«C’est le Far West»: des pesticides nocifs sur les pelouses de Québec
L’épandage de pesticides nocifs sur les pelouses des citoyens de la ville s’est poursuivi l’été dernier, même s’il est désormais interdit


Kathryne Lamontagne
L’épandage de pesticides nocifs sur les pelouses des citoyens de la ville de Québec s’est poursuivi allègrement l’été dernier même s’il est désormais interdit, révèle un rapport obtenu par notre Bureau d’enquête.
• À lire aussi: Ville de Québec: le règlement sur l’interdiction des pesticides sur le point d’être adopté
Une série d’inspections et d’interventions faites par la Ville laissent croire que plusieurs entreprises spécialisées en entretien de pelouses auraient commis de multiples infractions au nouveau règlement sur les pesticides, avance le document.
«C’est le Far West», résume avec découragement une source.
Adoptée en 2023, cette réglementation municipale interdit, depuis l'été dernier, l’usage des pesticides non biologiques sur tout le territoire de la Ville en plus de mieux encadrer les compagnies qui travaillent dans le domaine (voir ci-dessous).

Durant les derniers mois estivaux, donc, une brigade ainsi que des inspecteurs de la Ville de Québec sont allés sur le terrain afin de sensibiliser les citoyens et les entreprises au règlement.
Leur premier bilan est toutefois inquiétant.
Enjeux pour la santé
Des produits non homologués par Santé Canada pour le traitement des pelouses auraient été utilisés, à en croire quelque 800 étiquettes apposées par les compagnies sur les terrains des citoyens. Ces pesticides peuvent représenter des enjeux pour la santé humaine ou environnementale.
L’analyse de quatre échantillons a d’ailleurs permis de découvrir que dans la moitié des cas, un herbicide de synthèse interdit par la Ville avait été utilisé.
Face à la situation, huit signalements ont été faits au ministère de l’Environnement du Québec. Trois autres ont été logés à l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Santé Canada.
«Il y a des entreprises qui sont exemplaires... Mais il y en a d’autres qui ont beaucoup de travail à faire», nous explique-t-on.
«Entreprises peu interpellées»
Dans son bilan, la Ville constate aussi que des entreprises en gestion parasitaire se sentent «peu interpellées» par la réglementation et que des citoyens contournent les règles en vigueur, grâce à l’achat en ligne de produits interdits. Qui plus est, des travailleurs dans le domaine ne détiennent pas toujours les compétences requises.
«La transition vers les biopesticides se fait lentement», statue la Ville, qui estime que la «collaboration et la sensibilisation ont leurs limites» et que sa nouvelle réglementation était donc «essentielle».
Vers des amendes
La Ville, qui se donne jusqu’en 2026 pour que seuls les biopesticides soient utilisés sur son territoire, s’est montrée tolérante envers les récalcitrants.
Une quarantaine d’avis ont été envoyés par courriel ou par téléphone à des personnes ou des entreprises délinquantes. Un seul constat a été remis à une entreprise qui a refusé de s’enregistrer, comme le prévoit maintenant le règlement.
La distribution de contraventions en cas de manquements doit débuter l’été prochain.
Le règlement sur les pesticides à Québec
- Interdit l’application extérieure de tous les pesticides de synthèse sur le territoire, dont les néonicotinoïdes, nocifs pour les abeilles.
- Interdit la vente de certains pesticides, dont ceux contenant du glyphosate (Roundup).
- Autorise les biopesticides homologués et reconnus comme présentant moins de risque pour la santé et l’environnement.
- Des exceptions s’appliquent, notamment sur les terrains de golf et les exploitations agricoles, ainsi que pour des cas d’infestation.
- Les entreprises en gestion parasitaire doivent s’enregistrer auprès de la Ville de Québec et obtenir leur certificat d’enregistrement. En 2024, 55 entreprises et six terrains de golf l’ont fait.
- Les compagnies doivent faire une demande de permis temporaire si elles souhaitent utiliser des pesticides qui seraient normalement interdits, pour chaque traitement ciblé.
- Un affichage détaillant notamment l’ingrédient actif utilisé pour le traitement est obligatoire.
- En cas d’infraction, les amendes varient entre 500$ et 2000$. En cas de récidive, elles peuvent aller jusqu’à 4000$.
Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?
Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.