C’est quoi, au juste, le langage inclusif (et pourquoi l’interdire)?


Alice Fournier
Le gouvernement de François Legault interdit l’usage de l’écriture inclusive et de la rédaction non binaire dans les communications d’État. Mais en quoi consistent exactement ces formes d’écriture? Pourquoi les interdire? On fait le point.
Écriture inclusive et rédaction non binaire
Il ne faut pas confondre l’écriture inclusive et la rédaction non binaire.
La première cherche l’équilibre entre le masculin et le féminin avec des termes neutres (fidèle au lieu de croyant, par exemple) ou des doublets (danseurs et danseuses).
Selon l’Office québécois de la langue française (OQLF), l’écriture inclusive «consiste à éviter les genres grammaticaux masculins et féminins en ce qui concerne les personnes, sans toutefois faire appel à des néologismes, au contraire de la rédaction non binaire».
La seconde, plus récente, prône l’utilisation de nouveaux mots dans le but d’inclure ou de désigner des personnes qui ne s’identifient pas comme homme ou femme. On peut penser au pronom «iel», une contraction des pronoms «il» et «elle», ou de nouvelles formes épicènes comme «auteurice», une contraction des termes «auteur» et «autrice».
L’OQLF ne reconnaît pas la rédaction non binaire.
À quoi ça sert, au juste?
«Dans la langue française, il y a deux genres, masculin et féminin, et la langue inclusive a pour objectif d’élargir cet usage et d'inclure toutes les personnes», explique la présidente de l’Association canadienne de linguistique, Julie Auger.
«Pendant plusieurs décennies l’objectif était d’inclure les femmes. Aujourd’hui, il s’agit d’inclure une diversité de genres», poursuit celle qui est aussi professeure à l’Université de Montréal.
Pourquoi l'interdire?
Le ministre de la Langue française, Jean-François Roberge, affirme que l’interdiction de l’écriture inclusive vise à «mettre fin à la confusion linguistique qu’on retrouve en ce moment».
«De plus en plus, il y a toutes sortes de termes, des néologismes, qui sont utilisés dans les communications de l’État, des mots impossibles à conjuguer, impossibles à accorder», a-t-il avancé en entrevue à TVA Nouvelles.
Julie Auger, elle, y voit un recul, alors que «le Québec a toujours été novateur pour la féminisation comme pour la reconnaissance des personnes non binaires dans la langue».
«Oui, les néologismes posent certains problèmes, mais de là à les retirer... C’est difficile de croire qu’il n’y a pas une prise de position plus ou moins directe contre la diversité», déplore-t-elle.
L'association canadienne de linguistique a d'ailleur pris position sur le sujet, et demande au gouvernement de «reconsidérer son décret visant à interdire l’usage de certaines formes d’écriture inclusive».