Comment peut-on accepter que l’Université de Moncton porte le nom du persécuteur des Acadiens?


Normand Lester
L’Université de Moncton, la plus grande université de langue française au Canada à l’extérieur du Québec, va étudier la demande de ceux qui souhaitent qu’elle change de nom. Plus de 1000 Acadiens ont signé une pétition en ce sens. Robert Moncton (aussi écrit Monckton) est le principal exécutant de la déportation des Acadiens.
En juin 1755, le colonel Moncton commence la destruction de l’Acadie en s’emparant des forts français Beauséjour et Gaspareau, en contravention avec les traités de paix signés avec la France. Le 8 août 1755, il reçoit des directives du général Charles Lawrence pour accélérer la solution finale à la question acadienne :
«... comme il sera peut-être très difficile de s’emparer des habitants, vous devrez autant que possible détruire tous les villages des côtes nord et nord-ouest de l’isthme situés aux environs du fort Beauséjour, et faire tous les efforts possibles pour réduire à la famine ceux qui tenteraient de se cacher dans les bois.»*

«Nettoyage ethnique»
Pour forcer les hommes réfugiés dans les bois à se constituer prisonniers, les Anglais exécutent, en représailles, à la manière nazie, leurs parents: «Donnez 2 jours aux absents pour se livrer, faute de quoi leur plus proche parent sera exécuté militairement.»
Au cours d’opérations de «nettoyage ethnique» qu’il dirigea, Moncton fit déporter plus de 2100 Acadiens, hommes, femmes et enfants de la région Beaubassin, de Beauséjour et de l’isthme de Chignectou. Il confisqua leurs terres et leurs biens, fit brûler leurs demeures, leurs granges et les dépendances, et s’empara de leurs bestiaux.
L’efficacité de Moncton lui valut d’être nommé lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse en décembre 1755. À ce titre, il porte aussi la responsabilité de la déportation en Angleterre, en 1758, de plus de 3000 autres Acadiens réfugiés dans l’Isle Saint-Jean, maintenant l’Île-du-Prince-Édouard.

Les exactions odieuses de Moncton constituent ce qu’on appelle aujourd’hui un génocide. Selon la définition de l’ONU, il s’agit de «l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation et tout autre acte inhumain commis contre toute population civile, avant ou pendant la guerre ou les persécutions, pour des motifs politiques, raciaux ou religieux».
Pendant les sept années que dura la destruction de l’Acadie française, sa population passa de 15 000 en 1755 à environ 2500 en 1762. Plus du tiers d’entre eux, de 5000 à 6000, y trouvèrent la mort.
Il faut une «Avenue des Acadiens» à Québec!
L’Université de Moncton n’est pas la seule à glorifier la mémoire de cet odieux criminel de guerre. À Québec, une avenue porte son nom. Elle va du chemin Sainte-Foy aux plaines d’Abraham. Moncton était le commandant en second de James Wolfe.

C’est particulièrement infâme quand on sait que 150 déportés acadiens se sont battus pour défendre la Nouvelle-France en 1759. Sur ordre de Wolfe, Moncton a dévasté la rive sud de Québec, faisant brûler toutes les maisons et les granges ainsi que les récoltes entre Beaumont et la rivière Chaudière.
En 1999, un citoyen, Richard Gervais, avait proposé, au maire de Québec de mettre fin à cette ignominie: «Je demande, par la présente, qu’on rebaptise l’actuelle avenue Moncton “avenue des Acadiens”.» Rien ne fut fait.
Le Québec et l’Acadie sont parmi les rares endroits au monde où l’on accepte ce genre de situation. C’est une simple question d’honneur, de dignité et de respect de soi-même! Les Acadiens semblent enfin résolus d’enlever à l’université qui forme leur jeunesse le nom du bourreau de leurs ancêtres. Pendant combien de temps l’odonyme Moncton entachera-t-il notre capitale nationale?
* Baby, François, «Fallait-il sauver le soldat Monckton de l’oubli?», L’Action nationale, août 1999.
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