C’est pas vrai que je vais mettre mon compost au congélateur


Isabelle Maréchal
Comme citoyens, sommes-nous assez responsabilisés face à nos propres poubelles? Demandez à votre municipalité, il y a de bonnes chances qu’elle vous dise que vous devez en faire plus pour éviter de produire des déchets qui vont se ramasser dans le trou béant de notre surconsommation.
D’ici 2029, tous les arrondissements de Montréal passeront à la collecte des déchets toutes les deux semaines. On nous annonce ça l’air de rien, comme si on venait de nous dire que le bus allait passer à l’heure. Plus d’un Montréalais sur deux trouve ça carrément inacceptable. Évidemment, la Ville se désole de notre désengagement généralisé. «Les gens résistent!», qu’elle clame haut et fort.
Pôpa serait fier de nous
C’est vrai qu’on entretient une bizarre de relation amour-haine avec nos vidanges. Quand on les oublie, ça se sent. Littéralement. Mais la plupart du temps, on veut juste pas y penser. Pourtant, quand je regarde mes déchets sur le trottoir, je me sens mal. Vraiment.
Ces dernières années, je me suis mise à composter. Ça réduit drôlement mon bac noir. Je me dis qu’au moins, ça ne finit pas au site d’enfouissement.
On ne peut plus se mettre la tête «dans le bac» et faire semblant d’être écolo parce qu’on ramasse nos pelures de bananes. Mais le discours culpabilisant me semble une bien mauvaise approche pour conscientiser le monde. Surtout que la cible «zéro déchet» de plusieurs municipalités me parait irréaliste.
À Montréal, on veut l’atteindre d’ici 2030. Une belle ambition, vraiment. À Québec et Sherbrooke, les objectifs sont plus réalistes. Car entre les bonnes intentions et la vraie vie, il y a un bac qui déborde. C’est pas parce que le camion à ordures passe moins souvent qu’il y a moins de déchets.
Résistance citoyenne
Il y a une certaine résistance citoyenne, mais les villes doivent se demander pourquoi! On va les mettre où nos vidanges en attendant le camion tous les 15 jours?
En fait, 70% des déchets proviennent de l’industrie et du commerce. Ce ne sont pas vos sacs de couches ni vos restants de table qui asphyxient la planète. C’est le modèle même qui sent mauvais. Les gros pollueurs qu’on laisse tranquilles.
C’est insultant de nous dire de mettre notre compost... au congélateur! Sérieusement? Pour l’instant, c’est juste un fardeau qui pue en dessous de mon évier. Tant mieux pour ceux qui possèdent un gros congélo dans leur garage double. Moi, c’est la limite de ma collaboration citoyenne.
Le vidangeur le plus connu au Québec, Simon Paré-Poupart, me disait que ça coûte environ 400$ en moyenne par an «par porte» pour ramasser nos déchets. C’est sûr que ça fait pas cher du voyage.
Serions-nous prêts collectivement à payer plus pour la collecte de nos résidus? Nos cochonneries jugées au poids?
Pas sûr que ça passe dans la population, qui a déjà de la misère à boucler ses fins de mois.