10 ans après avoir été défiguré et amputé par l’hélice d’un avion, un ancien pilote n’a qu’un seul rêve: reprendre les commandes d’un Cessna

Dix ans après avoir été grièvement blessé au visage et au cerveau, en plus d'avoir été amputé de quatre doigts par une hélice d’avion en marche, un ancien pilote n’a qu’un seul rêve: reprendre les commandes d’un Cessna.

Quand Samuel Vincent-Couillard parle de l’aviation, ses yeux s’illuminent.

Rencontré à l’aéroport de Québec, quelques jours avant le lancement de son livre intitulé «L’hélice qui a arrêté le temps», le grand gaillard aujourd’hui âgé de 35 ans, admet d’entrée de jeu qu’il n’avait jamais remis le pied dans l’aérogare depuis son accident.

«J’adore ça, je passerais mon temps ici. Le bruit des moteurs, le vent, l’odeur de l’essence» lance-t-il en se rappelant sa vie d’avant.

Le Lévisien en profite aussi pour faire la démonstration de sa nouvelle main bionique, estimée à près de 100 000$, qu’il est allé chercher en Ohio en décembre dernier, grâce à des dons privés. La Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) lui en avait refusé le remboursement. 

Défiguré par l’hélice

Dans son livre, il raconte, par la plume de son ancienne conjointe et amie, Jessica Pouliot, comment sa vie a complètement basculé le 19 septembre 2015, lorsqu’il s’est fait happer de plein fouet par l’hélice de son appareil.

À quelques heures de vol à peine de recevoir sa licence de pilote double moteur, il revenait de Montmagny. «Il faisait super beau, ça ne brassait pas, c’était gros soleil», relate-t-il.

Trou noir

Dans sa mémoire, la journée fatidique s’arrête quelque part sur le chemin du retour, alors qu’il prend place du côté passager. «Je revois l’Île [d’Orléans], le soleil à ma gauche et après plus rien, plus d’image», dit-il.

C’est qu’après que son compatriote eut stationné leur Cessna, il a laissé tourner l’hélice le temps de faire quelques tests.

Sans réellement pouvoir expliquer pourquoi, Samuel est alors sorti de la cabine, avant de passer devant l’avion. «Peut-être que je voulais aller ajuster quelque chose sur l’avion d’en avant, ou juste mettre la barre de traction sur la roue, mais je n’ai aucune idée, ça reste un mystère», raconte-t-il.

C’est son corps et sa tête qui ont arrêté le moteur, souffle-t-il.

Coma

Après avoir passé deux semaines dans le coma, Samuel s’est réveillé gravement amoché. Incapable de parler, il avait perdu une partie de ses sens. « Ton propre nom, tu le cherches et tu ne le trouves pas [...] Je ne reconnaissais même pas mes parents », dit-il.

Il demande même un crayon, pour tenter d’écrire, mais les résultats sont désastreux. «Je n’étais même pas capable de dessiner un rond », ajoute-t-il.

«J’étais certain que j’étais dans un autre pays et que j’avais fait quelque chose de grave, je ne comprenais pas quand on me parlait, c’était comme un rêve», ajoute-t-il.

Réhabilitation

Les mois qui ont suivi ont été « extrêmement difficiles», alors que la frustration de ne pouvoir s’exprimer se mêlait aux longues heures de réadaptation.

Il en ressort avec une surdité à l’oreille gauche, pour laquelle il a un appareil auditif, une vision restreinte, un visage changé, une main amputée et des problèmes d’élocution. Même si le langage demeure à ce jour son plus grand «défi», confie-t-il, l’auteure de ces lignes n’a absolument rien perçu de tel lors de l’entrevue.

• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission de Richard Martineau, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :

«Je dirais que ça a pris une bonne année pour que son cerveau revienne, parce qu’ avant ça, il était là avec nous, mais quand il parlait ça ne faisait pas de sens», raconte Jessica.

Conférences

Aujourd’hui, Samuel livre aussi son histoire à travers des conférences. Son rêve, en donner aux quatre coins du Canada, ou encore aux États-Unis, et s’y rendre à bord de son propre Cessna.

Le livre L’hélice qui a arrêté le temps sera disponible en librairies le 17 septembre.