Des agents de bord nous dévoilent les pires choses qu’ils ont vécues dans un avion


Gabriel Ouimet
«Pour nous, le problème numéro un, c’est le comportement des passagers problématiques»: des agents de bord nous révèlent les pires choses qu’ils ont vécues dans un avion, mais aussi ce qui pourrait arriver à ceux qui dépassent les bornes en plein vol.
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Antoine et Amélie (prénoms fictifs) cumulent près de 30 ans d’expérience comme agent et agente de bord au sein de différentes compagnies. Aujourd’hui, plus rien ne les étonne. Mais Antoine ne se doutait pas de ce qui l’attendait quand il a commencé à travailler pour Sunwing, en 2007.
«Je n’avais jamais imaginé à quel point les choses peuvent déraper dans un avion. Il n’y a rien que je n’ai pas vu. Ça m’a donné toute une claque dans la face au début», indique l’homme de 43 ans.
À l’époque, Sunwing était déjà réputée pour faire du «beau, bon pas cher» et offrait à ses clients un maximum de gratuité lors des vols.
«Il y avait du champagne et des repas gratuits, beaucoup d’alcool, etc. C’étaient souvent des passagers qui n’avaient jamais pris l’avion de leur vie. Ils se croyaient tout permis et s’attendaient à un service 5 étoiles sur tous les vols, même quand ils avaient payé un forfait tout inclus à 800$», se souvient-il.
Voici donc les pires choses vécues par Antoine et Amélie en presque trois décennies de service.
«J’vais te prendre ton jus de...»
Un jour, alors qu'il faisait le service de boissons avec une collègue sur un vol vers l’Amérique du Sud, Antoine a entendu quelque chose de tellement vulgaire qu’il peine encore à y croire. Sa collègue venait de demander à un membre d’un groupe de «douchebags» ce qu’il désirait boire.
«Je vais prendre ton jus de plo**e», lui a répondu le passager.
«Je capotais, je me disais que c’était impossible. Quand j’ai regardé ma collègue, j’ai su que j’avais bien compris: elle était sous le choc, la bouche ouverte», détaille Antoine.
Lui et sa collègue ont alors demandé au voyageur de répéter ce qu’il venait de dire, mais l’homme s’est abstenu.
«Il voyait bien qu’on ne riait vraiment pas», raconte l’agent de bord, précisant que les amis du passager en question semblaient, eux, trouver la situation très drôle.
Bien que ces situations soient de plus en plus rares, l’image sexiste «d’hôtesse de l’air» donne encore lieu à des scènes dégradantes dans les avions, regrette Antoine.
Quand l’infidélité fait des dégâts
Un couple composé d’un homme et d’une femme venait de prendre place à bord de l’avion, après avoir passé une semaine dans un complexe tout inclus des Caraïbes. Rapidement, Antoine et ses collègues se sont aperçus que quelque chose clochait.
«Visiblement, ils n’avaient pas eu le meilleur des voyages ensemble. Ils étaient assis un à côté de l’autre, mais l’ambiance était vraiment mauvaise. On pouvait sentir la lourdeur», dit-il.
Le personnel ne s’en est pas inquiété outre mesure. Mais quelques minutes plus tard, la situation a complètement dégénéré.
«La bataille a éclaté. Ça s’est frappé solide. Ça criait. C’était fou ben raide», s’exclame-t-il au bout du fil.
L’homme du couple en était venu aux coups avec un groupe d’amis. Le personnel et les autres passagers ont vite compris ce qui venait de mettre le feu aux poudres.
«Les amis d’un gars étaient fiers de crier dans l’avion que leur ami avait baisé avec la fille [du couple]. Ils criaient à son chum [l’homme du couple] qu’il était cocu», relate l’ancien employé de Sunwing.
Dans de telles situations, ce sont les agents de bord qui doivent intervenir. Après avoir réussi à séparer les pugilistes, le personnel les a isolés aux extrémités opposées de l’avion.
S’envoyer en l’air en plein vol
Parfois, l’espace restreint et le manque d’intimité caractéristiques des classes économiques ne suffisent pas à freiner les pulsions de certains passagers. À trois reprises au cours de sa carrière, Amélie a dû intervenir auprès d’amants qui ont cédé à leurs désirs sexuels en plein vol.
«La dernière fois, c’était pendant un vol de nuit. C’était un gars et une fille. Ils avaient mis une couverture sur eux pour se cacher, mais les autres passagers pouvaient quand même les voir et les entendre», dit-elle.
C’est à elle qu’est revenue la responsabilité de ramener les tourtereaux à l’ordre. «C’était super malaisant», dit-elle.
Une bataille pas comme les autres
Un groupe d’adolescents, un cabaret de nourriture et un agent de bord occupé. Voici les trois ingrédients qui ont mené à une des situations les plus inusitées vécues par Antoine lors d’un vol: une bataille de nourriture.
«Un jeune a pris un pain, il l’a lancé à son ami, qui a ensuite pris un autre pain sur le cabaret pour riposter. Les autres se sont rapidement mis de la partie. Il y avait des pains qui revolaient de partout», dit-il.
Des conséquences potentiellement graves
Les fautes commises en vol peuvent avoir des conséquences graves pour les personnes impliquées.
Dans les cas où la loi est enfreinte, surtout lors d’incidents violents, les passagers doivent faire face à la justice à leur retour au Canada. Si l’incident se produit lors d’un vol en direction d’un pays étranger, le perturbateur sera attendu de pied ferme par la police locale une fois que l’avion se sera posé. Antoine estime que cela devrait suffire à calmer les esprits.
«Parfois, tu ne pourras simplement pas entrer dans le pays. Il y a des destinations, comme Cuba ou encore le Mexique, où les policiers ne niaisent vraiment pas avec la puck. Ils sont tough. Ils peuvent très bien décider de t’enfermer et de te détenir dans l’espoir de te soutirer de l’argent. Ils peuvent faire ce qu’ils veulent avec toi», martèle-t-il.
Les cas de violence verbale, d’indécence ou de consommation de produits interdits – par exemple, l’utilisation du vapoteuse – peuvent quant à eux valoir des contraventions salées, en plus de mener à la distribution d’un carton d’avertissement par les agents de bord.
«C'est un avertissement officiel et c’est grave. C’est clairement écrit dessus que tu seras arrêté en cas de récidive», explique Antoine.
Le passager pourrait également être ajouté à la liste de noire de la compagnie aérienne.
«Ça peut faire en sorte que tu ne puisses plus jamais voler avec cette compagnie, ou que tu sois banni pour un certain temps. C’est différent de compagnie en compagnie», indique-t-il.