Crimes violents: le gouvernement Carney veut rétablir les peines consécutives

Raphaël Pirro
OTTAWA | Après avoir assoupli les règles en 2019, le gouvernement libéral déposera la semaine prochaine une réforme du Code criminel qui inclura un retour à des peines plus sévères et un resserrement des conditions de remise en liberté.
Le projet de loi fédéral vise surtout les «délinquants violents» et les personnes «accusées de crimes graves comme le vol de véhicule avec violence, l’introduction par effraction, la traite de personnes, les voies de fait avec violence et l’agression sexuelle».
Resserrement des remises en liberté
Ottawa veut notamment renverser le fardeau de la preuve pour ceux qui demandent une libération sous caution: il reviendra à leurs avocats et non aux procureurs de prouver qu’ils ne constituent plus une menace pour la société.
Cela ne représente pas un grand changement, selon l’avocate criminaliste Julie Couture, car il faudra toujours démontrer au tribunal que la personne va respecter ses conditions et se présenter à la cour.
«L’idée est plutôt d’envoyer le message que ce ne sera plus automatique, la remise en liberté dans ces cas-là», explique-t-elle en entrevue.
Le retour des peines consécutives
Autrefois l’apanage des conservateurs, les peines consécutives feront leur retour au Canada, «de sorte qu’une peine de sept ans et une peine de cinq ans puissent signifier douze ans derrière les barreaux, et non plus seulement sept», a dit le premier ministre Mark Carney en conférence de presse jeudi.
Ces peines avaient été jugées inconstitutionnelles par la Cour suprême dans le dossier du meurtrier de masse Alexandre Bissonnette, en 2022. Sa sentence d’un maximum de 150 ans de prison contrevenait à l’article de la Charte canadienne des droits et libertés concernant «les peines cruelles et inusitées».
Encore ici, le changement proposé n’est pas clair, puisque les peines consécutives sont déjà régulièrement distribuées dans une multitude de dossiers, explique Me Couture.
Ottawa n’a pas dévoilé les fins détails de son projet de loi, qui relève du ministre de la Justice Sean Fraser.
Une proposition... conservatrice
En point de presse, Mark Carney s’est fait demander s’il s’agissait d’une énième volte-face par rapport au progressisme de l’ère Trudeau.
Le premier ministre n’a pas nié: «Il faut apprendre des leçons, des leçons sur le terrain, sur les rues, dans nos communautés», a-t-il répondu.
C’est trop peu trop tard, selon les conservateurs.
«Sous les libéraux, la criminalité a explosé partout au pays. Après l’échec de leurs réformes en matière de justice, les libéraux tentent encore une fois de remettre la pâte à dent dans le tube», a indiqué le conservateur Pierre Paul-Hus.
Le chef Pierre Poilievre souhaite carrément remplacer la loi C-75, vaste réforme du Code criminel qui avait notamment instauré le «principe de modération» permettant aux agents de la paix de libérer des criminels sous certaines conditions.
Les libéraux ont récemment voté contre un projet de loi en ce sens déposé par les conservateurs.
Par ailleurs, le projet de loi du ministre Fraser propose aussi d’embaucher 1000 agents supplémentaires à la Gendarmerie royale du Canada et de resserrer les critères pour les peines avec sursis dans le cas de certaines infractions sexuelles.
Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?
Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.