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L'article provient de TVA Nouvelles
Justice et faits divers

Cruauté animale: l’ancien propriétaire d’Expédition Mi-Loup écope de 23 mois de prison

Antoine Simard à son arrivée au palais de justice de Québec, vendredi matin.
Antoine Simard à son arrivée au palais de justice de Québec, vendredi matin. Photo DIDIER DEBUSSCHERE
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Photo portrait de Dominique Lelièvre

Dominique Lelièvre

2025-05-02T14:20:46Z
2025-05-02T19:33:03Z
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L’ancien propriétaire d’Expédition Mi-Loup est condamné à 23 mois de prison pour la mise à mort de nombreux chiens et les mauvais traitements au sein de son chenil de l’île d’Orléans pendant plus d’une décennie, qui vont «au-delà de l’entendement», selon le juge.

Antoine Simard, 44 ans, avait été déclaré coupable en juin 2024 d’avoir tué, blessé ou mutilé des chiens, de leur avoir causé de la souffrance sans nécessité et d’avoir négligé de fournir l’alimentation, l’abri et les soins convenables.

Aux prises avec un problème de naissances non contrôlées après 2015, il a euthanasié des chiots en leur cassant le cou, pour ensuite les jeter dans un congélateur, en plus d’éliminer un certain nombre de chiens vieux ou malades avec une boîte artisanale dans laquelle il injectait un gaz asphyxiant.

Photo DIDIER DEBUSSCHERE
Photo DIDIER DEBUSSCHERE

Au procès, d’anciens guides avaient également rapporté que des animaux ont été pendus ou abattus par arme à feu sous sa gouverne.

Les accusations couvraient une période allant de 2008 à 2022. Expédition Mi-Loup, qui se spécialisait dans les balades en chiens de traîneau, a depuis cessé ses activités.

Il s’agirait de la peine la plus sévère jamais imposée au Québec pour cruauté animale (voir autre texte).

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Expédition Mi-Loup a placé l’entièreté de son chenil en adoption avant de fermer ses portes définitivement en avril 2022.
Expédition Mi-Loup a placé l’entièreté de son chenil en adoption avant de fermer ses portes définitivement en avril 2022. Photo d’archives DIDIER DEBUSSCHERE

«Grande cruauté»

Pour le juge Hubert Couture, si les crimes d’Antoine Simard ont «été commandés par le découragement et le fait qu’il a été dépassé par les événements», ils traduisent aussi «une grande cruauté».

Son comportement «était empreint de violence». Les gestes reprochés sont «sérieux et inacceptables» et vont «au-delà de l’entendement», a-t-il sermonné.

L’emprisonnement ferme était donc requis, quoique «la vindicte populaire ne peut dicter une peine», a-t-il spécifié.

Cette chienne était tremblotante au passage de l’inspectrice du MAPAQ Manon Gaudreault le 3 mars 2020.
Cette chienne était tremblotante au passage de l’inspectrice du MAPAQ Manon Gaudreault le 3 mars 2020. Photo DÉPOSÉE AU PROCÈS

Cette sentence s’avère loin de ce qui était espéré par le ministère public, qui réclamait la peine de prison la plus sévère possible, cinq ans, pour ce cas «d’une amplitude qui n’a jamais été vue au Canada».

Simard, qui a 30 jours pour faire appel de la décision, espérait au contraire s’en tirer avec une peine de deux ans moins un jour dans la collectivité, son avocate insistant sur le fait que «les actes n’ont pas été causés par malice».

Il ne pourra être propriétaire d’un animal pendant 10 ans et devra observer une probation de trois ans à sa sortie de prison.

Pratiques problématiques

Finalement, le nombre de bêtes éliminées par lui ou sous ses ordres n’a jamais été déterminé avec précision, allant de plusieurs dizaines, selon son témoignage, à «probablement un millier», selon l’estimation de la Couronne.

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Les reproductions mal contrôlées, la nourriture qui pouvait être avariée, des niches inadéquates, une absence de soins vétérinaires, le surmenage des chiens... La liste des pratiques problématiques du chenil, signalées par des témoins au procès, est longue.

Edouard Parent, un ancien employé d’Expédition Mi-Loup coaccusé dans cette affaire, écope d’une peine de 18 mois avec conditions, qu’il pourra purger dans la collectivité.
Edouard Parent, un ancien employé d’Expédition Mi-Loup coaccusé dans cette affaire, écope d’une peine de 18 mois avec conditions, qu’il pourra purger dans la collectivité. Photo DIDIER DEBUSSCHERE

Quant au coaccusé Edouard Parent, un ex-employé de l’entreprise coupable de deux chefs sur trois (avoir tué ou blessé des chiens et avoir causé de la souffrance), le juge a entériné la suggestion commune des parties, soit une peine de 18 mois qui pourra être purgée dans la collectivité.

Une peine historique, selon la SPCA de Montréal

La condamnation d’Antoine Simard pour les pratiques à son ancien chenil de l’île d’Orléans pourrait marquer un tournant au Québec, selon la SPCA de Montréal.

«C’est la peine la plus sévère jamais imposée au Québec pour cruauté envers les animaux, donc on espère que ça va marquer un tournant en matière de jurisprudence par rapport à la cruauté envers les animaux dans notre province», a réagi Me Sophie Gaillard, directrice de la défense des animaux et des affaires juridiques et gouvernementales de l’organisme.

Elle estime que ce dénouement envoie «un signal fort», même si le tribunal aurait à son avis pu «aller encore plus loin».

Me Sophie Gaillard, directrice de la défense des animaux et des affaires juridiques et gouvernementales à la SPCA de Montréal.
Me Sophie Gaillard, directrice de la défense des animaux et des affaires juridiques et gouvernementales à la SPCA de Montréal. Photo fournie par la SPCA de Montréal

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Depuis une décennie, ailleurs au pays, on remarque que les peines en cette matière sont de plus en plus sévères, selon elle.

«Si les mêmes faits s’étaient déroulés ailleurs qu’au Québec, probablement qu’on aurait vu une peine plus importante, mais pour le Québec, c’est quand même une peine record et exemplaire», soutient-elle.

«Doués de sensibilité»

Dans sa décision, le juge Hubert Couture a souligné que «les cas de cette nature sont plutôt rares» et que «dans la jurisprudence, seulement deux décisions sont dignes de mention».

Il a aussi rappelé qu’en droit québécois, les animaux ne sont pas traités comme des biens, mais «des êtres doués de sensibilité» qui possèdent «des impératifs biologiques», ce que salue la SPCA de Montréal.

L’organisation montréalaise réclame depuis des mois un encadrement plus strict de l’industrie des chiens de traîneau et suivait donc de près la décision de vendredi.

Elle calcule que la province compte plus de 130 établissements, totalisant environ 5000 chiens.

«Expédition Mi-Loup a mis en lumière un paquet de problèmes systémiques qu’on voit au sein de cette industrie», comme les difficultés à contrôler les naissances de chiots, croit Me Gaillard.

Une pétition de l’organisme a récolté plus de 25 000 signatures pour demander des changements comme l’interdiction de la détention à l’attache comme mode de garde principal (garder un chien attaché à un objet fixe en continu ou pour des périodes prolongées), la stérilisation obligatoire des chiens non destinés à la reproduction et l’obligation de mettre en place un programme de retraite pour les chiens inaptes à être attelés.

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