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C’est quoi, au juste, la dépendance à la pornographie?

Capture d'écran J.E.
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Photo portrait de Sarah-Florence  Benjamin

Sarah-Florence Benjamin

2025-07-31T15:12:09Z
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Est-ce qu’on peut vraiment être dépendant à la pornographie? C’est la question qu’on a posée à deux experts.

Aux États-Unis, ce serait entre 1,5% et 3% de la population qui considère que sa consommation de pornographie est problématique.

Ce que ça veut dire, c’est qu’elle considère que leur consommation de contenus pour adultes leur cause une détresse et qu’elle interfère avec les autres sphères de leur vie (couple, amitiés, travail, responsabilités familiales, etc.).

Mettons une première chose au clair: si, dans la vie de tous les jours, certaines personnes utilisent l’expression «dépendance à la pornographie», elle n’est pas utilisée par la communauté scientifique, qui privilégie plutôt «usage problématique de la pornographie».

Le trouble ne figure pas dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM), l’ouvrage de référence des professionnels de la santé mentale, et ne peut donc pas être diagnostiqué. C’est parce que la science ne s’entend pas sur sa définition et sur les manières de le mesurer objectivement, explique Caroline Messier-Bellemare, sexologue et psychothérapeute.

«On n’a pas réussi à démontrer scientifiquement que la porno crée une addiction physique qu’on pourrait mesurer sur l’imagerie cérébrale, ou de manque, comme la drogue et l’alcool», précise-t-elle.

Ça ne veut pas dire que la sexologue ne traite pas de patients dont la consommation de porno provoque une détresse réelle.

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Selon elle, il faudrait encore 10 à 15 ans avant que le trouble ne se retrouve dans le DSM.

Cas complexes

Les personnes qui consultent Caroline Messier-Bellemare en lien à leur consommation de pornographie sont majoritairement des hommes, entre la fin de l’adolescence et la quarantaine, qui «vivent un stress de performance par rapport à la sexualité» et pour qui «la sexualité a été très marquante à un moment de la vie, souvent très jeune».

De plus en plus de personnes qui consultent ont d’autres comportements compulsifs en dehors de la pornographie, ce qui rend leur cas plus complexe.

Elles sont particulièrement vulnérables au fait que la sexualité et la pornographie sont très facilement accessibles sur internet.

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Un problème de santé publique?

L’argument du potentiel addictif est souvent utilisé pour justifier la censure de la pornographie , souligne le professeur au département sexologie de l’UQAM Simon Corneau.

«Certains auteurs disent que c’est une manière de pathologiser une pratique très commune et anodine pour la majorité pour mieux la contrôler», poursuit-il.

Si on considère que l’usage de la pornographie est un enjeu pressant, il faut d’abord être capable de bien définir le problème de santé publique. «Pour le moment, le problème n’est pas clair», dit-il.

Il considère que c’est irréaliste de penser qu’on peut éradiquer la pornographie.

UQAM
UQAM

«La recherche d’informations» est une motivation souvent évoquée pour le visionnement de contenu pour adultes, ce que le professeur ne considère pas nécessairement négatif.

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C’est vrai, la pornographie «introduit des biais [dans notre vision de la sexualité], mais des biais, il y en a partout», insiste Simon Corneau. «On est bombardés de discours sur la sexualité», rappelle-t-il.

La manière dont on parle de la pornographie a aussi un effet sur ceux qui en consomment. Une personne qui pense que la pornographie est mauvaise peut «vivre plus d’incongruence morale et de détresse» si elle en consomme, illustre le professeur.

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Que faire si ça nous arrive?

Si vous pensez que votre consommation de pornographie a des effets négatifs sur votre vie, c’est une bonne idée d’en parler à un professionnel ou une professionnelle en santé mentale ou en sexologie.

«Il y a une similarité avec l’addiction au niveau du traitement. Il faut commencer par reconnaître le problème et en parler», soutient Caroline Messier-Bellemare.

En travaillant sur le sentiment de honte souvent associé avec ce trouble et le tabou qui l’entoure, il est absolument possible de s’en sortir, assure la sexologue.

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