Cédric Sapin-Defour décrit le lien formidable qu’il a développé avec son bouvier bernois, Ubac, dans un livre bientôt adapté au cinéma
«Son odeur après la pluie»


Marie-France Bornais
Après avoir vendu plus de 350 000 exemplaires de Son odeur après la pluie, un roman coup de cœur qui a connu un succès extraordinaire depuis sa sortie en 2023, l’écrivain français Cédric Sapin-Defour est récemment venu à la rencontre de son public québécois. Son roman, qui raconte une histoire d’amour, de vie et de mort entre un homme et son chien, touche ses lecteurs droit au cœur. Il parle des liens tissés avec Ubac, son compagnon à quatre pattes, mais aussi de notre place dans la nature et dans le vivant. Une histoire d’amour, de mort, mais aussi de vie.

Ubac, un compagnon cher à son cœur
Ubac, un bouvier bernois terriblement attachant, prend une place toujours plus grande dans la vie du narrateur, au fil des mois et des années. Un lien intense se tisse entre les deux, jusqu’à ce que la mort d’Ubac les sépare après 13 ans de vie commune.
«La première intention est très autocentrée. Je ne suis pas certain qu’au début, on écrive pour une cause plus grande que son propre plaisir, son propre bonheur, sa propre joie. J’avais besoin de trouver une activité qui me permettait d’être de nouveau en compagnie d’un être vivant qui avait disparu», commente l’écrivain en entrevue.
«Dans ces cas-là, je n’ai pas grand-chose d’autre que l’écriture pour passer de nouveau du temps avec les compagnons qui sont chers à mon coeur. Comme physiquement, le lien n’était plus possible et que sa présence n’était plus sur cette terre, mais dans quelque chose de plus vaporeux, écrire, ça m’a permis de refaire une petite promenade avec lui.»

Mettre des mots sur un lien
Dans un deuxième temps, l’écrivain voulait essayer de mettre des mots sur un lien qu’il n’avait pas pris le temps d’expliquer, d’analyser. Son chien Ubac lui a apporté beaucoup.
«Je pourrais parler des heures de ce que ce lien m’a apporté, notamment la présence de la joie. Un animal n’a pas nos filtres de mauvaise humeur, d’appréhension négative du monde: il est quand même dans l’émerveillement permanent, dans l’acceptation de la joie, dans la réceptivité de la beauté, de la bonté de ce qui l’entoure. Lorsqu’on observe vivre un animal auprès de soi, on est sur des très hauts niveaux de sentiments, je trouve.»
«J’ai beaucoup de mal quand j’entends les gens parler des animaux comme des "petites choses", comme des entités qui valent moins qu’un être humain. Lorsque tu prends le temps d’observer leur puissance, leur force, leur élégance, leur pureté, c’est très haut placé, moi, dans ma vision du monde.»
Au cœur du vivant
Cédric Sapin-Defour, qui habite en Savoie, une région française de hautes montagnes et de paysages spectaculaires, a le sentiment que son lien avec la nature s’est renforcé en compagnie d’Ubac.
«Avant, je m’estimais spécialiste dans la compréhension de la nature autour de moi. Depuis que je suis petit, mes parents m’ont enseigné à jouer dehors, à être le plus souvent possible au grand air. Ensuite, j’ai consacré ma vie aux activités qu’on appelle "les activités de nature, de montagne". J’ai passé mon temps dehors à dialoguer avec les éléments», ajoute-t-il en donnant pour exemple l’importance de lire la neige, le vent, la solidité du rocher.
«Mais lorsque tu vas dans ces mêmes territoires avec un animal, il te remet complètement à ta place, sans vouloir le faire. J’ai vu Ubac et mes autres chiens être cent fois, mille fois plus habiles pour comprendre ce qui se passait autour, pour repérer un animal, pour voir le temps et la météo changer et envisager de vite rentrer, pour sentir les pulsations de la terre.»
Son odeur après la pluie
Cédric Sapin-Defour
Éditions Stock
285 pages
- Cédric Sapin-Defour vit dans le Beaufortain, en France.
- Il a précédemment publié Gravir les montagnes est une affaire de style et Espresso chez Guérin ainsi que L’art de la trace chez Transboréal.
- Son odeur après la pluie a été traduite dans une quinzaine de pays.
- Les droits audiovisuels ont été vendus pour une adaptation au cinéma.
«Au cours des promenades, si nous sommes seuls, je parle à Ubac. Beaucoup.
Des fêlures du cœur et de leurs pansements, de la taille acceptable des compromis, de l’envie totale de liberté, du vertige à l’exercer, des abrutis et des gens formidables, de la certitude bancale d’être à ma place, de comment il va lui. Rien ne reste trop dedans. Ubac connaît tout de ma vie, l’entière demeure, et j’ignore par quel fluide il sait mieux que moi comment je vais. Parler à quelqu’un qui ne vous répond pas ou si peu que l’on poursuit jusqu’à dénuder son âme, ces vulgaires successions de pas enjambant les racines et les trèfles feraient donc l’effet d’une cure.»
- Cédric Sapin-Defour, Son odeur après la pluie, Éditions Stock
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