Des agriculteurs s’inquiètent de «l’affaire Mario Pelchat»: «Quand les gens viennent visiter Mario, tout le monde autour en profite»
La décision de la CPTAQ d’interdire les spectacles au vignoble du chanteur fait craindre à certains producteurs un durcissement des règles entourant l’agrotourisme culturel au Québec

Raphaël Gendron-Martin
Les exploitants agricoles qui présentent des spectacles sur leur propriété sont inquiets. Ils craignent que la décision de la CPTAQ qui interdit à Mario Pelchat de présenter des spectacles à son vignoble ait des répercussions sur leurs activités d’agrotourisme.
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Dans son communiqué envoyé mardi matin, Mario Pelchat écrivait: «Autour de moi et partout au Québec, dans d’autres vignobles, vergers, microbrasseries et fermes, des spectacles continueront d’avoir lieu cet été, sans qu’ils soient inquiétés. Ce deux poids, deux mesures me blesse profondément.»
Après avoir parcouru la liste des vignobles, vergers et fermes au Québec, on a effectivement trouvé quelques établissements qui affichent des spectacles sur leur site. Mais la majorité d’entre eux offrent plutôt des spectacles gratuits extérieurs dans des installations rudimentaires. On est loin des 45 dégustations-spectacles à 150$ comme le propose Pelchat à son vignoble.
Il y a par exemple le Vignoble La Manse, dans les Cantons-de-l’Est. Chaque jeudi, de 17h à 20h, des chansonniers viennent gratuitement divertir les clients à l’extérieur. «C’est principalement pour de l’agrotourisme, mentionne l’un des propriétaires, Pascal Plante. C’est nous qui les payons.»


Même si la décision de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) au sujet du Domaine Pelchat Lemaître-Auger ne changera pas ses plans pour les spectacles, le vigneron affirme en avoir déjà subi les contrecoups. «J’ai eu une discussion avec la MRC de notre coin. On fait un pavillon extérieur en cas de pluie pour nos clients, qui viennent tout l’été, et ils ont eu de la misère à nous donner un permis justement à cause de l’histoire de Mario Pelchat.»
«Ce n’était pas tellement rentable»
Un autre vignoble des Laurentides, qui a requis l’anonymat, avait présenté l’an dernier six soupers-spectacles avec des artistes de renom. Cet été, le calendrier restera vide. Et c’est en partie en raison de ce qui est arrivé à Mario Pelchat, reconnaît le propriétaire.
«Mais c’était aussi parce que ce n’était pas tellement rentable mon affaire l’année passée, dit-il. Je n’ai pas un setup comme Mario, je n’ai pas une place fermée. Nous avons juste un chapiteau.»
Selon le rapport de la Commission de protection du territoire agricole du Québec, le bâtiment qu’a fait construire Mario Pelchat au Domaine Pelchat Lemaître-Auger comprend une salle de spectacle fermée de 250 places. De telles installations sont rares dans le réseau agrotouristique québécois.
Empathique aux problèmes de Mario Pelchat («ce n’est vraiment pas le fun pour lui»), l’agriculteur espère que «les vieilles lois qui sont là depuis des années, où l’on ne parlait jamais d’agrotourisme», changent.
• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission de Sophie Durocher, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
«Quand les gens viennent visiter Mario, tout le monde en profite localement autour, tout le monde se fait connaître. On fait connaître de belles régions que les gens n’auraient peut-être pas connues autrement. C’est ça que je trouve déplorable.»
«Je suis pour la protection du territoire agricole. J’ai des pommiers, j’ai des vignes. Je ne suis pas riche avec ça. Si je peux me faire un petit sideline, si je peux louer quelque chose et faire un peu plus de revenus, c’est sûr qu’on ne crache jamais là-dessus.»
«Nos activités respectent les critères de la CPTAQ»
Un autre établissement des Cantons-de-l’Est, qui a aussi préféré conserver l’anonymat, prévoit de son côté de présenter quelques petits spectacles payants cet été. «De notre compréhension, nos activités respectent les critères établis par la CPTAQ. Nous nous limitons à 50 personnes par réception, nous n’avons aucune installation permanente (ce sont même les invités qui amènent leur chaise), nous servons de l’alcool à 100% produit par nous et le menu met en valeur nos cultures et élevages de la ferme. [...] Nous allons tout de même faire des démarches afin de nous assurer de demeurer conformes.»