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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

Cinq questions à Miryam Bouchard, réalisatrice de Mea Culpa

Alice Fortin
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Photo portrait de Emmanuelle Plante

Emmanuelle Plante

2025-02-01T16:00:00Z
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Au bout du fil, Miryam s’enthousiasme en parlant de Mea Culpa. Elle travaille sur quatre épisodes en même temps à différentes étapes de leur postproduction. Comme les tournages se sont terminés en décembre, c’est une immersion complète et intense dans cette série sensible écrite par Chantal Cadieux.

Avant de s’y plonger, la réalisatrice a mis les bases de M’entends-tu?, tourné L’Échappée, Destinée, Mon ex à moi en plus d’avoir réalisé une des premières séries web d’envergure au Québec : Chroniques d’une mère indigne. On lui doit aussi les films Mon cirque à moi, Ligne de fuite et 23 décembre. Mea Culpa, qui suit quatre amis alors que l’assassin d’un des leurs sort de prison au bout de 25 ans, marque son retour au petit écran.

En quoi le sujet, la justice réparatrice dans ce cas-ci, influence-t-il le rythme, voire la couleur d’une série?

J’ai une approche très détaillée dès la lecture des premiers scénarios. Le sujet va influencer la lumière, la mise en scène, le mouvement des caméras, la direction d’acteurs, les décors, les costumes. Ça va jusqu’à la texture des tissus. Quand j’ai tourné le film 23 décembre, l’hiver était incarné dans la texture des costumes que je voulais réconfortants. Le ressenti est important. Pour Mea Culpa, même s’il est question de justice réparatrice, je voyais quelque chose de très lumineux. Bérénice y croit. J’avais aussi envie d’une lumière naturelle. Dans les flashbacks on est dans les tons de rouge, d’orangé. Dans le temps présent, c’est plus clair. Même s’il se dit des choses terribles, on se tourne vers l’espoir.

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Comment as-tu travaillé avec les acteurs pour qu’ils campent bien leurs différentes approches face au pardon?

On a beaucoup travaillé le non-dit. Ça va aussi loin que de se questionner sur la façon de marcher de chacun. Marie-Dominique (Jessica Barker) est toujours en retrait, Bérénice (Mélissa Desormeaux-Poulin) ne croise jamais les bras, ne juge pas, David (Maxim Gaudette) ne fait jamais de geste brusque. C’est important de choisir les bons comédiens. Maxim a beaucoup de douceur dans le visage. Il a un regard candide, aucune malice. Même si David a commis l’irréparable, on développe de l’empathie pour lui.

Eric Myre
Eric Myre

Rémi est tétraplégique. Comment t’es-tu assurée de la crédibilité de sa situation étant donné que l’acteur, Dany Boudreault, n’est pas handicapé?

Nous avons rencontré de vrais tétraplégiques qui nous ont beaucoup nourris en témoignant de leur condition. Juste pour le fauteuil, on s’est questionnés. Est-ce qu’on en fait faire un, on en loue un sans l’enlever à quelqu’un qui en aurait véritablement besoin? Nous avons finalement eu la chance d’avoir Olivier, un jeune tétraplégique dans la trentaine qui a coaché Dany. Il avait un fauteuil dont il ne se servait plus qu’on a pu mouler pour l’acteur. 

Nous avons aussi eu la chance de tourner dans une vraie maison adaptée ce qui a eu beaucoup d’impact sur la mise en scène. Je ne voulais pas reproduire des clichés. On ne voit jamais un handicapé se faire donner un bain dans une série. On a eu la possibilité d’être dans le réalisme. De pouvoir toucher les gens.

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Quand on fait le casting pour jouer des personnages à l’époque de leur jeunesse, que doit-on rechercher en premier pour une meilleure ressemblance?

Ça a été un gros défi. C’est la première fois que j’avais à recréer un groupe en termes de flashback. On regarde des photos, des looks, la couleur des yeux, la taille. Mais au final, en audition, c’est principalement l’énergie qui ressort. Catherine Simon avait la même énergie que Jessica Barker. Et je dois dire que tous les jeunes ont été excellents parce qu’on tournait de nuit, il y avait une chorégraphie, une bataille, la chute du pont, tout un dispositif de sécurité. Ça demande beaucoup d’énergie.

On sent beaucoup d’ambiguïté entre les personnages. Ça influence aussi notre attachement comme spectateurs aux personnages.

À la lecture de la scène où Bérénice va voir David au chalet, j’avais envie qu’ils se frenchent. Je sentais un sentiment amoureux. Mais en même temps je ne voudrais pas que ça soit ma fille dans cette situation. L’écriture de Chantal Cadieux est très dense. Il y a des contradictions que le spectateur va ressentir. Chaque personnage cache des choses qu’il ne veut pas dévoiler. Le scénario est bien tissé et rien n’est anodin. La justice réparatrice est un sujet porteur. On se dit que tout le monde a droit à une deuxième chance, mais quand c’est proche de nous, c’est une autre histoire. J’ai moi-même perdu une amie par féminicide dans les années 1990. Ce projet me parle très fort.

  • Mea Culpa, mardi 20h sur ICI Télé
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