De Gatineau à la scène mondiale de lutte
Evil Uno, un lutteur de Gatineau, fait partie du circuit américain


Dave Lévesque
Pendant une éternité, il y a eu la WWF ou WWE que rien n’ébranlait, sauf la WCW pendant un temps à la fin du siècle dernier. L’All Elite Wrestling (AEW) aimerait bien déranger le géant.
L’AEW a été créée en 2019 par Shahid Khan, le propriétaire des Jaguars de Jacksonville de la NFL. Et la promotion fait un premier arrêt à Montréal avec deux spectacles au Centre Bell, mardi et mercredi.
Cette promotion a permis à un Québécois bien connu de la scène indépendante, Evil Uno, de vivre de son art.
Nicolas Dansereau, de son vrai nom, est originaire de Gatineau, et il fait carrière au sein du Dark Order, un groupe de lutteurs qu’il a originalement fondé avec un autre lutteur québécois, Marc Dionne de Victoriaville, alias Stu Grayson.

Tombé dedans jeune
À l’image d’Obélix, on peut dire de Dansereau qu’il est tombé dans la lutte quand il était petit.
«Depuis l’âge de 14 ans que je suis dans le monde de la lutte, confirme-t-il lors d’une visioconférence. J’ai toujours été un fan quand j’étais enfant. Un ami a trouvé une école de lutte dans la région et à l’âge de 16 ans, j’ai commencé à faire des spectacles comme Player Uno.
«J’ai été très chanceux, j’étais un peu en avance sur l’Internet, alors j’ai mis mes vidéos en ligne. Ce n’était pas rare, mais ce n’était pas fréquent pour les lutteurs indépendants et ça m’a ouvert beaucoup de portes.»
Il a ensuite eu la chance de lutter un peu partout, que ce soit au Canada, aux États-Unis et même en Europe. Mais il devait tout de même travailler, lui qui a été à l’emploi du gouvernement du Canada jusqu’à ses débuts dans l’AEW, en 2019. Dansereau est aussi copropriétaire d'une école de lutte dans la région de Gatineau.
«J’ai été très chanceux, pendant des années, ça semblait impossible pour un Québécois d’aller aux États-Unis et d’en vivre. Si ce n’était pas [du] début d’AEW, je ne sais pas si je ferais de la lutte et si j’en vivrais», explique celui qui continue d'habiter à Gatineau malgré sa nouvelle vie.
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Différent
Pas facile de se faire une place dans le monde de la lutte quand la WWE prend toute la place. Mais l’AEW veut miser sur sa proposition différente pour se distinguer.
«On est au même niveau qu’eux, insiste Dansereau. Mais on offre un produit qui est différent du leur. Avec nous, tu peux voir quelqu’un qui explose dans les circuits indépendants, c’est la même chose pour la lutte japonaise ou mexicaine.
On donne un aperçu mondial de la lutte, et non seulement une forme de lutte déterminée par les dirigeants d’un circuit. Ça fait un mélange de styles qui donne plus de variété.»
De cette façon, les lutteurs ont plus de latitude dans ce qu’ils font en dehors de la promotion. Nicolas Dansereau en profite pour redonner à la lutte indépendante qui lui a donné sa première chance, il y a une vingtaine d’années.
«Je trouve ma place avec Internet qui me donne beaucoup d’options pour m’exprimer sur YouTube et Twitch. À la télé, on me voit peut-être aux trois ou quatre semaines. AEW nous donne des opportunités ailleurs, je peux aller sur d’autres circuits. Par exemple, j’ai récemment lutté à Montréal, aux Foufounes électriques.»

Anonymat
Dans la peau d’Evil Uno, le lutteur de 36 ans porte un masque qu’il portait d’ailleurs lors de notre visioconférence. On le croiserait à l’épicerie sans pouvoir le reconnaître même si on a passé plus de 30 minutes à discuter avec lui.
«Quand j’avais 14 ans, on m’a dit que c’était mieux de cacher mon visage, pour dissimuler mon âge», explique-t-il.
Il avait l’intention de retirer son masque un de ces jours, mais son personnage devenait connu et en même temps, il a commencé à voir les avantages de l’anonymat.
«C’est un travail, et quand j’enlève mon masque, plus personne ne sait qui je suis. Ça me permet de trouver un équilibre dans ma vie et d’isoler ma famille de ma personnalité publique. Et il y a la magie que je ne veux pas briser, un peu comme c’est arrivé quand Ray Mysterio a enlevé son masque dans la WCW.»
Et comme son personnage est inspiré des jeux vidéo, on lui fait remarquer qu’avec ses vestons colorés, il a un peu l’air du Joker dans Batman.
«J’ai tout le temps été un fan des luchadors qui portaient des costumes trois-pièces et j’ai tout le temps cru que c’était un look très intéressant.
«Si je porte un t-shirt et des jeans, ce n’est pas imposant. Avec le veston et le masque, ça crée de l’intérêt et ça me permet de me démarquer. Je suis un méchant et si j’ai l’air d’un méchant de Batman, j’ai fait ma job.»