Des manifestants encouragent le boycottage d'Amazon
Zoé Arcand
Quelques milliers de manifestants ont défilé dans les rues de Montréal, samedi, donnant de l’ampleur au mouvement de boycottage d’Amazon qui a suivi la fermeture de tous les entrepôts de la multinationale au Québec.
• À lire aussi: Contrats municipaux: la Ville de Montréal veut remplacer 54 entreprises américaines
• À lire aussi: «On va continuer à se battre»: Amazon ferme quatre entrepôts au Québec
• À lire aussi: La Caisse de dépôt refuse de cesser d’investir dans Amazon
«Les multinationales américaines se sentent tout permis et je pense que l’élection de Trump avec l’histoire des tarifs renforce les ambitions impérialistes américaines et le pouvoir qu’ont ces multinationales», a dénoncé Félix Trudeau, le président du Syndicat des travailleuses et travailleurs d’Amazon Laval-CSN.

Appel au boycottage
Ce dernier fait partie des 4700 travailleurs, selon les chiffres de la centrale syndicale, qui se sont retrouvés sans emploi après qu’Amazon a fermé ses entrepôts partout au pays. Du côté syndical, on accuse le géant du commerce électronique d’avoir voulu punir ses employés de s’être syndiqués, une première au Canada.
Amazon, de son côté, nie que la fermeture de ses entrepôts soit liée à cette syndicalisation.
«On veut envoyer un message aux gouvernements municipal, provincial et fédéral de cesser de faire affaire avec Amazon, et à nos institutions publiques aussi», a insisté la présidente de la CSN, Caroline Senneville, les deux pieds dans la neige.

La Ville de Montréal a d’ailleurs annoncé la semaine dernière qu’elle cessait toutes commandes sur la plateforme de Jeff Bezos «jusqu’à nouvel ordre».
Bezos écorché
La grande bordée des derniers jours n’a pas empêché les quelque 2000 manifestants de scander leur colère à l’endroit de l’entreprise américaine et de son propriétaire, qui a été écorché par de nombreux chants, certains plus radicaux que d’autres.

«Bezos, dehors, on va te trouver un coffre de char», ont scandé certains manifestants, rappelant un slogan controversé qu’utilisaient des manifestants lors de la grève étudiante de 2012.
À l’époque, ce chant faisant référence au triste sort qu’a connu Pierre Laporte aux mains du Front de libération du Québec en 1970 était adressé à Jean Charest.

Des familles aussi manifestent
Des familles ont également participé à la manifestation, qui s’est déroulée dans un esprit festif et sans débordement.
«Nous, on n’a jamais utilisé les services d’Amazon, mais autour de moi il y a beaucoup de gens qui ont commencé à boycotter, a assuré Chloé Bouchard, une mère de famille. Se syndiquer c’est un droit et ne pas vouloir respecter ça signifie une incompatibilité avec les valeurs québécoises.»

Le mouvement de boycottage à l’endroit d’Amazon semble surfer sur celui de boycottage des États-Unis qui a pris de l’ampleur après la menace du président d’imposer des tarifs sur des importations canadiennes.
«Trump a été élu en promettant aux travailleurs qu’il allait les aider, mais toutes les décisions qu’il prend vont creuser encore plus des inégalités, a dénoncé Chloé Bouchard. C’est un signal d’alarme.»
Des conditions de travail difficiles
Les employés des entrepôts d’Amazon ont voulu se syndiquer pour avoir un meilleur sort et se sentir respectés par leur employeur, expliquent plusieurs manifestants présents à la manifestation.
«Ce qu’on voulait, c’étaient des conditions de travail décentes», explique Félix Trudeau, portant fièrement sa veste à l’effigie de l’entrepôt d’Amazon DXT-4, qui était situé à Laval.
Pour Denis Letourneux, son collègue de 67 ans, «c’est à cause du salaire» qu’il a choisi de s’embarquer dans le mouvement syndical. Celui-ci commençait à 20$ de l’heure et s’arrêtait à un maximum de 22$ de l’heure après trois ans, selon le président du syndicat.

«Ce n’est pas assez pour payer un logement et l’épicerie, alors que cette compagnie-là génère d’énormes profits», a défendu celui qui a travaillé à l’entrepôt DXT-4 de Laval pendant deux ans.
C’est aussi la nature du travail et les «160 blessures déclarées en 2024», toujours selon M. Trudeau, qui ont poussé les employés à demander de meilleures conditions.
Andy Remarais, 43 ans, qui travaillait à l’entrepôt YUL-5 à Saint-Hubert, a été «un des chanceux» à ne pas se blesser lors de ses deux ans de service, mais il assure avoir vu «beaucoup de gens se blesser au travail, alors qu’Amazon refusait de leur donner des compensations».
Ces travailleurs ont dit ressentir un fort appui de la population, notamment lorsqu’ils distribuent des pamphlets dans le métro.