Publicité
L'article provient de Le Journal de Montréal

D’avocate brillante au Luxembourg à artisane boulangère à Québec

À bout de la pression imposée par son métier, une trentenaire a effectué un virage professionnel à 180 degrés et s’est établie dans le quartier Saint-Sauveur à Québec

Virginie Roger-Schroeder mélangeant la pâte du Marquis Multigrains (farine de blé ancien Grand Cru Marquis du Moulin de la Rémy, eau filtrée, levain de seigle biologique foncé, sel Saint Laurent, graines de lin et graines de millet biologiques torréfiés)
Virginie Roger-Schroeder mélangeant la pâte du Marquis Multigrains (farine de blé ancien Grand Cru Marquis du Moulin de la Rémy, eau filtrée, levain de seigle biologique foncé, sel Saint Laurent, graines de lin et graines de millet biologiques torréfiés) Fournie par Virginie Roger-Schroeder
Partager
Photo portrait de Martin Lavoie

Martin Lavoie

2025-06-29T04:00:00Z
Partager

À bout de la pression imposée par son métier d’avocate au Luxembourg, une trentenaire a effectué un virage professionnel à 180 degrés et s’est établie dans le quartier Saint-Sauveur, à Québec, pour fonder Grignette micro-fournil, où elle fait du pain au levain à la main.

Virginie Roger-Schroeder pratiquait en droit du travail, sécurité sociale et immigration. Elle est venue à Montréal en 2016 lors d’un concours de la francophonie.

«J’ai aimé et j’ai pensé à venir m’établir ici. Mais j’ai été promue senior et ma carrière s’est accélérée», explique la femme de 39 ans.

«Je faisais des conférences, des formations et de la rédaction, ce qui n’est pas facturable, et il fallait en plus ramener des clients. Ça devenait de moins en moins plaisant. La santé n’allait plus», rappelle celle qui a dû prendre congé pour épuisement professionnel.

Virginie Roger-Schroeder lors de son serment comme avocate au Barreau de Paris devant la Cour d’appel de Paris, en janvier 2014.
Virginie Roger-Schroeder lors de son serment comme avocate au Barreau de Paris devant la Cour d’appel de Paris, en janvier 2014. Fournie par Virginie Roger-Schroeder

Durant sa convalescence, elle a décidé d’abandonner le droit.

Changement de cap

«J’ai commencé à faire du pain à la maison et j’ai adoré. Mais au Luxembourg, il n’y a pas de formation pour les adultes. Je devais reprendre au début comme un élève de 16 ans, avec les mathématiques et le français», dit-elle.

Publicité

Son mari, Sébastien Schroeder, qui avait étudié à l’Université Laval, avait aussi une carrière florissante dans la finance avant de traverser les mêmes écueils que son épouse. C’est finalement en cuisinier qu’il s’est recyclé.

Le couple a pris la décision de venir s’établir à Québec, où il est arrivé en janvier 2023, abandonnant une grande carrière et une belle maison.

«On ne voyait pas la belle maison ni les revenus. On voyait ça comme un poids, il fallait travailler sans arrêt», analyse-t-elle.

Virginie Roger-Schroeder livrant des pains appelés Marquis Nature au restaurant la Tanière3 dans le Vieux-Québec.
Virginie Roger-Schroeder livrant des pains appelés Marquis Nature au restaurant la Tanière3 dans le Vieux-Québec. Fournie par Virginie Roger-Schroeder

Mme Roger-Schroeder a complété un DEP en boulangerie à l’École hôtelière de la Capitale au printemps 2024, tout juste au moment de créer Grignette micro-fournil.

100% québécois

«Je ne voulais pas arriver au Québec en important un prétendu savoir-faire [après m’être] formée en France ou en Belgique», assure-t-elle.

C’est dans sa maison que l’ex-avocate façonne ses pains, qui prennent 36 heures à préparer. Elle n’a pas de boutique, préférant la livraison à domicile ou les dépôts dans certains cafés. Le restaurant La Tannière3 compte aussi parmi ses clients.

«Je ne vends que sur commande. Pour moi, c’est inconcevable d’avoir des invendus et de faire du gaspillage. C’est 100% québécois, il est hors de question d’importer des farines ou de mettre des olives. On a tout ce qu’il faut ici. J’utilise du blé ancien qui n’a jamais été transformé. C’est un produit de niche. Avoir des produits d’ici, ça augmente le prix», prévient-elle.

Publicité

Dès ses débuts, ses créations ont été prisées.

Virginie Roger-Schroeder mélangeant une pâte à crackers (faite avec du surplus du levain auquel du beurre noisette est ajouté) assaisonnés avec de la poudre d’épinette maison et de cheddar râpé de lait Jersey de la ferme Phylum.
Virginie Roger-Schroeder mélangeant une pâte à crackers (faite avec du surplus du levain auquel du beurre noisette est ajouté) assaisonnés avec de la poudre d’épinette maison et de cheddar râpé de lait Jersey de la ferme Phylum. Fournie par Virginie Roger-Schroeder

«J’ai commencé au marché Durocher et tout est parti en une heure. J’arrivais au marché et il y avait déjà une file. Ça m’a fait connaître», raconte-t-elle.

Le dimanche, elle annonce sa production de la semaine sur Facebook et Instagram.

«Il y aura un pain jalapeno-cheddar lorsque ce sera la saison, il est très apprécié. Mon but est de rester petit. Je veux une vie à côté tout en gardant les clients particuliers.»

Pourquoi Grignette micro-fournil?

«Grignette, c’était mon surnom quand j’étais petite. La copine de mon oncle, qui avait un gros accent du sud de la France, m’appelait comme ça parce que je mettais des miettes partout. Quand on lame le pain pour faire sortir les gaz avant de le mettre au four, ça s’appelle faire des grignettes. Et le porte-lame du boulanger s’appelle aussi une grignette. C’est fou, j’étais prédestinée! «Micro», c’est parce que je veux rester petite. La boulangerie, c’est où on accueille le client, le lieu de vente, mais je n’ai pas de boutique. Le fournil, c’est le lieu de production», explique Virginie Roger-Schroeder.

Le pain au levain

– Le levain est un composé de farine et d’eau qui fermentent.

– Prêt en une semaine, mais doit être entretenu ensuite.

– Les microorganismes qu’il contient permettent à la pâte de lever.

– Une partie du levain est utilisée pour chaque recette, le reste continue à fermenter.

– Aucune levure n’est ajoutée.

– Demande beaucoup plus de travail.

– «La levure, c’est une Ferrari. Le levain, c’est un tricycle, mais le gluten et les sucres sont digérés dans la fermentation, ce qui fait qu’il est plus digeste», dit Virginie Roger-Schroeder.

Publicité
Publicité