qui empêchent le recruteur de prédire avec confiance que la toupie de l’Armada pourra tenir tête aux attaquants de la LNH.

L’inconnue dans l’équation

N’empêche, on pique sa curiosité lorsqu’on lui mentionne que Villeneuve, emballé par les pronostics de son médecin, a la ferme conviction qu’il dépassera les 6 pi.

«Je lui souhaite, répond-il en rigolant. C’est vrai que depuis sa sélection par l’Armada, il a déjà pris quelques pouces. S’il fait 6 pi l’année de son repêchage, oui, il va probablement sortir au 1er tour. Je vais attendre à l’an prochain pour avoir une meilleure idée.»

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Bérubé est le premier à l’avouer: il avait exprimé des réserves importantes il y a plusieurs années sur la capacité de Hutson de jouer dans la LNH.

«La première fois que je l’avais vu, il avait 16 ans et il jouait au tournoi des moins de 18 ans. Il avait été rappelé durant la COVID-19 à Dallas avec Logan Cooley, Rutger McGroarty et Isaac Howard. Les vrais 17 ans dans l’équipe n’étaient pas bons. Hutson, c’était le meilleur joueur... by far. Mais je le regardais jouer et j’étais comme: “Il n’atteindra jamais la LNH.” Il faisait comme 5 pi 6 po.»

Photo AFP
Photo AFP

Hutson a toutefois continué de grandir pour finalement atteindre les 5 pi 10 po.

«Plus ça allait, plus j’étais comme: “Câline, il a une vraie chance de jouer.” Il n’avait pas le meilleur coup de patin, c’est pourquoi je ne le classais pas au 1er tour en 2022, mais j’évaluais que son intelligence au jeu et son niveau de compétition étaient “élites”.

«Au final, il travaille tellement fort que ça compense un peu pour les lacunes de son coup de patin.»

Les cas comme ceux de Hutson sont rares. Mais c’est le genre de joueur qui force certaines équipes à réfléchir plutôt qu’à les exclure de facto. Parce que ce ne sont pas toutes les formations qui ignorent les Hutson et les Villeneuve de ce monde.

«Je ne suis pas le plus grand fan des petits défenseurs, admet Bérubé. Mais il y a des exceptions de temps en temps.»

On verra si Villeneuve en est une. Si ce n’est pas lui le prochain Hutson, on souhaite la meilleure des chances aux prochains prétendants...

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