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L'article provient de Bureau d'enquête

Échangeur Turcot: des crédits de vieux dépotoirs

On voit ici l’échangeur Turcot 
en construction en août 2019.
On voit ici l’échangeur Turcot en construction en août 2019. Photo Agence QMI, Mario Beauregard
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Dominique Cambron-Goulet

2022-02-23T05:00:00Z
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Le quart des crédits utilisés pour rendre Turcot « carboneutre » vient d’un programme gouvernemental qui devait permettre de réduire les GES, mais qui n’a pas rempli ses promesses.

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Le consortium KPH-Turcot a acheté pour 31 502 tonnes de CO2 en crédits carbone en 2018 à la firme d’ingénierie WSP, elle-même membre du consortium. 

Ces crédits viennent du Programme Biogaz du gouvernement du Québec, qui s’est tenu entre 2009 et 2013. Ils ont été produits en brûlant le méthane de vieux dépotoirs pour éviter qu’il se retrouve dans l’atmosphère.

Pourtant, ce programme devait nous permettre de réduire notre pollution et non pas de compenser des émissions futures.

« Concrètement, il ne s’est rien passé de nouveau. [Ces réductions de GES] étaient déjà acquises dans le cadre du Programme Biogaz », critique le président de Coop Carbone et ancien économiste au ministère de l’Environnement, Jean Nolet.

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Programme raté

Lancé en 2007 par le gouvernement Charest, le Programme Biogaz devait éviter 3,7 millions de tonnes de GES, soit 25 % de toutes les réductions du Québec liées au Protocole de Kyoto.

« C’est l’un des éléments-clés de notre Plan d’action de lutte contre les changements climatiques », avait affirmé la ministre de l’Environnement de l’époque, Line Beauchamp.

Québec a acheté des crédits carbone — jusqu’à 25,50 $ la tonne — aux entreprises qui brûlaient le méthane. 

Si les villes propriétaires des dépotoirs et les firmes d’ingénierie ont pu faire des profits, le programme n’a pas eu les résultats environnementaux escomptés. Seules 650 000 tonnes d’émissions ont été évitées.

Bien qu’il n’ait pas atteint son objectif ni dépensé tout le budget, le ministère a laissé aux entreprises qui avaient eu les contrats un peu plus de 32 000 tonnes en crédits carbone. 

La firme d’ingénierie WSP a ainsi hérité de crédits qu’elle a ensuite pu revendre à KPH-Turcot cinq ans plus tard.

Quatre « Turcot » en banque

Québec a en poche 627 094 tonnes équivalent CO2 en crédits carbone, issus du programme Biogaz, soit l’équivalent de quatre fois les émissions du chantier Turcot.

Le ministère de l’Environnement assure qu’ils « n’ont jamais été destinés à la revente ». Toutefois, il n’a pas retiré ses crédits de la circulation.

Ceux-ci pourraient donc être vendus ou utilisés pour rendre un projet gouvernemental carboneutre à tout moment.

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