À 60 ans, Céline Bonnier va jouer ce rôle mythique
Michèle Lemieux
Malgré une feuille de route impressionnante, Céline Bonnier éprouve toujours le désir de relever de nouveaux défis. La vie semble répondre à l’appel, car elle interprète Jeanne dans le nouveau long métrage de Léa Pool, On sera heureux, et elle incarnera Hamlet au théâtre dans la pièce du même nom, un rôle traditionnellement masculin.
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Céline, vous interprétez Jeanne dans le nouveau film de Léa Pool, On sera heureux. Quel est son lien avec le personnage principal?
Jeanne est l'amie de Laurent, rôle tenu par Alex (Alexandre Landry). Elle est la protectrice de son ami. Quand il entreprend une nouvelle relation, elle doute de l'identité de l’homme qui entre dans sa vie. Laurent et elle travaillent tous deux à l'immigration, alors c'est son réflexe professionnel qui la fait douter. Elle connaît son ami. C’est un homme doux et tendre qui accepte tout. Elle sait qu’il va se faire mal.
Vous avez vécu de belles retrouvailles avec Léa Pool?
Oui. J'aime tellement Léa Pool et Michel-Marc Bouchard. Je voulais faire partie de ce projet. J'ai fait des choses importantes avec Léa, dont le dernier projet, La Passion d'Augustine, il y a environ 12 ans. J'aime son écriture cinématographique. Ce film est très beau, et très important. J'aime aussi l'écriture de Michel-Marc. Je lui fais confiance. Ça fait tellement longtemps qu'il écrit autour du thème de l’homosexualité, de la différence et de l’acceptation. Dans certains pays, l’homosexualité est encore criminelle. C’est un sujet très actuel. La droite continue d’asperger la planète de ses valeurs. Cette pensée est de plus en plus acceptée, normalisée, banalisée. C’est aussi pour cette raison que ce film est important.
Avez-vous d’autres projets au programme?
Je vais commencer à répéter Hamlet, que je vais jouer en février prochain à l’Usine C avec Angela Konrad, qui m'a enseigné.
Faire partie d’un grand classique comme celui-là, c’était un rêve d’actrice?
En fait, quand on est petite, on ne rêve pas d’Hamlet, on pense à Juliette. J’ai joué Juliette avec Robert Lepage il y a longtemps. On ne pensait même pas à Hamlet (un personnage masculin), mais maintenant, on commence à tout décloisonner. Je viens aussi de terminer La chaîne musicale, une émission de quatre épisodes de deux heures, sur ICI Musique et Ohdio. C'est mon parcours, à travers la musique. Il y a plein de choses que je n’ai jamais dites en entrevue, et qui se retrouvent là.
Vous avez eu 60 ans durant la dernière année. Avez-vous marqué l’étape d’une quelconque manière?
Oui, j'ai eu 60 ans cet été. Il y a eu un gros party qui a duré environ trois jours!
Aviez-vous imaginé être encore si jeune à 60 ans?
Quand j'étais jeune, j’avais hâte d'avoir cet âge et de monter sur scène. J’ai encore l'énergie pour ça, et la passion du théâtre m’habite encore. Et là, on me confie Hamlet! Le rôle a été tenu par plusieurs femmes depuis au moins 100 ans, notamment par la grande actrice française Sarah Bernhardt. Cette fois-ci, c’est une fille de 60 ans qui joue Hamlet.
Jeune, vous rêviez d'être comédienne à 50-60 ans. Pourtant, à l’époque, ne disait-on pas que les actrices avaient fini leur carrière à cet âge?
Je pensais surtout aux actrices de théâtre, parce que j’avais des modèles de femmes plus âgées qui jouaient toujours. Je pense à Janine Sutto, aux femmes de 50-60 ans qui jouaient les Tremblay. Je regardais Les beaux dimanches. On y voyait des femmes de cet âge-là. Il y avait aussi Andrée Lachapelle. Andrée avait 50 ans quand j’ai joué avec elle lors de mon deuxième show professionnel, et elle a continué à jouer par la suite. Alors oui, on avait des modèles. À 60 ans, il y a moins de rôles, mais il y a quand même une certaine amélioration. L’année dernière, à 58-59 ans, j’étais de la série Sorcières.
Comment avez-vous accueilli cette nouvelle décennie?
Je n’y ai pas trop pensé. J'ai commencé à dire que j'avais 60 ans quand j'en avais 59. Pour l’instant, ça va. Je trouve l'expérience intéressante, à mon âge. J’aime ce nouveau rythme plus posé. Je n’ai plus tant envie de tout faire en même temps. Je n’en serais pas capable, et je n’en ai pas envie. Par contre, j'ai encore envie de m'investir beaucoup dans le jeu, parce que je suis encore passionnée. Je veux encore relever des défis.
Est-ce qu'accepter de parler de votre âge normalise la chose, à votre avis?
Oui. Il faut le dire, parce que c'était tabou il y a peu de temps. Il y a encore des femmes qui ne veulent pas dire leur âge. Il faut être fière. Ça crée de l'espoir. Ça calme. Ça crée des modèles.