Ce café garage où les motos «hivernent»
Notre chroniqueur est allé respirer l’arôme du grain moulu et de l’huile dans le premier établissement du genre


Louis-Philippe Messier
À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Une nouvelle génération de motocyclistes a désormais son premier « café garage » à Montréal pour bavarder autour d’un cappuccino, pour rafistoler ses bécanes ou pour apprendre à le faire. Et ça promet d’être occupé tout l’hiver !
Au Idle Garage et Café, rue Jean-Talon Est, samedi dernier, je me retrouve au cœur d’un événement consacré à la moto où, à mon étonnement, je ne vois pas de têtes grises.

Pourtant, je me suis habitué à ce que ce genre de rassemblement soit à forte prédominance boomer, un peu comme si la génération du film Easy Rider en 1969 n’avait jamais eu de succession.
Venus par dizaines pour s’échanger des pièces en bravant le verglas, ces motocyclistes semblent être de jeunes professionnels dans la trentaine.
« J’ai mis ma Honda Shadow en consigne ici pour l’hiver et je viens en métro pour chiller et parler de moto ou pour suivre des ateliers mécaniques », relate Amandine Languinier, 34 ans, une illustratrice originaire de Toulon, dans le sud de la France, et résidente d’Hochelaga.
« Ma moto va me manquer, mais l’hiver va être moins long en me tenant ici avec d’autres adeptes », dit-elle.
Jeunes urbains

« J’ai eu mon permis de moto juste avant mon permis de char », me confie Mickey Rose, un des trois propriétaires de ce café qui a ouvert en mai dernier.
« Nous visions à nous établir en un an comme un repaire connu dans la communauté, mais l’engouement a été instantané », me dit son associé, Dave Lechasseur.
Même si le gouvernement décrétait un « reconfinement », le garage, tenu pour un service essentiel, restera ouvert.
« Ça a joué dans notre décision. Mikey et moi sommes des propriétaires de salon de barbier [Savvy, à la Plaza Saint-Hubert] qui avons été forcés de fermer pendant des mois, alors nous voulions nous lancer dans un domaine essentiel comme la mécanique », ajoute M. Lechasseur.
Ateliers d’initiation
Le maestro de la mécanique du café garage, c’est Charles-Élie Dumontier, le troisième copropriétaire, qui me raconte avoir pratiquement grandi sur une moto et qui exploite le garage Shérif, à Bolton-Est, dans les Cantons-de-l’Est.
« Ce que j’aime ici, avec notre café, c’est apprendre à nos clients comment réparer eux-mêmes leurs engins... et les gens sont au rendez-vous pour les ateliers d’initiation que je donne aux deux fins de semaine. »

Le café Idle, dont le nom veut dire « moteur qui roule au neutre », est ouvert aux mécaniciens amateurs qui veulent travailler sur leurs engins en compagnie d’autres passionnés. Parfois, celui qui s’y connaît donne des trucs aux autres.
« L’idéal, c’est que ce soit toi qui le fasses, que tu te salisses les mains, que tu te fasses un peu mal parfois, mais que ça te rentre dans la tête, ce qu’il y a à faire », ajoute M. Dumontier.
Même les scooters
La remise où hivernent les motocyclettes est située dans un lieu tenu secret, pour des raisons de sécurité.
BMW, Harley Davidson, Honda, Triumph, toutes les marques de moto sont les bienvenues... même les scooters.
Question d’encourager les bonnes habitudes, la seule bière que l’on y sert est sans alcool.