Centre-ville de Montréal: le quart des cônes orange sont inutiles
Audrey Sanikopoulos
Ce n’est pas juste une impression que les cônes orange font partie intégrante du paysage du centre-ville de Montréal et que des rues sont constamment en travaux, confirme une récente étude de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.
Sur une période d’un an, 94% des rues du centre-ville ont subi un blocage total ou partiel, selon le rapport rendu public jeudi pour comprendre l’étendue des chantiers dans ce secteur de la métropole.
La Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) est désormais capable de documenter cette impression qu’il y a des «chantiers partout et tout le temps», avance Michel Leblanc, président et chef de la direction de la CCMM, en entrevue.

Par exemple, la rue Saint-Urbain a été parsemée sans cesse de cônes orange de 2014 à 2022. La situation était aussi semblable pour l’avenue des Pins ou encore la rue Notre-Dame.
L’étude a aussi démontré que plus du quart des cônes orange recensés dans le cœur de Montréal sont inutiles et qu’ils peuvent être contreproductifs pour la sécurité routière.
«Cela peut désensibiliser le piéton ou la voiture à la situation de danger qu’est censé signaler le cône», affirme M. Leblanc.

Le président de la CCMM constate également une perte de productivité dans la construction et le génie civil, ce qui joue sur la prolifération des chantiers.
«On a un secteur qui est extrêmement morcelé avec des petites entreprises qui ont moins de capacité à investir pour améliorer leur productivité», dit-il.
Peu attractif
Tout cela réduit l’attractivité du centre-ville, juge la chambre de commerce.
«Alors que les gens ont pris l’habitude du télétravail, la question des chantiers et de la fluidité devient un élément très important [pour les convaincre de revenir]», soutient M. Leblanc.

Afin de réduire l’impact des chantiers sur les travailleurs du centre-ville, la CCMM propose une série de solutions.
Elle souhaite notamment la révision des normes du ministère des Transports (MTQ) concernant l’utilisation des cônes orange, pour en réduire le nombre.
La CCMM suggère aussi d’ajouter des codes QR sur les cônes orange pour que les citoyens puissent savoir pourquoi il y a un chantier, quand il doit finir et qui en est responsable.
Les chantiers privés ciblés
M. Leblanc juge que tout le blâme n’est pas à remettre sur la Ville puisqu’elle n’est responsable que du tiers des chantiers. Les autres sont réalisés par des services d’utilité publique – comme Hydro-Québec – ou sont l’œuvre de promoteurs privés.
«[Ces derniers] empiètent sur l’espace public et vont trouver ça parfois plus rentable d’utiliser des espaces sur la voie publique en payant un permis à la Ville pour entreposer des matériaux de construction ou avoir des stationnements pour leurs employés, plutôt que d’aller négocier des espaces privés», explique-t-il.

Pour s’attaquer à ce problème, la CCMM souhaite augmenter le coût du permis de livraison de matériaux de construction à un prix élevé lors des heures de pointe entre 6h30 et 9h30 puis entre 15h30 et 19h afin d’inciter les entreprises à livrer à un autre moment. Une hausse du prix un peu moins importante est aussi proposée entre 9h30 et 15h30 ainsi qu’entre 19h et 22h.
La Ville devrait aussi augmenter ses tarifs afin qu’il soit plus cher de bloquer une rue ou un trottoir, soutient M. Leblanc.
L’administration Plante confirme qu’elle est prête à étudier les solutions. «On est tous conscients que la gestion actuelle des chantiers à Montréal peut être plus efficiente et efficace», a déclaré Marikym Gaudreault, attachée de presse du comité exécutif.

«L’étude de la CCMM confirme que la meilleure coordination promise par Projet Montréal n’est qu’un slogan politique, sans véritable plan de match», a réagi de son côté Julien Hénault-Ratelle, porte-parole de l’Opposition officielle en matière de développement économique.