CRITIQUE | Voici ce qu’on a pensé de la pièce de théâtre «Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu?», nouvelle adaptation québécoise du film français à succès


Bruno Lapointe
Huit années après avoir eu une première vie sur nos scènes, la comédie française Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu? revient dans une formule, revue, corrigée et actualisée. Résultat: un spectacle hilarant et qui fera assurément mouche dans les semaines à venir grâce à la nouvelle adaptation exemplaire de l’auteur Emmanuel Reichenbach.
Dire qu’Alain Bouchard a des préjugés relèverait de l’euphémisme. Le père de famille, un fier Québécois «pure laine», est exaspéré au plus haut point de la mixité de sa cellule familiale: trois de ses quatre filles sont mariées à des hommes issus de la diversité culturelle, soit un Juif, un Coréen et un Arabe.
Il tentera ainsi de jouer les entremetteurs pour s’assurer que sa seule fille célibataire décide de faire sa vie avec un homme blanc, «idéalement de Laval... ou des environs». Mais le réveillon des Fêtes auquel la famille entière est conviée lui réservera bien des surprises, lesquelles exacerberont à parts égales son intolérance, son racisme et son étroitesse d’esprit.
De l’écran à la scène
Si l’intrigue de la pièce vous est familière, c’est parce qu’elle a d’abord été portée à l’écran par le cinéaste français Philippe de Chauveron, en 2014. Succès monstre, autant dans l’Hexagone qu’à l’internationale, ce film a engendré non seulement des recettes impressionnantes, mais également deux suites. Les Québécois avaient également découvert une première adaptation scénique de Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu? sur les planches du Théâtre du Rideau vert, en 2017.
Mais c’est ici dans une toute nouvelle version que revient l’œuvre, dont le texte a été revu et corrigé par son adaptateur, l’auteur Emmanuel Reichenbach. Désormais mieux collée sur l’actualité – des références à la pandémie, aux disciples de Donald Trump ou encore au troisième lien y étant désormais greffées –, cette mouture de Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu? risque de résonner encore plus auprès du public québécois.
Ce texte est livré de main de maître par Rémy Girard. Il est absolument irréprochable dans la peau du patriarche dépassé par les événements, son talent comique indéniable permettant d’éviter que les propos véhiculés ne sombrent dans le mauvais goût, en plus d’ajouter relief et humanité à un personnage qui, sur papier, aurait tout pour irriter les spectateurs.
Du côté de ses camarades de scène, certains s’en tirent mieux que d’autres. Parmi ceux-ci, soulignons à grands traits le talent de Marie-Ginette Guay, Isabeau Blanche, Ariel Ifergan, Monika Pilon et Mehdi Boumalki.

Des longueurs
À la mise en scène, Michel-Maxime Legault parvient à ajouter une certaine cohésion à certains passages chaotiques – les querelles familiales sont rarement ordonnées, après tout – et, surtout, à maintenir le rythme malgré les longueurs qu’accuse cette production d’environ deux heures quarante (incluant, Dieu merci, l’entracte).
Non, on ne fait ni dans la dentelle ni dans la subtilité avec ce ramassis (volontaire et assumé) de clichés, d’idées préconçues et de préjugés défavorables envers les différences. Le spectacle porte-t-il réellement à réflexion? Déboulonnera-t-il des croyances dépassées chez ses spectateurs? Pas nécessairement, tant son propos est d’abord exagéré, puis arrosé de bons sentiments.
N’empêche, certains riront certainement jaune. Mais surtout, on rit tous à gorge déployée, on rit souvent et on continuera fort probablement de rire grâce aux répliques qui nous suivront assurément dans les jours suivant une représentation de Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu?. Et c’est, en fin de compte, tout ce qui compte.
- La pièce Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu? est présentée jusqu’à samedi au Théâtre Duceppe. Elle s’installera au Théâtre Lionel-Groulx de Sainte-Thérèse du 30 juillet au 24 août avant de partir en tournée. Pour toutes les dates: questcequonafaitaubondieu.com