«André n’a eu aucune chance»: ce patron d’une PME de transport n’aurait jamais pensé envoyer son ami camionneur à la morgue
Un chauffeur d’expérience meurt dans une violente collision sur la tristement célèbre route 11 en Ontario
Francis Halin et Denis Therriault
Des milliers de «camionneurs au rabais», dont plusieurs sont originaires d’Asie du Sud-Est, sillonnent nos routes au volant de poids lourds. Souvent mal payés, peu formés et au volant de camions laissant parfois à désirer, ils posent un risque pour la sécurité routière, dénoncent des responsables de l’industrie.
PIERREVILLE, Québec | Le patron d’une PME de transport du Centre-du-Québec n’aurait jamais pu penser qu’il retrouverait son chauffeur et ami à la morgue en l’envoyant faire une livraison qui passe par le nord de l’Ontario.
André Luneau, 57 ans
Décédé rur la route 11 en Ontario, 17 janvier 2025

«André n’a eu aucune chance. Le camion a été complètement déchiqueté côté conducteur», rapporte Christian Forcier, président de TCF Express, à Pierreville, spécialisé dans le transport de machinerie lourde.
Cette collision est survenue sur le chemin dangereux baptisé par des camionneurs la route de la mort, qui a même sa page Facebook: «La route 11/17 tue des gens».

Le camionneur André Luneau ne se séparait jamais de son chien, qui était toujours à ses côtés dans son véhicule.
Aujourd’hui, M. Forcier a adopté l’animal, qui a survécu à l’accident fatal de son maître.

Après le décès d’André Luneau, que l’on surnommait Minoune, un camionneur de l'entreprise de Christian Forcier a remis sa démission en disant qu’il ne voulait pas aller «se faire tuer en Ontario la nuit».
«Le transport est rendu malade»
D’après Christian Forcier, le problème dépasse désormais certaines routes dangereuses et vient du manque d’expérience des chauffeurs.
«Le transport est rendu malade», lance-t-il d’une voix forte, près d’un de ses employés qui répare un camion dans un immense garage écho.
Il pointe du doigt le fait que les cours pour manœuvrer un camion semi-remorque ne sont toujours pas exigés.
«C’est le pire fléau, que la formation ne soit pas obligatoire. C’est ça, le plus grand des problèmes», dénonce-t-il.
À ses côtés, son fils qui prend la relève de la PME familiale, n’en peut plus lui non plus de l’amateurisme des chauffeurs de camion qui sont devenus de véritables dangers sur roues, selon lui.
«Un de nos chauffeurs s’est fait demander de reculer un camion parce que le conducteur n’était pas capable», peste Michael Forcier.

Il s'étonne de voir que certains camionneurs prennent le métier à la légère au point où ils ne regardent carrément plus la route une fois sur les grands axes routiers.
«Tu les vois aller tout croche. Il y en a, des fois, avec les deux pieds sur le dash. Ils écoutent un film», soupire-t-il.