CNESST pas votre argent
Des milliers de dollars en petites bouchées, en trophées et pour une réunion dans un hôtel 5 étoiles


Jean-Nicolas Blanchet
Si vous viviez avec l’argent durement gagné des autres et que vous deviez organiser une réunion pour 125 personnes, je suis pas mal sûr que votre choix ne s’arrêterait pas sur un des très rares hôtels cinq étoiles de Québec.
Prenons un autre cas si vous vivez toujours avec l’argent gagné par les autres. Si vous voulez organiser un petit événement pour féliciter votre personnel avec des méritas, je suis pas mal certain que ça ne vous coûtera pas des milliers de dollars en petites bouchées et en confection de trophées pour vous autocongratuler.
C’est pourtant ce qu’a fait la Commission des normes de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), qui se finance à partir des cotisations versées par les employeurs du Québec.
Le 5 février dernier, la CNESST a tenu une rencontre en présentiel d’une journée regroupant 125 gestionnaires de la vice-présidence à l’indemnisation et à la réintégration au travail.
L’organisme a décidé d’organiser la réunion au luxueux hôtel cinq étoiles Le Bonne Entente, à Québec. Près de 11 000$ ont été payés pour la location de la salle, le dîner, les deux pauses café et le stationnement.
Il faut ajouter presque 5000$ pour l’équipement audiovisuel et le soutien technique. Une conférence a été donnée par un psychologue organisationnel et ç’a coûté plus de 7000$.
Ajoutez à ça 17 000$ en frais de déplacement et près de 14 000$ en nuitées d’hôtel pour ceux qui ont voulu rester dormir au Bonne Entente.
Au total, cette rencontre d’une seule journée a donc coûté 53 242$, révèlent les documents que j’ai obtenus en vertu de la Loi sur l’accès à l’information.
Un 5 étoiles, rien de moins?
Est-ce que cette rencontre pouvait se tenir de façon virtuelle? Et pourquoi ne pas l’avoir tenue au siège social tout neuf de la CNESST, à Québec?
«Cette unique rencontre en présentiel avait pour objectif d’établir les priorités en début d’année 2025, d’échanger de manière soutenue sur la signification des résultats obtenus au sondage sur la culture organisationnelle et de s’entendre sur les actions incontournables pour assurer le succès de la transformation organisationnelle qui sera mise en œuvre au cours des prochaines années», a répondu Nicolas Bégin, porte-parole de la CNESST.
«[...] Il n’y a pas de salle suffisamment grande pour accueillir autant de personnes dans les locaux de la CNESST en fonction de la nature des activités qui étaient prévues lors de cette journée.»
Je peine néanmoins à comprendre que l’option choisie, une fois que le siège social ne convient pas, ce soit un hôtel cinq étoiles, alors que le gouvernement peut louer des salles presque gratuitement, sauf pour le ménage et le stationnement.
Près de 20 000$ pour se féliciter
Toujours selon des documents que j’ai obtenus par la Loi sur l’accès à l’information, la CNESST a payé 19 471$ pour un autre événement, soit la troisième édition des Prix Vision.
C’était à la fin de l’année 2024. On parle notamment de 5374$ en nourriture et de 1165$ pour des trophées.
Au moins, la CNESST a organisé ça dans ses propres locaux.
Les Prix Vision, c’est un petit gala pour féliciter quelques employés, comme une étoile sur un bulletin.
Cet événement vise à célébrer «le travail exceptionnel de nos équipes», a écrit la CNESST quand elle en faisait la promotion.
J’ai demandé à l’organisme s’il pensait que c’était une dépense justifiée. On m’a répondu que c’était une activité importante, mais que «la tenue de l’évènement [...] fait actuellement l’objet d’une réévaluation de la part des organisateurs».
Tenir ça sur l’heure du midi, avec un méritas au lieu d’un trophée, me semble que ça se ferait, non?