Procès de Marc-André Grenon: des éléments de la preuve d’ADN remis en doute par la défense
La défense a contre-interrogé jeudi la biologiste judiciaire qui déclarait que l’ADN retrouvé sur Guylaine Potvin était celui de l’accusé


Pierre-Paul Biron
Comme elles l’avaient fait lors du témoignage sur l’autopsie de Guylaine Potvin, les avocates de Marc-André Grenon ont relevé jeudi les limites des analyses d’ADN qui ont mené à l’arrestation de leur client 22 ans après le meurtre de l’étudiante.
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Après avoir expliqué mercredi qu’il était des «centaines de milliards de fois plus probable» que l’ADN suspect retrouvé sur le corps Guylaine Potvin soit celui de Grenon que celui de n’importe qui d’autre, la biologiste judiciaire Caroline Paquet a dû justifier en contre-interrogatoire le travail effectué pour arriver à cette conclusion.
L’avocate de la défense, Me Karine Poliquin, a notamment questionné l’experte sur la possible contamination de pièces ou prélèvements. Plus particulièrement le verre de boisson gazeuse et les deux pailles ayant permis d’identifier Marc-André Grenon après une filature.
La spécialiste a admis qu’un objet récupéré par abandon, comme le verre en question, peut être contaminé au contact d’autres objets dans la poubelle où il a été ramassé. Que ce soit des mouchoirs, des ustensiles ou les masques portés durant la pandémie par exemple.
«Oui, c’est possible», a reconnu Caroline Paquet.

Normes et traçabilité
Le témoin expert a également été questionné sur les normes en vigueur au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale.
Après avoir affirmé en interrogatoire que les normes sur place étaient strictes, Mme Paquet a été forcée d’admettre qu’elle n’était pas à l’emploi du labo en 2000 lors des premiers tests.
«Même si je n’étais pas présente, je sais qu’on a toujours suivi les règles de base en place à l’époque. C’est sûr que les normes actuelles sont différentes, mais il y avait quand même des règles à suivre et elles étaient suivies», a assuré la biologiste.
La défense a aussi soulevé qu’un avis de non-conformité avait été émis en regard de l’une des pièces clés de l’affaire, soit le verre et les pailles mentionnés plus tôt. Caroline Tanguay a expliqué au jury que ce rapport avait été rédigé après qu’une erreur du système informatique de cotation des pièces entreposées au laboratoire a apposé au sac contenant la pièce «P83057» un numéro déjà employé pour une autre pièce dans le présent dossier.

Me Poliquin a ainsi émis l’hypothèse qu’il s’agirait d’un risque quant à la traçabilité de la pièce, mais l’experte a minimisé l’impact de cette erreur informatique.
«L’important, c’est que P83057 est le numéro qui a suivi la pièce tout le long. C’est dans notre système à nous qu’il y a eu une erreur d’entrée», a décrit Mme Paquet, ajoutant que le problème avait été corrigé dans les semaines suivantes.
Impossible de dater l’ADN
La défense a finalement soulevé que même si de l’ADN est retrouvé sur une scène, il est impossible de déterminer depuis quand il s’y trouve et comment il s’y est retrouvé.
Donc, si l’ADN de Marc-André Grenon avait bel et bien été retrouvé sur le corps de Guylaine Potvin et sur des items saisis dans sa chambre, il demeurerait scientifiquement impossible de déterminer la période temporelle et les détails entourant ce «dépôt».

«L’ADN ne se date pas. Il ne dit pas quand il a été déposé, il dit seulement qu’il y a de l’ADN qui a été retrouvé», a convenu la biologiste judiciaire.
Le contre-interrogatoire de Caroline Paquet se terminera vendredi matin. Il doit s’agir, selon le plan présenté initialement, du dernier témoin de la Couronne. Ce sera ensuite au clan Grenon, accusé de meurtre au premier degré et d’agression sexuelle grave, de présenter sa défense.
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