«C’est de la folie»: l’ex-PDG de BlackBerry dénonce l’argent public donné aux firmes étrangères
L’homme d’affaires ontarien est persuadé que nos décideurs font fausse route en la matière


Francis Halin
TORONTO | Nos politiciens se font rouler dans la farine en subventionnant à coups de millions de dollars les entreprises étrangères, tempête l’ex-PDG de BlackBerry.
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«Quand on donne de l’argent à la Silicon Valley, ça la rend riche, pas le Canada», dénonce en entrevue l’ex-PDG de BlackBerry, Jim Balsillie.
Le Journal l’a rencontré début juin, à Toronto, en marge d’un événement d’affaires à saveur canadienne auquel participait le PDG sortant d’Hydro-Québec, Michael Sabia.
Comme souvent lors de ses apparitions publiques, Jim Balsillie n’a pas passé inaperçu.
Celui qui a fait don de 10 millions $ pour former une nouvelle organisation de politiques publiques afin de mousser la prospérité au pays a été volubile.
«C’est de la folie»
Ces dernières années, Jim Balsillie a fait plusieurs coups de gueule pour critiquer nos gouvernements, qui distribuent allègrement de l’argent à des entreprises de l'extérieur du pays.
Les géants étrangers de la techno ne reçoivent généralement pas de subventions au Canada, mais ils ont accès à de généreux crédits d'impôts versés par Ottawa et les provinces.
«La propriété intellectuelle de l’intelligence artificielle (IA) est allée à des étrangers. Nous ne tirons pas les avantages économiques et sécuritaires de cette puissance de calcul», analyse M. Balsillie.
Il y a trois ans, le chercheur de l’IREC Éric N. Duhaime avait lui aussi dit craindre que les 2 milliards $ de fonds publics investis dans des projets d’IA soient un coup d’épée dans l’eau, faute d’avoir la propriété intellectuelle (PI).

La chercheuse de l’IRIS Myriam Lavoie-Moore a déjà ouvertement critiqué la «concentration des sources de données par les entreprises multinationales du secteur du numérique (IBM, Google, Facebook, Amazon, Baidu ou Oracle)».
En plus de s’abreuver de deniers publics, ces organisations près des entreprises ne sont parfois pas des modèles de transparence non plus.

Peu de transparence
L’an passé, Le Journal rapportait que la grappe d’innovation Scale AI, qui a eu des centaines de millions de dollars des gouvernements, ne veut pas fournir de détails sur les salaires de ses 16 employés, qui gagnent 208 000$ en moyenne par année.
Quand on demande à Jim Balsillie pourquoi nos représentants politiques ne misent pas plus sur les entreprises de chez nous, le dirigeant coloré répond du tac au tac.
«Allez leur demander. Ça fait 20 ans que j’essaie de leur dire. C’est de la folie», lance-t-il.
«Ils utilisent un mode d’emploi des années 1970. Il faut comprendre comment fonctionne l’économie contemporaine», conclut-il.
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