Contenus francophones: Québec veut mettre au pas Netflix et Spotify
Gabriel Côté
Prévenu par un comité que la survie de la culture québécoise est en jeu, le gouvernement Legault a l’intention de légiférer pour garantir l’accès facile à des contenus francophones sur des plateformes de diffusion comme Netflix ou Spotify.
«Sur le projet de loi, c’est clair: je peux déjà vous dire qu’on avait cette intention-là. Les experts nous disent aujourd’hui qu’on peut [légiférer pour encadrer les activités des grandes plateformes]», a confirmé le ministre de la Culture, Mathieu Lacombe, dans les couloirs du parlement mercredi.
M. Lacombe a désormais entre les mains le rapport du comité-conseil qu’il a mandaté pour trouver des façons de protéger l’accès à la culture québécoise à l’ère du numérique.
Parmi les 32 recommandations du rapport figure la suggestion de légiférer pour assurer aux Québécois «un droit fondamental à l’accès et à la découvrabilité des contenus d’expression originale de langue française», c’est-à-dire qui ne sont pas la simple traduction d’œuvres dans une autre langue. C’est là, écrivent les auteurs, une question de «survie» pour la culture québécoise.
Une entreprise délicate
Or, une telle initiative exigera du Québec qu’il fasse preuve d’un certain doigté, comme il s’agit de transiger avec des «entreprises transnationales, parfois hostiles aux législations nationales».
«Il s’agit ici d’imposer un objectif et une obligation de résultat, tout en laissant aux entreprises le choix des moyens pour y parvenir», peut-on lire dans le rapport. «De cette façon, la législation québécoise devrait mieux résister à l’épreuve du temps et aux nombreuses évolutions technologiques à venir.»
- Écoutez l'entrevue avec Patrick Taillon, professeur en droit constitutionnel, via QUB :
La première obligation à imposer aux entreprises serait l’imposition d’un minimum, poursuivent les auteurs, qui suggèrent que les plateformes qui utilisent un système de recommandation algorithmique, comme YouTube, devraient toujours offrir «au moins une offre de contenu culturel d’expression originale de langue française», c’est-à-dire qui n’est pas la traduction d’une œuvre produite dans une autre langue.
Sur cette base, le gouvernement pourrait construire, et éventuellement imposer des quotas, comme c’est le cas dans certains pays européens.
«Ce qu’il faut arriver à faire, c’est qu’il y ait davantage de contenu québécois francophone, plus généralement sur les plateformes, parce qu’on ne peut pas choisir ce qui ne nous est pas proposé», a résumé le ministre Lacombe, confiant que le Québec arrivera à ses fins.
«Les experts aujourd’hui nous disent qu’on a cette compétence-là, qu’il y a des moyens forts qui existent, d’y arriver et que les plateformes devront s’y soumettre», a-t-il affirmé.
Nouvelle entente
Dans un autre ordre d’idées, le comité souligne que le Québec devrait négocier une entente avec le fédéral afin de faire respecter ses revendications traditionnelles en culture, alors même qu’Ottawa a l’ambition «de considérer comme relevant de sa compétence tout ce qui se rattache à Internet», ce qui risquerait de porter atteinte à l’autonomie du Québec.
Dans ce contexte, «le déploiement d’une vaste stratégie d’alliances diplomatiques», notamment avec la France, est plus nécessaire que jamais, notent aussi les auteurs du rapport.
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