Cauchemar en cuisine: une enquêtrice privée pour retrouver son argent
Un couple de Carignan n’a jamais reçu sa cuisine malgré les 34 000$ en dépôts versés il y a deux ans
Louis-Philippe Bourdeau et Kathryne Lamontagne
Un cuisiniste montréalais haut de gamme aurait abandonné plusieurs de ses clients après avoir encaissé leurs dizaines de milliers de dollars en acomptes. Plusieurs d’entre eux disent avoir vécu un cauchemar et se sont confiés à notre Bureau d’enquête et à l’émission J.E.
Malgré un jugement du tribunal forçant Modena et son propriétaire, Olivier Proulx, à lui verser près de 45 000$, un couple de Carignan qui n’a jamais reçu sa cuisine a été forcé d’engager un enquêteur privé dans l’espoir de revoir un jour son argent.
Geneviève Perras et Patrick Dolan ont retenu au printemps 2023 les services de Modena pour rénover la cuisine et la salle de bains de leur chalet de Sainte-Marcelline-de-Kildare, dans Lanaudière. Un acompte de 50%, soit près de 34 000$, avait alors été versé. Les fournitures devaient être livrées et installées trois mois plus tard.
Mais à ce jour, le couple n’a toujours pas reçu sa cuisine.
«Ça fait deux ans. On est épuisés, c’est beaucoup de démarches», peste Geneviève Perras.
Toujours des retards
À l'été 2023, la représentante de Modena, Diane Saint-Jacques, aurait d’abord pointé l’erreur d’un employé, puis des retards du transporteur qui devait rapporter les armoires d’Italie, pour expliquer les délais.
Puis Olivier Proulx lui aurait assuré que sa cuisine arriverait à la fin août 2023, sans quoi il s’engageait à lui rembourser son dépôt, peut-on lire dans un courriel obtenu par notre Bureau d’enquête.
Mais à la fin août, toujours pas de cuisine. Geneviève Perras réclame son dépôt. Olivier Proulx lui aurait répondu avoir besoin de temps, puisqu’il n’avait plus de liquidités, raconte la cliente.
Pourtant, la Loi sur la protection du consommateur prévoit que cet acompte aurait dû être placé dans un compte en fidéicommis jusqu’à la livraison de la cuisine, une interprétation que conteste M. Proulx.
Devant le tribunal
Mme Perras s’est adressée aux tribunaux. En juin 2024, une entente à l’amiable est survenue entre les parties... mais Modena ne l’a pas respectée. Six mois plus tard, le tribunal a donc condamné Olivier Proulx et son entreprise à rembourser l’acompte des clients, en plus de condamner Modena à verser 10 000$ en dommages.
À ce jour toutefois, les clients disent n’avoir reçu aucun sou. Geneviève Perras s’est plutôt acheté une nouvelle cuisine, a payé un avocat, fait appel à un huissier et engagé une enquêtrice privée pour retracer les actifs de l’entrepreneur et tenter d’être dédommagée.
«Malheureusement, Olivier doit de l’argent partout», déplore-t-elle.
Sans commenter ce cas en particulier, Olivier Proulx assure qu’il est «en train de régler ce dossier-là», sans préciser à quel moment ni de quelle manière.
Un gros train de vie, mais beaucoup de dettes
Le propriétaire de Modena présente un taux d’endettement très élevé, peut-on lire dans le rapport de l’enquêtrice privée engagée par Geneviève Perras, produit en février dernier. Olivier Proulx n’a aujourd’hui aucun actif immobilier et ne possède aucune voiture: tout est en location. Voici des éléments pertinents tirés de ce rapport:
- Il a vendu son chalet 2,55 M$ en novembre 2023. Cette propriété était toutefois lourdement hypothéquée par une banque et des prêteurs privés;
- Il a des soldes totalisant au moins 28 000$ sur ses cartes de crédit;
- Il loue actuellement une Mercedes Benz, deux motomarines, un bateau ainsi qu’un ponton;
Questionné sur ses dettes, Olivier Proulx s’est contenté d’affirmer que sa situation financière n’avait «aucune incidence» sur sa compagnie.
