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L'article provient de Le Journal de Montréal
Éducation

Devoirs au primaire: c’est la qualité qui compte et non la quantité, expliquent des chercheurs

Ils peuvent être utiles, à condition d’être faisables, clairs et motivants

Roch Chouinard, professeur émérite à la Faculté d'éducation de l'Université de Montréal
Roch Chouinard, professeur émérite à la Faculté d'éducation de l'Université de Montréal Pierre-Paul Poulin / Le Journal de Montréal
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Dominique Scali

2025-08-24T04:00:00Z
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Contrairement à la croyance populaire, les travaux donnés à la maison aux jeunes du primaire ne sont pas toujours «inutiles». Mais encore faut-il qu’ils soient de qualité, notent des experts qui nous expliquent ce qu’est un «bon» devoir.

«Je comprends que des parents soient excédés [...] Souvent, les devoirs sont trop difficiles, portent sur des affaires qui n’ont pas été vues en classe, ou bien les directives ne sont pas claires», énumère Roch Chouinard, professeur de psychopédagogie à l’Université de Montréal.

On entend de plus en plus dire que les devoirs donnés aux jeunes du secondaire sont importants, mais qu’ils sont «inutiles» au primaire. Qu’en dit la science?

Tout d’abord, il faut s’intéresser aux «devoirs» au sens large, incluant les leçons, la révision et toute autre forme d’activité exigée à la maison, expliquent les experts interrogés.

Les études montrent qu’au primaire, il y a peu de lien entre le temps consacré aux devoirs et la réussite scolaire. 

Cela ne veut toutefois pas dire qu’ils sont tous «inutiles», bien au contraire, nuancent les chercheurs.

«Ce n’est pas une question de quantité, mais de qualité. Tout est dans la façon dont le devoir a été pensé, expliqué et dans le suivi après», résume Geneviève Carpentier, qui a elle-même enseigné au primaire avant de devenir professeure à l’Université de Montréal.

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Par lui-même

Tout d’abord, les devoirs devraient être faisables par l’élève lui-même.

Si un parent réalise que soir après soir, son enfant est incapable de les faire seul, il est tout à fait correct d’en informer l’enseignant.

Geneviève Carpentier, professeure à la Faculté d'éducation de l'Université de Montréal
Geneviève Carpentier, professeure à la Faculté d'éducation de l'Université de Montréal Courtoisie Amélie Philibert, Bureau des communications de l'UdeM

«Le parent ne devrait pas avoir à se substituer et devenir un mini-enseignant», ni de repasser derrière pour corriger des fautes, explique Mme Carpentier.

Quel devrait être le rôle du parent, alors? Essentiellement, instaurer une routine et encadrer le contexte.

«Dans quel environnement se font les devoirs? Combien de temps? Avec la télévision ouverte ou pas?», illustre-t-elle.

Apporter la maison à l’école

En gros, un devoir devrait permettre à l’élève de faire des liens et de répéter ce qui a été appris à l’école, mais dans un contexte différent. Un peu comme un apprenti skieur qui va s'entraîner dans une montagne différente de celle où il suit ses cours.

Mme Carpentier donne l’exemple des tables de multiplication, qui demandent beaucoup de répétition, mais peuvent être arides. Or, il existe des feuilles avec plusieurs tables à résoudre, mais en forme de serpentin ludique.

«On peut demander à l’élève de se rendre le plus loin possible dans la feuille en 2 minutes. Et quand il a réussi toute la feuille trois soirs de suite, on change de feuille!»

Autre exemple: pour apprendre à mesurer avec une règle, on peut demander à l’élève de choisir cinq objets trouvés chez lui et d’en noter les dimensions, suggère Mme Carpentier.

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Un bon devoir, ce n’est pas juste de rapporter du travail à la maison. «Ça peut aussi être d’apporter la maison à l’école», image Roch Chouinard.

Demander aux élèves de téléphoner à leurs grands-parents afin d’élaborer leur arbre généalogique, ça peut aussi être ça, un devoir, suggère-t-il.

Lecture, lecture, lecture

En fait, s’il y a un devoir à faire à la maison dont les retombées positives sont irréfutables, c’est celui de la lecture.

«La lecture fréquente, quotidienne et dans un contexte plaisant, ça c’est un puissant levier», souligne Mme Carpentier.

C’EST QUOI, UN «BON» DEVOIR?

Faisable:

Il doit être à la portée de l’élève, qui doit être capable de le faire seul, sans l’aide du parent.

Juste assez difficile:

Si on veut que l’élève progresse, le devoir ne doit pas être trop facile non plus. «Ça doit être juste une coche au-dessus de facile. C’est là qu’on a du fun à apprendre», explique Mme Carpentier.

Fréquent:

Il est préférable de donner de petits devoirs fréquents que de longs devoirs. Une durée de 10 ou 20 minutes devrait suffire au primaire, suggère M. Chouinard.

Signifiant:

Le devoir doit être signifiant et motivant pour l’élève de façon à créer un «engagement cognitif». Par exemple, un exercice qui pousse à créer, réfléchir ou généraliser peut être gagnant, explique Mme Carpentier. «Et ce n’est pas obligé d’être immense.» 

Corrigé:

Un devoir bénéfique doit faire l’objet d’un suivi serré. «Sans rétroaction [de l’enseignant], il y a peu d’apprentissages réels qui se font», souligne Mme Carpentier. De plus, l’intervalle entre le moment où le jeune a fait le travail et la rétroaction doit être assez court.

Clair:

Les consignes doivent être claires, rappelle M. Chouinard. «Si le parent lui-même n’est pas capable de le faire, on a un méchant problème.» Aussi, le devoir ne devrait pas servir à pallier un manque de temps pour couvrir la matière qui n’a pas été vue en classe, ajoute-t-il.

Pas une punition:

Les enseignants et les parents ne devraient pas utiliser les devoirs pour punir un élève, mentionne M. Chouinard.

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