Voici comment les pompiers réussissent à combattre les feux de forêt
Les pompiers ont différentes méthodes selon l'intensité du brasier, le terrain, les vents et la présence de plan d’eau

Anne Caroline Desplanques
Comment freiner et combattre les feux de forêt qui rongent le nord du Québec et bloquent le ciel d’une partie du continent nord-américain avec sa pollution atmosphérique? Les pompiers experts dans ce type d’incendie de grande ampleur possèdent des stratégies bien à eux, qu’ils exploitent selon l’intensité du brasier, le terrain, les vents et la présence de plans d’eau. Explications.
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Comment se propage un feu de forêt
La propagation des flammes est dopée par trois éléments: le vent, la végétation et le relief du terrain. Le vent attise les flammes et les pousse à se déplacer. En plus, il transporte des tisons ou des particules incandescentes. C’est comme ça que le feu gagne du terrain et saute même les zones où il n’a rien à brûler, comme les routes ou les rivières. La végétation sert de combustible au feu. Plus elle est sèche et abondante, plus les flammes se propagent. Quant au relief, il joue un rôle dans la vitesse de déplacement du feu: il avance plus vite sur les terrains qui montent et ralentit sur ceux en pente descendante.

Stratégie numéro 1: arroser
Le Québec et le Canada ont la chance d’être riches en lacs et rivières, ce qui permet aux combattants du feu de s’appuyer sur eux dans la plupart des cas. Au sol, les pompiers installent des pompes sur les rives et acheminent l’eau par un réseau de tuyaux. Dans les airs, les avions-citernes embrassent les lacs pour y charger leurs gigantesques cuves qui peuvent contenir jusqu’à 6000 litres d’eau. Quand l’incendie couvre une surface restreinte, les pompiers l’arrosent de tous les côtés. Sinon, ils attendent son arrivée en arrosant les points sensibles pour les protéger des flammes.

- Écoutez l'entrevue de Mario Dumont avec Frédéric Verreault, Directeur exécutif pour Les Chantiers de Chibougamau Ltée via QUB radio :
Stratégie numéro 2: supprimer le combustible
Dans certains cas, les équipes d’intervention éliminent le combustible, donc la végétation, autour des lieux stratégiques ou sur le tracé de déplacement du feu pour l’arrêter, comme c’est le cas autour de l’usine de pâtes et papiers Nordic Kraft à Lebel-sur-Quévillon. Pour supprimer la végétation, on peut aussi creuser des tranchées entre la forêt et les communautés à l’aide de machinerie lourde, comme on l’a fait à Senneterre en Abitibi-Témiscamingue jeudi. Une bande d’arbres est arrachée et la terre est retournée. On calcule que la tranchée doit avoir la largeur équivalente à 1,5 fois la hauteur des flammes.

Stratégie numéro 3: mater le feu par le feu
Traditionnellement, les autochtones, mais aussi les bergers français, allument des contre-feux pour éliminer la végétation sur le tracé de déplacement de l’incendie avant qu’il arrive, afin de le stopper. Cette technique dite du feu tactique ou du brûlage est très utilisée en Australie en raison de l’absence d’eau. Des experts canadiens du brûlage y ont d’ailleurs été dépêchés en 2020. Maintenant, c’est au tour des experts français du brûlage de venir nous prêter main-forte. Cette méthode est aussi utilisée pour entretenir les forêts et ainsi prévenir le développement d’incendies.
- Écoutez l'entrevue de Mario Dumont avec Guy Bérubé, enquêteur incendie et vice-président de l’Association internationale des enquêteurs en incendies criminels via QUB radio :
Pourquoi certains secteurs sont abandonnés?
«On va être obligé de laisser brûler Clova», disait lundi le premier ministre Legault, ce qui a laissé penser qu’on abandonnait littéralement ce village de Mauricie. Mais la SOPFEU n’a pas abandonné Clova. Le travail au sol et l’arrosage héliporté se sont poursuivis jusqu’à ce que la situation devienne trop dangereuse pour les pompiers. Ce que le premier ministre signalait, c’est plutôt que les avions-citernes avaient été déployés ailleurs, car le Québec n’en a que 17. Il leur faut donc protéger en priorité les communautés les plus populeuses, les usines, les infrastructures essentielles, comme les lignes de transport d’électricité, et les routes assurant une porte de sortie vitale en cas d’évacuation.